7 La Haute Cour constitutionnelle syrienne : une institution en devenir

Salim Sendiane

Introduction

Traditionnellement et exception faite des États ayant repris à leur compte la doctrine constitutionnelle britannique, l’existence d’une justice constitutionnelle permettant un contrôle de constitutionnalité des normes inférieures, en ce compris des lois, est présentée comme l’un des critères constitutifs de tout État de droit[1]

En effet, par le contrôle qu’elle exerce, la justice constitutionnelle apparaît être la principale garantie contre un usage arbitraire du pouvoir qui foulerait au pied les droits humains des citoyens ou qui méconnaîtrait les principes déduits de la séparation des pouvoirs. S’il existe en Syrie une Haute Cour constitutionnelle depuis l’adoption de la Constitution de 1973, l’existence d’un juge constitutionnel est plus ancienne.

En effet, l’Acte constitutionnel syrien de 1920 adopté après la proclamation unilatérale de l’indépendance de la Syrie prévoyait l’existence d’une cour suprême, une juridiction maintenue tout au long du mandat exercé par l’État français sur le territoire syrien[2]. Cette juridiction ne contrôlait cependant pas la constitutionnalité des lois, sa mission était plus spécifique et circonscrite : juger les sénateurs, députés, ministres et autres hauts fonctionnaires. La Constitution de 1930 promulguée par le haut-commissaire français lui a également confié la compétence de juger, le cas échéant, le président de la République en cas de violation de la constitution ou de haute trahison[3]. Le mandat français ayant définitivement pris fin en 1946, la Syrie indépendante s’est dotée d’une première Constitution le 5 novembre 1950 qui a substantiellement modifié les compétences de cette cour suprême désormais chargée, en vertu de l’article 122 de cette Constitution, de contrôler non seulement la constitutionnalité des lois mais également la compatibilité des actes administratifs et réglementaires avec toute norme leur étant supérieure. Simultanément juge constitutionnel et juge administratif, cette cour suprême était composée de sept membres élus, pour cinq ans renouvelables, par le Parlement à partir d’une liste de quatorze candidats choisis par le président de la République (article 116 de la Constitution de 1950)[4].

Le 13 mars 1973 était adoptée par référendum la nouvelle Constitution syrienne. Celle-ci distingue, sous le chapitre III de son titre II, intitulé « Pouvoir judiciaire », le Conseil d’État, mentionné à l’article 138 du texte comme exerçant la « justice administrative », de la nouvelle Haute Cour constitutionnelle faisant l’objet des articles 139 à 148. On notera immédiatement que si l’article 138 prévoyant l’existence du Conseil d’État est intégré à la partie I de ce chapitre III, partie intitulée « Les magistrats des tribunaux et le ministère public », la Haute Cour constitutionnelle fait elle l’objet d’une partie spécifique, la partie II ayant pour titre « La Haute Cour constitutionnelle ». S’agissant de sa principale compétence, le pouvoir constituant syrien lui a confié l’exclusivité du contrôle de constitutionnalité des lois. En effet, si selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation syrienne[5], les juridictions de l’ordre judiciaire ont la possibilité d’écarter, à la demande d’une partie et pour les besoins d’un litige circonscrit, une norme législative estimée contraire à la Constitution, elles n’ont évidemment pas le pouvoir de suspendre ou annuler erga omnes une telle norme.

