9 L’indispensable réforme de la Section juridictionnelle du Conseil d’État syrien

Ahmad Kodmani

Introduction

La justice syrienne est généralement considérée comme bureaucratique, corrompue, peu efficace et arbitraire[1]. Des initiatives internationales ont été proposées à la Syrie pour l’améliorer. En 2006, un projet de modernisation de la justice en Syrie a eu lieu entre le Gouvernement syrien et le programme de développement des Nations unies[2]. Entre 2007 et 2010, une initiative de l’Union européenne a été adoptée dans le même objectif[3]. Toutefois, ces tentatives ne concernent que l’ordre judiciaire.

Le Conseil d’État joue, en tant que juridiction administrative, un rôle essentiel pour le maintien d’un équilibre harmonieux entre les prérogatives de la puissance publique et les droits et libertés des citoyens. Dans l’optique de la reconstruction de la Syrie sur les bases d’un État de droit démocratique, il est indispensable de réformer le Conseil d’État syrien pour qu’il puisse jouer son rôle de protection des citoyens syriens. Contribuer à ce projet d’avenir est notre objectif. Dans un premier temps, nous évaluerons la Section juridictionnelle du Conseil d’État syrien (I). Dans un second temps, nous proposerons des réformes inspirées des Conseils d’État belge et français, et ce pour les mêmes raisons que celles mentionnées dans le chapitre précédent (II).

I. Une évaluation

Le Conseil d’État syrien est considéré comme une institution juridictionnelle faible pour protéger les droits des citoyens, comme l’estime Mohamad Alhussein, ancien président du Conseil d’État syrien[4] : « Le Conseil d’État était très marginalisé et il n’a pas effectivement exercé son rôle pour contrôler la légalité des actes administratifs. »[5] Comment expliquer ce constat négatif ? Dans cette partie, nous passerons en revue trois caractéristiques du Conseil d’État syrien qui méritent notre attention : les compétences du Conseil d’État, la procédure et l’exécution des décisions d’annulation du Conseil d’État syrien.

Les compétences du Conseil d’État : un rôle limité

L’étude du régime juridique du Conseil d’État syrien et sa jurisprudence montrent que le Conseil d’État syrien ne joue pas un rôle efficace pour contrôler les activités de l’administration publique. Passons en revue les différentes limitations du rôle du Conseil d’État qui aboutissent à réduire l’efficacité de son contrôle sur les autorités administratives syriennes et sur le pouvoir exécutif.

Une compétence du contentieux d’annulation limitée par la loi

Le Conseil d’État syrien est un juge d’attribution. Sa compétence a été déterminée par les articles 8, 9, 10, 11, et 12 de la loi n° 32 du 2019. En vertu de ces dispositions législatives, le Conseil d’État syrien statue sur les recours en annulation dirigés contre les décisions administratives et les recours en indemnité du fait des actes administratifs il égaux. Il statue également en pleine juridiction sur les contestations dans une série de domaines comme : les litiges concernant le contrat administratif ; les litiges électoraux concernant les membres des Conseils locaux[6] ; les recours contre les décisions définitives de l’administration fiscale en matière de taxe ou d’impôts[7] ; les litiges concernant les salaires, les pensions et les primes dans la fonction publique[8] ; les litiges résultant de l’application de la loi n° 50 de 2004 sur le statut des agents publics[9].

Au contentieux d’annulation, la loi organique du Conseil d’État syrien contient certaines limitations. D’abord, les actes administratifs relatifs aux agents publics qui peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir sont limités et énumérés de manière peu claire par la loi[10], ce qui vise à limiter les cas du recours d’annulation. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer avec les recours ouverts aux particuliers qui sont prévus de manière générale et sans énumérer les actes attaquables[11]. Comme l’estime Sam Dalla, « l’énumération législative des actes attaquables concernant les agents publics constitue une restriction primitive du recours pour excès de pouvoir »[12].

Ensuite, le législateur syrien n’a pas défini la nature des actes administratifs susceptibles de recours d’annulation. La loi n° 32 se borne à préciser que l’acte doit être définitif et provenir d’une autorité administrative[13]. Le législateur syrien a donc adopté le critère organique de l’acte administratif. Dans sa jurisprudence, le Conseil d’État syrien juge irrecevables les recours dirigés contre les actes émanant d’institutions de droit privé chargées de la gestion d’un service public ou d’une mission d’intérêt général. Par exemple, le Conseil d’État a déclaré que les ordres professionnels sont des institutions de droit privé et que leurs décisions échappent à sa saisine[14]. Il s’est également jugé incompétent pour connaître des actes émanant des organisations populaires[15] ou des universités privées. Cette interprétation restrictive de ses propres compétences est critiquée par la doctrine syrienne[16].

Le contrôle de la constitutionnalité des actes réglementaires

Comme on l’a vu, le législateur syrien n’a pas déterminé la nature de l’acte administratif attaquable devant le Conseil d’État syrien, ce qui ouvre la porte à des recours contre des actes administratifs individuels et réglementaires. Cela semble confirmé implicitement par l’article 21 de la loi n° 32[17] qui accepte le recours contre les actes réglementaires. Cependant, le contrôle de l’inconstitutionnalité des arrêtés réglementaires[18] (en arabe : Al-lawaeh aw al-anzima) a été exclu de la compétence du Conseil d’État par des textes constitutionnels et législatifs[19].

L’article 146 de la Constitution syrienne de 2012 accorde cette compétence à la Haute Cour constitutionnelle syrienne[20]. L’article 14 de la loi n° 7 de 2014 relative à la Haute Cour constitutionnelle énonce qu’ « Un cinquième des membres de l’Assemblée populaire (Parlement syrien) peut constater la constitutionnalité des règlements, dans un délai de 15 jours de leur publication, par une demande enregistrée au greffe de la Haute Cour constitutionnelle. La Cour devrait rendre sa décision dans un délai de 15 jours de l’enregistrement de la demande et la notifie au président de la République et au président du Parlement, dans un délai de trois jours. » En vertu de cet article, le seul organe compétent pour constater l’inconstitutionnalité de règlements est donc le Parlement syrien. En accordant ce droit aux membres du Parlement, le législateur syrien a donc bloqué de facto le contrôle de la constitutionnalité des règlements, comme il l’a fait pour le contrôle de la constitutionnalité des lois. En effet, la majorité des membres du Parlement syrien appartient au parti ba’as. Selon le site du Parlement syrien, les membres du parti ba’as au sein du Parlement syrien (élection législative 2016-2020) sont de cent soixante-huit sur deux cent cinquante (soit soixante-sept pour cent), les indépendants sont au nombre de soixante-sept et les autres partis réunissent quinze membres. À la suite des élections législatives de 2021, le parti ba’as et ses satellites, réunis sous l’étiquette du Front national progressiste, réunissent désormais cent septante-sept sièges sur deux cent cinquante[21]. La domination du pouvoir législatif syrien par le pouvoir exécutif rend donc tout contrôle de constitutionnalité théorique.

Les actes du pouvoir exécutif à caractère législatif

Les actes du pouvoir exécutif à caractère législatif doivent-ils être considérés comme des actes administratifs ? L’article 111 de la Constitution syrienne de 1973 devenu l’article 113 de la nouvelle Constitution syrienne de 2012 octroie au Président un important pouvoir législatif dans trois cas : dans l’intervalle des sessions de l’Assemblée du peuple ; au cours des sessions de l’Assemblée du peuple en cas de nécessité absolue se rapportant aux intérêts nationaux ; entre les intervalles de deux législatures. Ces actes doivent faire l’objet d’une ratification législative ultérieure selon des conditions qui, en pratique, rendent leur abrogation très théorique[22].

En l’absence d’une jurisprudence syrienne sur le régime juridique de tels actes, la question de savoir si de tels actes pourraient être attaqués devant le Conseil d’État reste ouverte. Certains auteurs syriens estiment que ces actes doivent être considérés comme équivalents aux ordonnances prévues à l’article 38 de la Constitution française et que par conséquent, ils peuvent faire l’objet d’un contrôle juridictionnel par le Conseil d’État avant leur ratification par le parlement[23]. D’autres auteurs estiment au contraire qu’avant ou après leur ratification par le Parlement syrien, ces actes sont assimilables à des lois et que partant, les recours introduits contre de tels actes devant le Conseil d’État doivent être considérés comme irrecevables[24]. En pratique, ces incertitudes rendent théoriques les recours formés à l’encontre de telles normes, ce qui immunise de facto de tels actes, alors même qu’ils devraient être entourés d’une attention juridictionnelle toute particulière.