Lors de l’adoption de la Constitution de 2012, si le Conseil d’État demeure intégré au pouvoir judiciaire (d’ailleurs, l’article 138 de 1974 fut reproduit mot pour mot à l’article 139), la Haute Cour constitutionnelle fait désormais, elle, l’objet d’un titre spécifique, le titre IV, qui lui est tout entier consacré. Ce changement charrie-t-il une révision plus profonde des missions de la Haute Cour constitutionnelle ? Son indépendance a-t-elle été renforcée à la suite de l’adoption de la nouvelle constitution syrienne ? Telles seront les questions fil rouge de ce chapitre qui abordera d’abord la composition de cette juridiction constitutionnelle (I), pour ensuite passer en revue ses compétences (II). À l’instar de la démarche comparative qui a guidé les analyses présentées dans les chapitres précédents, nous tâcherons de mettre en évidence la plus-value du nouveau texte constitutionnel, complété par des législations spécifiques à cette juridiction, par rapport à la Constitution de 1973. Sur ce point, nous pourrons noter un réel progrès opéré par le nouveau texte constitutionnel. Les possibilités de saisine de la Cour ont été étendues de même que les modalités de contrôle de constitutionnalité des normes législatives et réglementaires. Aussi, un mécanisme préjudiciel a été prévu et son activation pourrait renforcer la cohérence de la hiérarchie des normes syriennes. Enfin, son indépendance a enfin été formellement reconnue. Si aujourd’hui, la Haute Cour constitutionnelle pêche toujours en raison de la politisation qui caractérise sa composition, à tout le moins, en théorie, un réel cadre constitutionnel existe et pourrait lui permettre d’exercer réellement ses missions. En pratique cependant, sa contribution à l’évolution de la République de Syrie en un véritable État de droit apparaît encore incertaine. Aussi, sur la base des critiques recensées, certaines propositions seront émises en vue d’imaginer le cadre juridique d’une nouvelle juridiction constitutionnelle susceptible de protéger l’État de droit et le système démocratique dont elle devrait être la pierre angulaire.

I. La composition de la Cour

Si, dans le texte de 1973, la Haute Cour constitutionnelle se situe au sein du pouvoir judiciaire, elle ne fait cependant pas partie des juridictions judiciaires (au sens strict), administratives ou militaires. Elle ne relève donc pas du Conseil supérieur de la magistrature qui, en vertu de l’article 131, garantit aux côtés du président de la République qui le préside, l’indépendance du pouvoir judiciaire. Elle possède un monopole en matière de contrôle de constitutionnalité des normes législatives ainsi que d’autres compétences non juridictionnelles que la constitution lui confie. Toutefois, ni les dispositions constitutionnelles, ni la promulgation de la loi n° 19 de 1973 relative à la Cour constitutionnelle n’ont permis de créer un cadre structurel ou opérationnel permettant le bon fonctionnement de la Cour.

La Haute Cour constitutionnelle est formée de cinq membres, dont un est président. Ils sont nommés par décret du président de la République (article 139). Leur mandat est de quatre ans. Il est renouvelable (article 141). Les critères d’éligibilité pour la nomination à la Haute Cour constitutionnelle sont définis par l’article 2 de la loi n° 19 de 1973. Il faut 1. être un citoyen syrien qui est en mesure d’occuper une fonction publique, 2. avoir quarante ans mais moins de 65 ans au moment de sa nomination, 3. être titulaire d’une licence en droit d’une université syrienne ou son équivalent, 4. être juge et/ou avocat et/ou avoir enseigné le droit à l’université pendant quinze ans, et/ou avoir exercé une fonction publique pendant vingt ans après l’obtention de son diplôme en droit. Or, si le critère de l’expérience est généralement un gage de qualité, l’expérience acquise dans la fonction publique ne garantit pas la maîtrise des compétences techniques indispensables à l’exercice des fonctions de juge constitutionnel.

Ainsi, tout candidat à cette fonction doit jouir de ses droits civils et politiques et ne pas avoir fait l’objet de sanction ou de condamnation. Il est aussi interdit de nommer au poste de président de la Cour et au poste de membre de la Cour des personnes ayant des liens de parenté ou de mariage allant jusqu’au quatrième degré (article 3 de la loi n° 19). Le fait d’être membre de la Haute Cour constitutionnelle est incompatible avec un mandat ministériel ou parlementaire (article 140 de la Constitution de 1973). L’article 4 de la loi n° 19 a également prévu l’incompatibilité entre un mandat à la Cour et toute autre activité à l’exception de l’enseignement universitaire.