Des décisions administratives extra-juridictionnalisées

Chaque citoyen doit avoir la possibilité de s’adresser à un juge lorsqu’il est porté atteinte à l’un de ses droits. La Syrie a garanti ce droit d’agir en justice dans sa Constitution[25] et elle a signé le Pacte international relatif aux droits civils et politiques[26]. Pourtant, le législateur syrien a privé l’administré de tout ou partie de la possibilité de recours contre certains actes administratifs dans une série de lois. Sam Dalla estime que « Concernant les législations qui privent les administrés de recours devant la justice, seuls des phénomènes extra-juridiques peuvent expliquer leur existence ; certaines de ces législations ont été forgées dans certaines périodes où le pays traversait des transformations sociopolitiques. D’ailleurs, elles sont le résultat de la confusion entre trois pouvoirs à un moment donné, mais aussi, la conséquence de l’autorité croissante du pouvoir exécutif. »[27]

En ce qui concerne les actes qui sont immunisés contre tout recours juridictionnel, on peut citer l’article 79 de la loi n° 54 du 3 juillet 1962 qui prohibe tout recours contre les décisions de la Commission médicale militaire après leur approbation par le ministre de la Défense ; l’article 162 de la loi n° 1 du 31 janvier 1975 sur l’organisation des universités syriennes qui interdit tout recours contre les décisions émanant du corps universitaire à l’encontre de ses étudiants ; l’article 4 de la loi n° 145 du 4 janvier 1966[28] qui interdit le recours pour excès de pouvoir contre les décisions du conseil administratif du ministère de l’Agriculture et la réforme agraire concernant la réquisition des terres[29] ; l’article 7 de la loi n° 20 du 24 août 1983 sur l’expropriation qui interdit le recours en annulation contre les décrets d’expropriation[30].

Certains actes sont partiellement immunisés contre les recours juridictionnels. On peut citer la loi concernant les impôts sur le revenu n° 24 de 2003 qui a limité les recours qui peuvent être introduits contre les décisions de la Commission de révision[31]. Certains auteurs syriens ont condamné le fait que des actes administratifs ne soient pas susceptibles de recours et considèrent que les dispositions législatives qui privent les individus de recours sont inconstitutionnelles et constituent une atteinte au droit d’agir en justice[32]. Qu’en pense le Conseil d’État syrien ?

Dans un premier temps, le Conseil d’État s’est opposé à l’immunisation juridictionnelle de certains actes administratifs[33]. Dans un second temps, la jurisprudence du Conseil d’État a admis l’immunisation juridictionnelle de certains actes organisée par le législateur[34]. Il s’est déclaré incompétent à l’égard des décisions de révocation des fonctionnaires « par la voie directe ou indirecte, c’est-à-dire en annulation ou indemnisation »[35]. Selon un raisonnement critiquable, le Conseil d’État a estimé que « (la loi) a accordé le droit de révocation des fonctionnaires au Conseil des ministres exclusivement et sans suivre la voie disciplinaire »[36]. Ce dernier étant « un organe collégial », cela constituerait « une protection suffisante pour les fonctionnaires »[37]. Dans certaines décisions, le Conseil d’État a cependant infléchi son attitude en rejetant l’irrecevabilité de recours contre certaines décisions administratives entachées d’une illégalité grave. Dans ce cas, il a constaté leur inexistence[38].

Selon Sam Dalla et à raison, « L’attitude du Conseil d’État syrien face à ces législations est choquante et constitue un flagrant déni de justice. Le Conseil d’État pouvait contrôler ces actes pris en application des lois susvisées en s’appuyant sur la Constitution notamment, selon laquelle le droit d’ester, d’utiliser les voies de recours et de défense devant la justice, doit être sauvegardé par la loi. »[39]  Toutefois, nous pouvons saluer une évolution positive récente de la jurisprudence administrative, même si elle ne porte pas sur d’importantes décisions du pouvoir exécutif. Dans une décision du tribunal administratif de Damas, le Tribunal a reconnu sa compétence contre le recours de la révocation des fonctionnaires[40]. Dans une autre décision, la Cour du Contentieux administratif a jugé l’annulation d’une décision universitaire contre un étudiant[41].

L’absence d’un régime de responsabilité sans faute

En confiant au Conseil d’État la compétence exclusive d’engager la responsabilité de l’État du fait des décisions administratives illégales[42], le législateur syrien a limité la compétence du Conseil d’État pour connaître des cas de responsabilité sans faute. La victime d’un dommage du fait de l’administration non constitutif de faute doit invoquer la responsabilité de l’État devant la juridiction judiciaire. Or, l’étude de la jurisprudence de la Cour de cassation montre que les cours et tribunaux de l’ordre judiciaire refusent la responsabilité sans faute de l’administration publique[43]. En pratique, l’indemnisation des victimes d’un dommage causé par l’État est donc très aléatoire. En conséquence, la doctrine syrienne a plaidé pour la réforme de la loi n° 55 de 1959 en vue d’élargir la compétence du Conseil d’État syrien et le désigner comme juge de droit commun de la responsabilité de l’État, comme c’est le cas en France et en Égypte dès la réforme de 1972[44].

Nous venons de voir que différentes limitations sont apportées au rôle de contrôle des actes des autorités administratives syriennes et du pouvoir exécutif par le Conseil d’État, ce qui dessine, pour ces autorités, des espaces confortables d’immunité juridictionnelle et pour les administrés, des zones menaçantes de non-droit. Nous allons voir à présent que la procédure organisée par la loi est également sujette à critiques.

Une procédure peu efficace

La procédure organisée devant le Conseil d’État syrien suscite une série de questions que nous allons passer en revue. Nous nous pencherons successivement sur les problèmes soulevés par le référé administratif, la durée de la procédure, l’absence d’un règlement de procédure et enfin, par le rôle du Commissariat d’État syrien dans l’instruction des affaires.

Le référé-suspension

Instrument indispensable en vue d’obtenir rapidement la suspension d’une décision administrative dont l’application immédiate risquerait de provoquer un dommage grave et difficilement réparable, le référé administratif n’est pas inconnu du droit syrien. En effet, l’article 22 de la nouvelle loi du Conseil d’État syrien prévoit : « Le recours n’a pas d’effet suspensif vis-à-vis de la décision attaquée. Cependant, le Conseil d’État peut suspendre l’exécution de cette décision, à la demande explicite du requérant, s’il apparaît que l’exécution risque d’entraîner des conséquences difficilement réparables. »[45] Cet article est la seule disposition relative au référé administratif dans la loi organique du Conseil d’État syrien[46]. En cas de silence du texte législatif, les procédures de référé judiciaire sont applicables devant le juge de référé administratif. L’étude de régime du référé administratif syrien montre que la demande de suspension doit absolument être introduite dans le même acte de procédure que la requête en annulation. Elle n’est recevable qu’à la condition de l’existence des moyens sérieux et d’un risque de préjudice grave difficilement réparable[47]. La jurisprudence administrative syrienne admet la demande de suspension[48] et la demande de mesures provisoires dans le cadre du contentieux en référé.

En pratique, différentes difficultés ont été pointées par la doctrine, difficultés qui font obstacle à l’efficacité du référé administratif. D’abord, la demande de suspension doit être introduite en même temps que la requête en annulation, ce qui empêche de demander la suspension d’un acte à l’encontre duquel un recours en annulation a déjà été introduit. Ensuite, les procédures suivies devant le juge de référé administratif sont relativement longues, notamment en raison du recours à l’expertise pour apprécier la recevabilité de la demande de suspension devant le juge de référé syrien[49]. Le recours à l’expertise provoque un encombrement devant le Conseil d’État[50] et réduit la compétence du juge de fond[51]. Enfin, en matière de suspension, l’ordonnance du juge de référé administratif syrien n’est pas souvent motivée[52].

Pour contrebalancer la longueur de la procédure devant le juge de réfère administratif syrien, le Conseil d’État syrien peut appliquer un régime de suspension provisoire de la décision administrative pour une durée de 2, 3 ou 6 mois. L’étude de la jurisprudence du Conseil d’État montre que la suspension provisoire est souvent utilisée dans le domaine relatif au permis de l’urbanisme[53]. Loin de faciliter les procédures devant le juge de référé, la suspension provisoire a conduit au prolongement des procédures qui, en pratique, peuvent durer … plus de trois ans[54] !

Comme nous allons le voir à présent, le référé administratif n’est pas la seule procédure qui peine à aboutir dans un délai raisonnable. La lenteur caractérise plus généralement la justice rendue par le Conseil d’État syrien.

La lenteur de la procédure

Les procédures devant le Conseil d’État syrien sont généralement lentes, et le délai de traitement des affaires est long. Bien que les statistiques manquent, on peut affirmer que les organes contentieux du Conseil d’État syrien sont encombrés et insuffisants pour régler la masse du contentieux administratif. La durée de l’instance pour certains dossiers peut prendre dix ans[55]. La raison essentielle de l’encombrement des organes contentieux du Conseil d’État syrien est l’absence d’un règlement spécial des procédures devant le Conseil d’État et le rôle critiquable du Commissariat d’État dans la construction des affaires.

L’absence d’un règlement des procédures administratives

Hormis quelques règles procédurales prévues par la loi organique du Conseil d’État syrien, il n’existe pas de règlement des procédures administratives devant la Section juridictionnelle du Conseil d’État[56]. À défaut d’un tel règlement, les règles des procédures civiles sont applicables sous réserve qu’elles ne violent pas la nature du contentieux administratif[57]. L’absence d’un règlement spécifique adapté au contentieux administratif conduit à une véritable explosion de celui-ci et à un encombrement devant les organes du Conseil d’État syrien.

Selon la loi organique du Conseil d’État de 2019, la procédure devant le Conseil d’État commence par l’introduction de la requête, par avocat, au greffe[58]. Le greffier procède d’abord à son enregistrement en lui donnant un numéro. Ensuite, il notifie une copie de la requête à la partie adverse (l’administration) qui dispose d’un délai d’un mois, prenant cours à la réception de la notification de la requête, pour adresser au greffe un mémoire en réponse et le dossier administratif[59]. Après l’expiration de cette durée et dans un délai de 24 heures, le greffe adresse le dossier complet au Commissariat d’État pour la construction des dossiers[60]. La partie requérante peut adresser un mémoire en réplique dans un délai déterminé par le commissaire d’État[61].

Au sein de cette procédure sommaire, on peut relever une série d’entraves à l’effectivité du droit de recours administratif : les voies et délai de recours ne sont pas mentionnés dans la décision administrative ; le délai du recours d’annulation a été délimité à soixante jours pour tous les individus, soit à l’intérieur, soit à l’extérieur de la Syrie[62] ; la requête doit être déposée sur place et ne peut pas être transmise par voie postale ou par l’utilisation de la nouvelle technologie[63] ; le recours devant le Conseil d’État est ouvert à un nombre limité d’avocats[64] ; le système d’aide judiciaire est bloqué.

Le rôle du Commissariat d’État syrien dans l’instruction des affaires

L’article 29 de la loi organique du Conseil d’État syrien prévoit le rôle et la compétence du Commissariat d’État dans l’instruction des dossiers devant les organes contentieux du Conseil d’État. La composition du Commissariat d’État est précisée par l’article 7 de la loi n° 32 : « Le Commissariat d’État se compose d’un président (un vice-président du Conseil d’État ou un conseiller d’État), de conseillers d’État adjoints, de maîtres de requêtes. »[65] Le Commissariat d’État est chargé de l’instruction des dossiers auprès des tribunaux administratifs, des Cours du contentieux administratif et de la Cour administrative suprême, et les met en état d’être jugées[66]. Dans le cadre de l’instruction des dossiers, le Commissariat bénéficie de larges pouvoirs ; il peut communiquer avec les deux parties pour demander des éclaircissements ou des informations complémentaires, interroger les parties ou demander l’intervention de tiers[67]. Le Commissariat peut également proposer une médiation entre les parties selon les principes généraux de la Cour administrative suprême[68]. Enfin, le Commissariat d’État établit son rapport qui contient l’exposé des faits et des droits en cause, les questions juridiques et une conclusion motivée[69]. Les parties peuvent obtenir une copie de ce rapport auprès du greffe du tribunal concerné. Le greffe notifie la date d’audience aux parties au moins huit jours avant l’audience[70]. Il est clair que le législateur a accordé au Commissariat d’État de grands pouvoirs dans le processus de l’instruction des dossiers.

En pratique cependant, le rôle du Commissariat d’État est largement marginalisé. Les administrations publiques ne communiquent pas toujours le dossier administratif au Commissariat d’État, ou le communiquent de manière incomplète ou tardive. Cela conduit à un retard dans les procédures de traitement des affaires. L’absence de délai imposé au Commissariat d’État pour l’instruction des affaires aboutit au fait que ce dernier établit son rapport dans un délai pouvant aller jusqu’à un an[71]. Sur le plan du contenu, comme l’épingle Mohamad al-Halak dans sa thèse sur la juridiction administrative syrienne[72], le Commissariat d’État dépose souvent un rapport sommaire, sans information ni consultation des parties, qui se limite à désigner un expert ou à rejeter la requête, ce qui oblige le juge de l’audience à décider de rouvrir les débats pour permettre aux parties d’exposer leurs arguments. En contradiction avec les objectifs poursuivis par le législateur syrien, le Commissariat d’État devient l’organe qui est principalement responsable du retard dans le traitement des affaires devant le Conseil d’État.

Le défaut d’exécution des décisions du Conseil d’État syrien

Un problème majeur qui mine l’efficacité du Conseil d’État syrien concerne le respect de ses décisions prises au contentieux d’annulation. Malgré le manque de statistiques sur l’inexécution des décisions de la justice administrative en Syrie, on peut affirmer que l’administration publique syrienne renâcle dans de nombreux cas à exécuter les décisions du juge administratif, soit en ne les exécutant pas du tout, soit en ne les exécutant que partiellement[73], soit encore en ne les exécutant que tardivement. À raison, Sam Dalla estime que « La justice dont les décisions ne sont pas exécutées ou littéralement respectées n’est qu’une justice artificielle et elle renforce même le sentiment de l’injustice chez l’administré. Ce dernier, victime d’une décision illégale de l’administration, devient une nouvelle fois la victime de la justice elle-même. »[74]

Pour analyser ce défaut d’effectivité, nous envisagerons successivement les formules exécutoires des décisions du Conseil d’État syrien et les moyens contentieux organisés par les lois syriennes pour faire exécuter les décisions du Conseil d’État syrien.

Les formules exécutoires des décisions du Conseil d’État syrien

L’alinéa 2 de l’article 65 de la loi organique du Conseil d’État syrien n° 32 dispose que la grosse d’un arrêt d’annulation, soit la mention apposée sur une décision de justice en vue de son exécution, porte la formule exécutoire suivante : « Les ministres et chefs de service compétents doivent pourvoir à l’exécution du présent jugement et s’y conformer. »[75] La formule exécutoire d’un jugement de plein contentieux est la suivante : « L’autorité chargée de l’exécution doit pourvoir à l’exécution du présent lorsqu’elle est légalement requise, et les autorités compétentes doivent lui prêter main-forte si nécessaire. »[76]

Le droit syrien confie l’exécution des jugements du Conseil d’État qui ne sont pas les décisions d’annulation aux huissiers de justice. La loi n° 13 de 2010 modifiant la loi organique du Conseil d’État syrien a inséré un nouvel alinéa à l’article 36 qui dispose que « Les autres jugements rendus par le Conseil d’État, pour l’administration publique ou autres, sont exécutés par l’huissier de justice compétent. » De même, l’article 275 de la nouvelle loi des procédures civiles n° 1 de 2016 prévoit que « Les décisions rendues par le Conseil d’État, en matière d’indemnisation, sont exécutées par l’huissier de justice compétent. »[77] Comme l’huissier de justice judiciaire n’est pas compétent pour exécuter les décisions d’annulation du Conseil d’État syrien, la seule voie ouverte contre l’inexécution des décisions d’annulation du Conseil d’État syrien est la voie contentieuse qui, comme on va le voir, reste très théorique.