Aucun chapitre, ni aucun titre de la Constitution de 1973 ou de la loi n° 19 qui fixe le fonctionnement de la Cour n’a été consacré aux dispositions relatives à l’indépendance des membres de la Cour constitutionnelle. Toutefois, l’indépendance des membres de la Cour peut être assurée d’abord par le fait qu’ils ne peuvent être révoqués que conformément à la loi. Or, selon la loi, la révocation est uniquement possible en cas de perte de capacité ou pour atteinte à la bonne réputation de la Cour. La procédure prévue implique que cette révocation soit opérée par un décret du président de la République adopté à la suite d’une décision de l’assemblée plénière de la Haute Cour constitutionnelle (article 9 de la loi n° 19 de 1973). La loi ne précise cependant pas ce qui se passerait si le président de la République refusait de révoquer un membre à l’égard duquel l’assemblée plénière de la Cour aurait constaté une perte de capacité ou une atteinte à la bonne réputation de la Cour.

Avant d’entrer en fonction, le président et les membres de la Haute Cour constitutionnelle, en présence du président de l’Assemblée populaire, prêtent devant le président de la République le serment suivant : « Je jure par Dieu Tout-puissant de respecter la Constitution du pays et ses lois, et de remplir mes fonctions avec impartialité et loyauté. » (article 143 de la Constitution de 1973)

Avant de plus amples commentaires, notons que le nombre de cinq juges apparaît relativement faible surtout lorsqu’on le compare avec le nombre moyen (généralement supérieur à dix) de membres de juridictions constitutionnelles. En principe, la Cour ne peut statuer que si l’ensemble de ses membres sont présents (article 14 de la loi n° 19) même si un mécanisme de suppléance, assez curieux, est prévu. En effet, l’article 14 de la loi précitée prévoit que « si le quorum n’est pas atteint pour quelque raison que ce soit, il sera atteint par le président de la Cour de cassation et/ou le président du Conseil d’État ou les deux à la suite d’une décision du président de la Cour ».

Comme déjà indiqué en introduction de ce chapitre, la Constitution de 2012 a exfiltré les dispositions relatives à la Cour du chapitre consacré au pouvoir judiciaire pour en faire un titre spécifique au sein du texte suprême. Cette modification pourrait, à première lecture, traduire la volonté de renforcer le rôle de la Haute Cour et d’en assurer explicitement l’indépendance vis-à-vis du pouvoir judiciaire. Cette première impression semble renforcée à la lecture de l’article 140 de la nouvelle constitution qui dispose que « La Haute Cour constitutionnelle est un organe judiciaire indépendant, qui siège à Damas. » Car en effet, le constituant de 1973 n’avait pas jugé opportun de formellement établir l’indépendance de la Cour.

Autre nouveauté : le nombre de membres passe désormais à sept « au moins » toujours nommés par le président de la République (article 141) et qui ne peuvent assumer un mandat ministériel ou parlementaire simultanément à leur mandat de juge constitutionnel (article 142). Le 13 mai 2012, le président a adopté un décret législatif n° 35 qui régit la Cour alors que les conditions permettant au président d’exercer seul le pouvoir législatif[6] ne semblaient pas réunies en l’espèce et qu’en outre, si la Constitution renvoie fréquemment à « la loi » en vue de compléter les dispositions constitutionnelles consacrées à la Cour[7], ce terme devrait être strictement interprété et non viser les actes législatifs – le décret – que peut adopter le président.

Si le nombre de sept juges est un minimum constitutionnel, l’article 2 du décret législatif n° 35 de 2012 limite ce nombre à sept membres tout en prévoyant la possibilité, pour le président et toujours par décret, d’augmenter ce nombre. En d’autres termes, le président a donc le droit de nommer à tout moment de nouveaux membres, ce qui constitue d’ores et déjà un solide risque quant à l’indépendance de la Cour[8].