Les moyens contentieux proposés par les lois syriennes

La doctrine syrienne estime que, pour obtenir l’exécution d’une décision rendue par le Conseil d’État syrien qui tarde à être exécutée, le bénéficiaire peut introduire un recours pour excès de pouvoir contre l’inexécution de la décision de justice par l’administration[78] et mettre en cause la responsabilité civile et pénale de l’agent responsable de l’inexécution[79]. Ces deux moyens restent cependant théoriques.

La jurisprudence du Conseil d’État syrien, dans les quinze dernières années, ne contient aucune décision rendue par le Conseil d’État relative aux demandes d’annulation d’un refus implicite ou exprès de l’exécution d’une décision du Conseil d’État syrien[80]. De plus, le Conseil d’État syrien a jugé irrecevables les recours concernant le refus de l’administration d’exécuter les décisions judiciaires, en considérant que « Le Conseil d’État n’est pas compétent pour connaître des recours concernant l’inexécution des décisions judiciaires par l’administration publique. »[81] Il estime que « L’inexécution de la décision judiciaire par l’administration peut prendre plusieurs formes : orale, écrite ou matérielle. En conséquence, le Conseil d’État n’est pas compétent pour connaître les litiges qui sont le résultat d’un acte matériel (et non d’un acte administratif). »[82]

La voie de la mise en cause de la responsabilité civile ou pénale se révèle tout aussi peu efficace. La Constitution syrienne de 2012 prévoit dans son article 138 que « L’abstention de l’exécution des décisions judiciaires ou les entraves mises à leur exécution constituent un crime puni par la loi. »[83] Le Code pénal syrien considère que la méconnaissance de la chose jugée syrienne constitue un délit pénal[84]. Malheureusement, de telles dispositions demeurent sans application en Syrie. En effet, dans la plupart des cas, l’agent chargé de l’exécution de la décision du Conseil d’État est un ministre[85]. Même quand il s’agit d’un agent public, la mise en œuvre de sa responsabilité pénale, qui exige l’intervention du procureur public, est très rare[86].

Au vu de ces éléments, modifier la loi organique du Conseil d’État syrien semble indispensable pour renforcer l’effectivité de l’exécution des décisions du juge administratif syrien au contentieux de l’annulation.

Après avoir passé en revue les caractéristiques du contentieux administratif d’annulation et ses principales faiblesses, nous allons proposer des améliorations de la justice administrative syrienne en nous inspirant des exemples belge et français.

II. Une réforme souhaitable

Nos propositions d’amélioration du Conseil d’État syrien visent à clarifier et renforcer ses compétences, à améliorer la procédure et à renforcer les moyens d’exécution de ses arrêts.

Clarifier et renforcer les compétences

En Belgique, le Conseil d’État est compétent pour statuer par voie d’arrêt sur les recours en annulation dirigés contre les actes et règlements des diverses autorités administratives[87]. Aux termes de l’article 14 des lois coordonnées sur le Conseil d’État belge, tous les actes et règlements des diverses autorités administratives ainsi que les silences de l’autorité peuvent être soumis au contrôle du Conseil d’État[88]. Les actes internes relatifs aux marchés publics et aux membres de leur personnel émanant des assemblées législatives et des organes du pouvoir judiciaire ont récemment été ajoutés à sa saisine[89].

En France, le Conseil d’État est le juge de cassation contre les décisions rendues en dernier ressort par toutes les juridictions administratives françaises[90], sauf dans certains cas déterminés par les lois[91]. Depuis 1953[92], les quarante-deux tribunaux administratifs sont les juges de droit commun du contentieux administratif en premier ressort[93]. À ce titre, ils tranchent le contentieux en annulation, le contentieux en responsabilité administrative (responsabilité pour faute et sans faute) et les litiges sur le contrat administratif[94]. Depuis la loi du 31 décembre 1987, huit cours administratives d’appel statuent en second ressort sur les jugements des tribunaux administratifs[95].

Comme nous l’avons vu, en Syrie, la domination du pouvoir exécutif sur les autres pouvoirs a diminué le rôle du Conseil d’État pour contrôler la légalité des actes administratifs. En fait, l’existence d’une série de lois excluant tout recours juridictionnel, le droit du président de la République d’adopter des décrets législatifs et la compétence de la Cour constitutionnelle pour vérifier la constitutionnalité des règlements sont des questions limitant le rôle du Conseil d’État pour contrôler les actes administratifs. Des réformes constitutionnelles et législatives doivent être apportées à la Syrie afin d’améliorer l’efficacité du Conseil d’État syrien et élargir ses compétences.

Sur le plan constitutionnel, pour établir un État démocratique en Syrie, il est important que la Syrie limite le pouvoir législatif du président de la République[96] et accorde au Conseil d’État la compétence de contrôler la constitutionnalité des actes réglementaires. Sur le plan législatif, il est indispensable que les lois syriennes évoluent pour se conformer à la Constitution syrienne de 2012. Ce travail exige un grand effort du Parlement syrien pour modifier les lois syriennes inconstitutionnelles dans le plus bref délai. En soutien à notre argumentation, nous pouvons invoquer l’article 154 de la Constitution syrienne qui enjoint le législateur à modifier les législations en vigueur et publiées avant l’approbation de la Constitution pour les rendre conformes à la Constitution dans un délai de trois ans. À défaut, la nouvelle Constitution de 2012 risque de subir le même sort que la Constitution syrienne de 1973. L’article 173 de la Constitution syrienne de 1973 disposait que « Les législations entrées en vigueur et publiées avant l’adoption de cette Constitution restent applicables jusqu’à ce qu’elles soient modifiées conformément à ses dispositions. » Malgré la consécration des droits civils et politiques, la loi des tribunaux exceptionnels (la Cour de sécurité) et la loi d’état d’urgence[97] sont restées d’application en Syrie jusqu’en 2011, en violation flagrante de la Constitution de 1973[98].

Sur le plan législatif, les dispositions qui protègent certains actes administratifs de tout contrôle judiciaire doivent être modifiées pour se conformer à l’article 50 de la Constitution syrienne de 2012 qui, en son alinéa 4, interdit l’immunisation juridictionnelle des actes administratifs[99]. Dans le même ordre d’idées, la loi n° 32 de 2019 sur le Conseil d’État syrien doit être réformée sur plusieurs points afin de garantir l’efficacité du contrôle juridictionnel des actes de l’exécutif et faire obstacle à l’immunisation juridictionnelle dont jouissent certains actes de l’exécutif, en contradiction avec la Constitution de 2012.

D’abord, la compétence d’annulation du Conseil d’État syrien doit être étendue afin d’inclure tous les actes administratifs individuels ou réglementaires en évitant l’énumération législative mentionnée par l’article 8 de la loi n° 32 relative aux agents publics. De même, il convient d’élargir la notion d’acte administratif pour permettre au Conseil d’État syrien de contrôler les actes émanant d’institutions de droit privé chargées de la gestion d’un service public. Ensuite, il importe de soumettre les décrets législatifs (en arabe : Al-marassim altashreh) au contrôle du Conseil d’État syrien avant leur ratification par le Parlement. En effet, avant leur ratification par le Parlement, ces actes sont des actes administratifs à caractère réglementaire. En pratique, ce pouvoir législatif du président de la République syrien a diminué sensiblement le rôle du Conseil d’État pour contrôler la légalité de certains actes du pouvoir exécutif. On relèvera que le Conseil d’État égyptien est clair sur cette question : selon lui, « Il est incontestable que le recours en annulation des décrets législatifs pris par l’exécutif dans les intervalles de deux législatures, en vertu de l’article 41 de la Constitution de 1923, est ouvert aux intéressés devant le Conseil d’État. »[100] Il est souhaitable que le Conseil d’État syrien adopte la même attitude que le Conseil d’État égyptien, le frère jumeau du Conseil d’État syrien, ou à défaut, que la loi soit expressément modifiée en ce sens.

Toujours dans l’objectif de renforcer l’efficacité du contrôle par le Conseil d’État, il importe de lui accorder la compétence de contrôler la constitutionnalité des actes réglementaires (en arabe : Al-lawaeh wa al-anzima). Enfin, le législateur devrait reconnaître au Conseil d’État la compétence de statuer sur la responsabilité sans faute de l’État afin d’offrir un recours effectif aux victimes d’un dommage causé par les autorités, indépendamment de la reconnaissance de la qualification fautive du comportement qui en est l’origine.

Depuis la nouvelle Constitution de 2012, le législateur bénéfice d’un délai de trois ans pour adapter la législation sur le contentieux administratif aux nouvelles dispositions constitutionnelles. À défaut de modification légale, il appartient au juge administratif syrien d’écarter l’application de telles lois inconstitutionnelles et de consacrer dans sa jurisprudence la supériorité de la Constitution syrienne.

Améliorer la procédure devant le Conseil d’État syrien

Pour pouvoir contester efficacement un acte administratif, il faut avant toute chose pouvoir l’identifier, et pouvoir prendre connaissance de ses motivations. C’est pourquoi la Belgique garantit l’accès aux documents administratifs[101] et leur motivation obligatoire[102]. Dans l’objectif de construire un État démocratique en Syrie, le législateur syrien adopterait utilement des principes similaires[103].

Ensuite, comme on l’a vu, la loi organique du Conseil d’État syrien n° 32 n’a pas déterminé les procédures devant le Conseil d’État. En l’absence de texte, les procédures civiles sont applicables devant le Conseil d’État sous réserve que de telles règles ne violent pas la nature du contentieux administratif. Une réforme essentielle de la Section juridictionnelle consisterait en l’adoption d’un règlement de procédure[104]. Ce règlement devrait poursuivre les objectifs suivants : accélérer le traitement des dossiers, faciliter l’accès au Conseil d’État syrien et simplifier les procédures devant le juge du référé administratif.

Une accélération du traitement des dossiers

À défaut de délais suffisamment définis, la procédure devant le Conseil d’État est très longue, ce qui prive d’effectivité le droit de recours ouvert aux justiciables devant cette juridiction, et d’efficacité le contrôle exercé par celle-ci sur les autorités. Les délais doivent donc être fixés par le législateur pour les différents actes de la procédure (par exemple, le délai dans lequel le commissaire d’État doit établir son rapport et le notifier aux parties[105], ou le délai dans lequel la partie requérante peut adresser au greffe un mémoire en réplique ou mémoire ampliatif).

Il ne suffit cependant pas de prévoir des délais. Encore faut-il sanctionner leur non-respect. En l’état actuel du droit, le législateur impose un délai de 30 jours dans lequel l’administration publique doit communiquer au Conseil d’État syrien le mémoire en réponse et le dossier administratif[106]. Mais il reste muet en cas d’inac-tion de cette autorité. En pratique, l’administration syrienne ne respecte donc pas ce délai. Pour obliger les parties syriennes à respecter les délais (existants ou à venir), il est souhaitable que le législateur syrien modifie les dispositions de la loi organique du Conseil d’État en insérant de nouvelles dispositions visant à obliger les parties à respecter des délais impartis.

On peut ici s’inspirer de la Belgique. Le législateur belge a adopté deux mécanismes pour obliger l’administration à respecter des délais impartis. Le premier mécanisme belge est l’astreinte : la chambre saisie peut ordonner, à la demande de l’auditorat désigné ou à la demande d’une partie ou d’office, le dépôt du dossier administratif moyennant le paiement d’une astreinte[107]. Le deuxième mécanisme belge instaure une présomption de fondement de la demande : si l’administration ne communique pas le dossier administratif dans le délai imparti, les faits allégués par le requérant sont réputés prouvés à moins que ces faits soient manifestement inexacts[108]. De même, afin d’obliger les parties à respecter des délais impartis, le législateur belge a instauré trois présomptions de désistement d’instance : en cas d’absence de demande par le requérant de poursuite de la procédure après un arrêt de rejet d’une demande de suspension[109], en d’absence de mémoire en réplique ou mémoire ampliatif dans le délai requis[110], en cas d’absence de demande de poursuite de la procédure après rapport d’auditeur concluant au rejet[111].

En adoptant des mécanismes similaires (astreinte, présomption de fondement de la demande, présomption de désistement), le traitement des dossiers devant le Conseil d’État syrien sera évidemment plus rapide et plus efficient. Outre l’adoption d’un règlement de procédure incluant la fixation de délais et la sanction de leur non-respect, il serait utile d’adopter un régime de responsabilité de l’État pour une durée excessive de la procédure. Enfin, il est évident que l’informatisation du Conseil d’État syrien serait de nature à améliorer son fonctionnement et partant, à réduire la longueur des procédures diligentées devant lui.

Rendre la justice administrative plus accessible

Plusieurs mesures légales permettraient d’accroître l’accessibilité du Conseil d’État syrien : l’indication des voies de recours dans la notification de l’acte administratif, le prolongement de délai du recours en cas de domiciliation du requérant hors de Syrie[112], la possibilité d’introduire une requête sans avocat ; la mise en œuvre de système d’aide juridique ; la possibilité d’introduire la requête par la formalité de la voie postale[113] et l’adoption de la procédure électronique facultative comme cela a été consacré en Belgique[114].

Dégager des moyens alternatifs de règlement du contentieux de l’administration serait également de nature à améliorer l’accessibilité de la justice administrative aux administrés. Nous pensons par exemple aux médiateurs fédéraux belges[115], ou au défendeur des droits en France qui peut recevoir des réclamations de toute personne dont les droits et intérêts se trouvent mis en cause par l’administration[116]. Selon Michel Leroy, « La saisine d’un médiateur offre donc de réelles perspectives d’obtenir la solution d’un litige à des conditions qui, comparées aux recours juridictionnels, sont plus économiques, plus rapides et moins préjudiciables à l’entente entre les parties. »[117]

Simplifier le référé administratif

À défaut d’une procédure sui generis, l’application des principes de la procédure civile au référé administratif aboutit à un retard du traitement des affaires et donc à l’inefficacité de la procédure.

Pour réformer la procédure devant le juge de référé administratif, la Syrie peut utilement s’inspirer de la Belgique[118] en consacrant les éléments suivants : admettre la demande en suspension à l’égard de tout acte faisant l’objet d’une requête en annulation[119], définir légalement les conditions de recevabilité de la demande en suspension telles que l’existence de moyens d’annulation sérieux et une urgence incompatible avec le traitement de l’affaire en annulation[120], prévoir des délais de procédure abrégés pour le dépôt du rapport par le commissaire d’État et pour le prononcé de l’arrêt[121] et, enfin, organiser la possibilité d’introduire une requête en extrême urgence pour les cas d’abus d’autorité et les excès de pouvoir les plus graves[122].

Renforcer les moyens d’exécution des arrêts du Conseil d’État

La grande faiblesse du Conseil d’État syrien réside dans le fait qu’il n’a pas les moyens de contraindre directement l’administration à respecter ses décisions d’annulation. Comme on l’a vu, en l’état actuel du droit syrien, seules des nouvelles actions juridictionnelles permettent de lutter contre l’inertie administrative (le recours en annulation contre la décision d’inexécution ou la mise en cause de la responsabilité pénale de l’agent public). En pratique, ces moyens sont insuffisants pour contraindre l’administration à exécuter les décisions du Conseil d’État syrien. Pour résoudre ce problème, certains auteurs syriens proposent la création d’une section au sein du Conseil d’État chargée de l’exécution des arrêts du Conseil d’État, l’imposition d’un délai d’exécution dans les arrêts du Conseil d’État et la mise en œuvre effective de la responsabilité pénale et civile de l’agent responsable de l’inexécution des décisions de la justice[123].

En s’inspirant du mécanisme d’exécution des arrêts des Conseils d’État belge et français, il est nécessaire que le Conseil d’État syrien puisse, dans ses arrêts, fixer un délai d’exécution et préciser les mesures à prendre pour remédier à l’illégalité[124]. Un pouvoir d’injonction et d’astreinte devrait lui être reconnu pour contraindre l’autorité à exécuter les arrêts du Conseil d’État (modification de l’article 65 de la loi organique sur le Conseil d’État)[125]. De même, un pouvoir de substitution pourrait lui être confié dans le cas où la nouvelle décision à prendre résulte d’une compétence liée de l’administration[126]. Enfin, une demande d’exécution des arrêts du Conseil d’État syrien devrait être recevable sans le recours à un avocat[127]. Garantir l’exécution des arrêts du Conseil d’État syrien est une réforme capitale car le rétablissement de la légalité ou l’effectivité de l’annulation prononcée par le juge administratif est un enjeu primordial dans un État de droit[128].

Conclusion

Pour avoir un Conseil d’État syrien moderne et efficace, une réforme ambitieuse de sa section contentieuse s’impose. Cette réforme vise à étendre ses compétences, la rendre plus accessible aux administrés, accélérer le traitement des dossiers et garantir l’exécution complète de ses arrêts. Seule une telle réforme permettrait de rendre effectif le contrôle juridictionnel des actes administratifs syriens, et d’offrir aux administrés les moyens juridiques de lutter contre les abus et excès des autorités administratives dans la Syrie de demain.


  1. A. Bacci, "The System of Justice in Syria: Current Organization and Future Challenges", mis en ligne le 31 mars 2010 ; URL : https://www.alessandrobacci.com/2010/03/the-system-of-justice-in-syria-current.html (consulté le 24 octobre 2019).
  2. The United Nations Development Program (UNDP), Modernization of the Justice in Syria, 2006, disponible en ligne ; URL : https://info.undp.org/docs/pdc/Documents/SYR/00045719_Justice%20PD.pdf (consulté le 24 octobre 2019).
  3. Instrument européen de voisinage et de partenariat : République arabe syrienne, Programme indicatif national 2007-2010, disponible en ligne ; URL : http://library.euneighbours.eu/sites/default/files/enpi_csp_nip_syria_fr.pdf (consulté le 24 octobre 2019). En mai 2011, cette coopération avec l’Union européenne a été gelée en raison de la répression exercée par le régime syrien contre les civils.
  4. Ses fonctions ont été exercées entre mars 2013 et décembre 2015.
  5. Déclaration de l’ancien président du Conseil d’État, 20 avril 2015, média DP-News.
  6. Article 8 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  7. Article 8 de la loi n° 55 ; loi n° 1 de 1993 ; article 8 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  8. Article 8 de la loi n° 32 de 2019 organique du Conseil d’État syrien.
  9. Articles 143 et 160 de la loi organique n° 50 de 2004 des agents publics ; article 8 de la loi organique n° 32 du Conseil d’État syrien.
  10. L’article 8 de la loi n° 32 de 2019 dispose : "H : les recours formés par toute personne intéressée contre les décisions définitives portant nomination ou octroyant des augmentations ; […] T : les recours formés par les fonctionnaires en annulation de décisions ordonnant leur mise à la retraite ou en disponibilité ou leur révocation autrement que par la voie disciplinaire".
  11. L’alinéa Z de l’article 8 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien autorise "les recours formés par les personnes concernées contre des actes administratifs définitifs".
  12. S. Dalla, Recours pour excès de pouvoir et limite quant à la protection des administrés, Étude comparée du droit du contentieux au Moyen-Orient (Syrie-Égypte) et en France, Thèse de doctorat, Université de Nantes, 1997, p. 65.
  13. Ibidem, p. 69.
  14. Affaire n° 1613 de 1989, R.30 relatif à un acte de l’ordre des ingénieurs.
  15. Affaire n° 454 de 1992, R.38 relatif à un acte de l’Union nationale des femmes.
  16. M.-Y. Al-Hussain, M. Nouh, Le Droit administratif, Damas, Presses de l’Université de Damas, 2010-2011, p. 145 et S. Dalla, Recours pour excès de pouvoir et limite quant à la protection des administrés, op. cit. , p. 75.
  17. Article 21 de la nouvelle loi organique de 2019 du Conseil d’État syrien qui remplace l’article 22 de l’ancienne loi du Conseil d’État.
  18. Cet article a fixé le délai de recours pour excès de pouvoir à 60 jours à partir de la publication des actes ou de leur notification.
  19. Sur le contrôle constitutionnel en Syrie voyez H. al-Bahri, La Justice constitutionnelle : une étude comparée, Damas, Université de Damas, 2017.
  20. Les membres de la Haute Cour constitutionnelle syrienne sont nommés par le président de la République. Elle n’a jamais exercé sa compétence pour contrôler la constitutionnalité des lois depuis sa création en 1973 pour des raisons politiques et législatives.
  21. Voyez la composition du Parlement syrien sur son site internet (en arabe) ; URL : http://www.parliament.gov.sy/arabic/index.php?node=212 (consulté la dernière fois le 19 mars 2022).
  22. Selon l’article 113 de la Constitution syrienne de 2012, ces lois ainsi promulguées doivent être soumises à l’Assemblée du peuple dans les quinze jours de sa première séance. L’Assemblée du peuple a le droit d’abroger ces législations ou de les amender à la majorité des deux tiers des membres présents à la séance, et à condition que cette majorité ne soit pas inférieure à la majorité absolue des membres de l’Assemblée. Cette abrogation n’a pas d’effet rétroactif.
  23. A. Talbeh, Les Principes du droit administratif, tome 2, Damas, Presses universitaires de Damas, 1999, p. 200 et N. Talbeh, Les Actes administratifs immunisés de recours, Thèse de doctorat, Université de Damas, 2010, p. 451.
  24. T. Nahass, La Récente Évolution de la jurisprudence administrative concernant la recevabilité du recours d’annulation. Étude comparée entre la Syrie, l’Égypte et la France, Thèse de doctorat, Université du Caire, 2016, p. 261.
  25. Article 28 alinéa 4 de la Constitution syrienne de 1973 ; article 51 alinéa 3 de la nouvelle Constitution syrienne de 2012.
  26. Article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, conclu à New York le 16 décembre 1966 dispose : "1. Tous sont égaux devant les tribunaux et les cours de justice. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi".
  27. S. Dalla, Recours pour excès de pouvoir et limite quant à la protection des administrés, op. cit. , p. 60.
  28. Elle a été modifiée par le décret-loi n° 185 du 13 août 1970 qui, à son tour, interdit le recours en annulation. Voyez sur ce point, C.E.S., affaire n° 214 de 1986, Rec., p. 71.
  29. Le Conseil d’État se déclare incompétent pour reconnaître ces décisions et renvoie les intéressés devant les tribunaux judiciaires pour leur demande en indemnisation. Dans un recours fondé sur l’inconstitutionnalité de la loi précédente, le Conseil d’État syrien a déclaré qu’il n’était pas compétent pour statuer sur la constitutionnalité des lois (affaire n° 6 de 1975, Rec. , p. 50).
  30. Le Conseil d’État déclare irrecevables les recours contre ces décrets, sauf si lesdits décrets ont été entachés d’une illégalité grave : dans ce cas, il constate seulement leur inexistence. Voyez à ce sujet, C.E.S, affaire n° 1066 de 1991, Rec. , p. 59 ; C.E.S., affaire n° 268 de 1992, Rec. , p. 45.
  31. Selon l’article 40 de la loi concernant les impôts sur le revenu n° 24 de 2003, "Le recours éventuel contre les décisions de la commission de révision doit être introduit devant la juridiction compétente et pendant les 30 jours de leur notification. Les recours sont recevables dans les deux cas : 1) le recours contre la base légale de l’imposition (imposable ou non imposable) ; 2) au cas où la décision de la Commission de révision contient une augmentation ou une diminution de 25 % de taux d’impôt déterminé par l’avis des Commissions d’imposition ou par l’avis des Commissions du Centre financier."
  32. A. Talbeh, Les Principes du droit administratif, op. cit. , p. 251 et M. Al-Hussain, M. Nouh, Le Droit administratif, op. cit. , p. 181.
  33. Décision de la Cour administrative suprême n° 3 de 1960, Les principes généraux entre 1960-1964, principe n° 225, p. 307. Il est nécessaire de préciser que la jurisprudence du Conseil d’État syrien n’est pas accessible car non publiée. Le Conseil d’État publie certes de brefs livrets en format papier qui contiennent certains des principes généraux dégagés de ses arrêts, mais sans y reproduire les arrêts dans leur intégralité.
  34. C.E.S., affaire n° 60 de 1988, Rec., p. 182.
  35. C.E.S., affaire n° 1496 de 1991, Rec., p. 312.
  36. C.E.S., affaire n° 26 de 1966.
  37. C.E.S., affaire n° 26 de 1966.
  38. Arrêt de la Cour administrative suprême n° 209 de 1995, Les principes généraux de 1995, principe n° 29, p. 127 ; cité par T. Nahass, La Récente Évolution de la jurisprudence administrative concernant la recevabilité du recours d’annulation. Étude comparée entre la Syrie, l’Égypte et la France, op. cit., p. 339. Voyez aussi N. Talbeh, Les Actes administratifs immunisés de recours, op. cit. , p. 282 ; O. Saltoun, La Suspension de l’exécution des actes administratifs - Étude comparée, Thèse de doctorat, Université de Damas, 2010, p. 130 ; S. Dalla, Recours pour excès de pouvoir et limite quant à la protection des administrés, op. cit., p. 59.
  39. Article 28 alinéa 4 de la Constitution syrienne de 1973.
  40. Décision du tribunal administratif de Damas n° 115 du 24/06/2013, affaire n° 139, non publiée ; citée par T. Nahass, La Récente Évolution de la jurisprudence administrative concernant la recevabilité du recours d’annulation. Étude comparée entre la Syrie, l’Égypte et la France, op. cit. , p. 343.
  41. Décision de la Cour du contentieux administratif n° 1/151 du 22/05/2015, affaire n° 1/2177 de 2015, non publié.
  42. Article 9 de la loi n° 55 de 1959 portant sur l’organisation du Conseil d’État syrien.
  43. M. Al-Halak, La Spécialité du recours devant la juridiction administrative. Étude comparée, Thèse de doctorat, Université de Damas, 2011, p. 200.
  44. M.-Y. Al-Hussain, M. Nouh, Le Droit administratif, op. cit., p. 256.
  45. Article 22 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  46. Les procédures de référé devant le Conseil d’État syrien ne sont pas organisées ni par la nouvelle loi n° 32 de 2019 ni par le règlement interne.
  47. O. Saltoun, La Suspension de l’exécution des décisions administratives. Étude comparée, op. cit. , p. 341.
  48. Article 22 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  49. M. Al-Halak, La Spécialité du recours devant la juridiction administrative. Étude comparée, op. cit. , p. 261. Le juge administratif syrien recourt également à des experts pour apprécier la légalité des actes administratifs.
  50. O. Saltoun, La Suspension de l’exécution des décisions administratives. Étude comparée, op. cit. , p. 176.
  51. M. Al-Halak, La Spécialité du recours devant la juridiction administrative. Étude comparée, op. cit. , p. 261.
  52. Ibidem, p. 388.
  53. Ibidem, p. 161.
  54. Pour des exemples concrets, voyez idem.
  55. Déclaration de Mohamad Al-Hussein, ancien président du Conseil d’État, DP-News, 20 avril 2015.
  56. Articles 19 à 40 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  57. Z. Rousslan, Les Procédures du contentieux d’annulation devant le Conseil d’État syrien, Thèse de doctorat, Université d’Alep, 2011, p. 64.
  58. Article 19 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  59. Article 23 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  60. Article 24 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  61. Article 23 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  62. Article 21 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  63. Article 19 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  64. La requête doit absolument être signée par un avocat enregistré devant le Conseil d’État.
  65. Article 7 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  66. Sur le rôle du Commissariat d’État, voyez R. Ayoub, Le Commissariat d’État et son rôle dans la juridiction administrative syrienne, recherche présentée pour obtenir le titre d’avocat, Barreau de Damas, 2011.
  67. Article 29 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  68. Article 29 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  69. Article 29 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  70. Article 31 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  71. Z. Rousslan, Les Procédures du contentieux d’annulation devant le Conseil d’État syrien, op. cit., p. 228.
  72. M. Al-Halak, La Spécialité du recours devant la juridiction administrative. Étude comparée, op. cit. , p. 202.
  73. Voyez par exemple la décision de la Cour du Contentieux administratif n° 4/1267 de 2006 citée par Z. Rousslan, Les Procédures du contentieux d’annulation devant le Conseil d’État syrien, op. cit. , p. 465.
  74. S. Dalla, Recours pour excès de pouvoir et limite quant à la protection des administrés, op. cit. , p. 377.
  75. Alinéa 2 de l’article 65 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  76. Alinéa 2 de l’article 65 de la loi organique n° 32 de 2019 du Conseil d’État syrien.
  77. Loi des procédures devant la juridiction civile syrienne n° 1 du 3 janvier 2016.
  78. S. Dalla, Recours pour excès de pouvoir et limite quant à la protection des administrés, op. cit. , p. 379 et Z. Rousslan, Les Procédures du contentieux d’annulation devant le Conseil d’État syrien, op. cit. , p. 487.
  79. S. Dalla, Recours pour excès de pouvoir et limite quant à la protection des administrés, op. cit. , p. 379.
  80. Z. Rousslan, Les Procédures du contentieux d’annulation devant le Conseil d’État syrien, op. cit. , p. 489.
  81. Décision de la Cour administrative suprême n° 75 de 1990, Les principes généraux entre 1965-1990.
  82. Décision de la Cour administrative suprême n° 6 de 1979 citée par M. Almhayni, Les Principes du contentieux administratif, Tome 1, Al-Nouri, 2004, p. 492.
  83. La Constitution syrienne de 1973 ne contenait pas cette disposition.
  84. Le Code pénal syrien dispose dans son article 361 que "Tout agent public qui n’applique pas les lois ou les décisions juridictionnelles, peut être sanctionné par un emprisonnement de 3 mois à 2 ans."
  85. S. Dalla, Recours pour excès de pouvoir et limite quant à la protection des administrés, op. cit. , p. 387.
  86. Z. Rousslan, Les Procédures du contentieux d’annulation devant le Conseil d’État syrien, op. cit. , p. 496.
  87. L’autorité administrative se définit comme "toute institution créée ou agréée par les pouvoirs publics, qui est chargée d’un service public et ne fait pas partie du pouvoir judiciaire ou législatif, dans la mesure où son fonctionnement est déterminé et contrôlé par ces pouvoirs publics et où elle peut prendre des décisions obligatoires à l’égard des tiers" ; P. Goffaux, Dictionnaire élémentaire de droit administratif, Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 34.
  88. L’article 14, § 3 dispose : "Lorsqu’une autorité administrative est tenue de statuer et qu’à l’expiration d’un délai de quatre mois prenant cours à la mise en demeure de statuer qui lui est notifiée par un intéressé, il n’est pas intervenu de décision, le silence de l’autorité est réputé constituer une décision de rejet susceptible de recours. Cette disposition ne préjudicie pas aux dispositions spéciales qui établissent un délai différent ou qui attachent des effets différents au silence de l’autorité administrative."
  89. M. Pâques, Principes de contentieux administratif, op. cit. , p. 27 et M. Delnoy, A. Pirson, "L’extension de la compétence ratione materiae du Conseil d’État et la modification du point de départ du délai de recours", Administration publique, 2016/3, p. 235.
  90. Article L.331-1 de Code de justice administrative.
  91. Le Conseil d’État se prononce sur les recours dirigés contre les ordonnances du président de la République, les décrets, le recrutement et la discipline des agents publics nommés par décret du président de la République en vertu de l’article 13 de la Constitution française (articles L.311-2, 311.3, 4, 6, 7, 8, 10, 11, 12 et R.311-1 du Code de Justice administrative). Sur ce sujet, voyez R. Chapus, Droit du contentieux administratif, 12e éd., Paris, Montchrestien, 2006, p. 281 et P. Delvolvé, v° "Conseil d’État" in Répertoire du contentieux administratif, 2012, mise à jour 2015.
  92. Décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 portant réforme du contentieux administratif. Sur ce sujet, voyez A. de Laubadère, "La réforme du contentieux administratif", L’Actualité juridique. Droit administratif, 1953, p. 173 et 1954, p. 13 ; M. Gazier, "La réforme du contentieux administratif", J.C.P. , 1952, I, p. 1134.
  93. L’article L.311-1 dispose que "Les tribunaux administratifs sont, en premier ressort, juge de droit commun du contentieux administratif, sous réserve des compétences que l’objet du litige ou l’intérêt d’une bonne administration de la justice conduisent à attribuer à une autre juridiction administrative."
  94. R. Rouquette, Petit traité du procès administratif, 5e éd., Paris, Dalloz, 2012, p. 23.
  95. Loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif.
  96. Article 113 de la Constitution syrienne de 2012.
  97. Décret-loi organique n° 51 du 21 décembre 1962 sur l’état d’urgence en Syrie.
  98. Le Président syrien a levé l’état d’urgence par le décret n° 161 du 22 avril 2011 et a supprimé la Cour de sécurité de l’État par le décret n° 53 du 22 avril 2011. Sur ce sujet, voyez Commission syrienne des droits de l’homme, Rapport sur la violation des droits de l’Homme sous la Constitution syrienne de 1973, 7 juillet 2003, disponible en ligne ; URL : http://www.shrc.org/?p=6775 (consulté le 15 janvier 2020).
  99. Lors d’une conférence organisée par le syndicat des journalistes à Tartous en Syrie avant l’adoption de la nouvelle Constitution, Sam Dalla, membre de la Commission nationale de la rédaction de la Constitution syrienne de 2012, a déclaré que "la majorité des lois et des règlements syriens en vigueur (90 %) ne se conforment pas avec le projet de la Constitution de 2012" et que "le pouvoir judiciaire n’est pas en bonne situation et non indépendant". Cette déclaration a été reprise sur le site internet du média Syria Steps le 25 février 2012 ; URL : http://www.syriasteps.com/?d=127&id=83091 (consulté le 15 janvier 2020).
  100. C.E.E., 29 novembre 1955, Rec. , p. 171. Cité également par A. B. Abdulla, Le ontrôle de l’administration dans certains pays arabes du Proche-Orient, Thèse de doctorat, Université de Bordeaux I, 1975, p. 104.
  101. La loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration ( Moniteur belge, 30 juin 1994) consacre le droit pour tout administré de consulter les documents administratifs qui le concernent, d’en recevoir une copie et d’en rectifier les informations qui s’avèrent inexactes ou incomplètes.
  102. Loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs ; Moniteur belge, 12 septembre 1991.
  103. La motivation de décisions administratives individuelles n’est pas obligatoire en Syrie.
  104. La procédure devant le Conseil d’État belge est régie par les lois coordonnées du 12 janvier 1973 sur le Conseil d’État et l’arrêté du régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du Contentieux administratif du Conseil d’État belge. La version coordonnée de ces textes est disponible en ligne sur le site de cette institution.
  105. En Belgique, l’auditeur doit établir son rapport dans un délai précis à partir de la réception du dossier complet (article 24 des lois coordonnées sur le Conseil d’État).
  106. L’article 23 de la loi organique du Conseil d’État syrien stipule que "l’administration doit adresser au greffe le mémoire en réponse et le dossier administratif dans un délai de 30 jours prenant cours à la réception de la notification de requête".
  107. Article 21 alinéa 5 des lois coordonnées sur le Conseil d’État.
  108. Article 21 alinéa 3 des lois coordonnées sur le Conseil d’État.
  109. Article 17 § 4 des lois coordonnées sur le Conseil d’État.
  110. Article 21 alinéa 2 des lois coordonnées sur le Conseil d’État.
  111. Article 21 alinéa 6 des lois coordonnées sur le Conseil d’État.
  112. En Belgique, le délai de recours en annulation devant le Conseil d’État belge est fixé à soixante jours. Ce délai est porté à nonante jours pour les personnes qui demeurent dans un pays non limitrophe de la Belgique, et à cent cinquante jours pour celles qui demeurent hors Europe (article 89 de l’arrêté du Régent du 23 août 1948).
  113. En Belgique, la requête d’annulation doit être adressée au Conseil d’État par pli recommandé à la poste (article 84 de l’arrêté du Régent du 23 août 1948).
  114. Afin de faciliter les procédures devant le Conseil d’État belge, le législateur belge, dès la réforme de 2014, a institué des procédures électroniques facultatives pour les parties. Le site internet du Conseil d’État belge contient un "manuel de l’utilisateur" pour expliquer les modalités d’utilisation des procédures électroniques ; URL : http://eproadmin.raadvst-consetat.be (consulté le 15 janvier 2020).
  115. En Belgique, la loi du 22 mars 1995 ( Moniteur belge, 7 avril 1995) a institué des médiateurs fédéraux qui sont des autorités indépendantes visant à rechercher une conciliation en suite de réclamations introduites par des particuliers quant au fonctionnement de l’un ou l’autre service public. Voyez le site officiel du médiateur fédéral belge ; URL : http://www.mediateurfederal.be/fr (consulté le 15 janvier 2020).
  116. L’article 71-1 de la Constitution français dispose que "le Défendeur des droits veille au respect des droits et libertés". Sur ce sujet, voyez la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défendeur des droits en France. Journal officiel, n° 0075, 30 mars 2011, p. 5487. Voyez le site officiel du Défendeur des droits ; URL : https://www.defenseurdesdroits.fr/ (consulté le 15 janvier 2020).
  117. M. Leroy, Contentieux administratif, 5e éd., Bruxelles, Anthemis, 2011, p. 29.
  118. La réforme de 2014 en Belgique a simplifié les conditions et les procédures du contentieux de suspension devant le Conseil d’État belge. La procédure en référé devant le Conseil d’État belge est régie par un arrêté royal du 5 décembre 1991. Sur la réforme du référé administratif belge, voyez B. Lombaert, M. Thomas, "La réforme du référé administratif : une réforme qualitative ?", Administration publique, 2016/3, p. 304.
  119. La demande de suspension devant le Conseil d’État belge est en principe admise jusqu’au dépôt du rapport de l’auditeur. Après ce dépôt, elle doit faire l’objet d’une demande motivée sur laquelle le président se prononcera par ordonnance (Article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d’État).
  120. Article 17 § 1er des lois coordonnées sur le Conseil d’État. Avant la réforme de 2014, la loi belge imposait la démonstration d’un risque de préjudice grave difficilement réparable.
  121. En Belgique, ce délai est de quarante-cinq jours à partir du dépôt de la demande (article 17 § 5 des lois coordonnées sur le Conseil d’État).
  122. En Belgique, en cas d’extrême urgence, une requête en suspension peut être déposée avant le dépôt de la requête en annulation (article 17 § 4 des lois coordonnées sur le Conseil d’État).
  123. Z. Rousslan, Les procédures du contentieux d’annulation devant le Conseil d’État syrien, op. cit. , p. 532.
  124. Article 35/1 des lois coordonnées sur le Conseil d’État belge.
  125. L’article 36 des lois coordonnées sur le Conseil d’État belge prévoit la possibilité d’assortir l’exécution d’un arrêt d’une astreinte. En France, la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 a permis de contraindre l’administration à exécuter une décision rendue par la juridiction administrative en donnant au Conseil d’État la possibilité de prononcer une astreinte à l’encontre de l’administration.
  126. Une réforme inspirée de l’article 36 § 1er alinéa 2 des lois coordonnées du Conseil d’État belge.
  127. Une réforme inspirée de l’article R.911-4 du Code de Justice administrative français.
  128. P. Delvolvé, "Exécution des décisions de justice contre l’administration", Étude et documents du Conseil d’État, n° 35, 1983-1984, p. 137.

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