Le mandat de ces membres est toujours de quatre ans renouvelables (article 143 de la Constitution de 2012). Ils prêtent, en présence du président de l’assemblée populaire, devant le président de la République le serment dont le texte n’a pas changé. Par contre, les conditions à remplir en vue d’être nommé à cette Cour ont été largement revues. Pour pouvoir être candidat, il faut 1. ne pas posséder d’autre nationalité que celle de la République arabe syrienne, 2. avoir le droit d’occuper une fonction publique, 3. avoir quarante ans mais ne pas avoir dépassé l’âge de septante-deux ans au moment de la nomination, 4. être diplômé en droit, 5. avoir exercé pendant quinze ans les professions de juge et/ou d’avocat et /ou d’enseignant à la faculté de droit. En vertu de ce décret, la personne diplômée en droit ayant œuvré dans la fonction publique durant vingt ans ne peut donc plus être candidate à la Cour. Cette réforme limite ainsi, dans une certaine mesure, l’accès à la Cour aux personnes non ou moins qualifiées. Enfin, comme précédemment, les membres de la Cour ne peuvent être liés par des liens de parenté ou de mariage allant jusqu’au quatrième degré.

La présence obligatoire de l’ensemble des juges est confirmée, tout comme l’étrange possibilité de remplacer un juge absent par un membre de la Cour de cassation, du Conseil d’État ou les deux à la suite d’une décision du président de la Cour (l’article 15, b du décret n° 35 précité parle des vice-présidents, et non plus des présidents, de la Cour de cassation ou du Conseil d’État)[9]. Ce mécanisme de substitution peut, davantage qu’en 1973, sembler en contradiction avec les dispositions de la constitution, en particulier celle garantissant l’indépendance de la Cour, puisque deux personnes émanant du pouvoir judiciaire (dont ne relève plus la Cour) pourraient participer à son office et cumuler deux fonctions juridictionnelles en principe prohibées vu l’incompatibilité constitutionnelle entre un mandat à la Cour et tout autre mandat sauf dans l’enseignement universitaire. En outre, dès l’instant où les critères pour être nommé à la Cour de cassation ou au Conseil d’État ne correspondent pas à ceux prévus pour pouvoir siéger à la Cour constitutionnelle, il est tout à fait possible qu’une personne ne remplissant pas ceux-ci siège néanmoins à la Cour. On songe par exemple à la condition relative à l’absence de double nationalité qui, à notre connaissance, ne s’applique pas aux membres de la Cour de cassation ou du Conseil d’État. Enfin, ces deux membres suppléants n’ont pas prêté le serment constitutionnel prévu par l’article 145, même s’ils ont déjà prêté un autre serment dont les termes sont prévus par l’article 77 du décret législatif n° 98 de 1961 concernant le respect de la justice et des lois.

La Cour comprend une assemblée plénière composée de son président et de ses membres. Elle est compétente pour examiner les questions relatives à son statut interne et pour répartir le travail entre ses membres. Elle est convoquée à la demande du président ou de trois de ses membres. Sa session n’est valable qu’en présence de six de ses membres, dont le président, et ses décisions sont prises à la majorité des voix.

Le décret présidentiel n° 35 a été abrogé par la loi n° 7 adoptée par le Parlement le 16 avril 2014. L’adoption de cette loi constitue un progrès réel et pas seulement en vue de couper l’herbe sous le pied à la critique d’inconstitutionnalité qui pouvait frapper le décret de 2012. Tout d’abord, la Cour est dorénavant composée de onze membres, président inclus. Elle exerce ses pouvoirs en présence de son président et de la majorité de ses membres ; sont ainsi supprimés l’exigence de la présence de l’intégralité du siège et partant le système assez boiteux d’une suppléance exercée par un membre d’une autre juridiction. La loi prévoit aussi que les décisions la Cour doivent être adoptées à la majorité des membres présents (article 3). En d’autres termes, pour que la Cour puisse délibérer, il faut donc la présence de six membres au moins et, dans ce cas, l’adoption d’une décision nécessitera le vote de quatre membres. En cas d’égalité des voix lors d’un vote, la voix du président est prépondérante (article 3.d de la loi n° 7 précitée). En l’absence du président, la Cour sera présidée par le membre ayant le plus d’années d’expérience et en cas d’égalité, c’est le membre le plus âgé qui assumera cette fonction. Si ce nouveau mode de fonctionnement moins rigide est susceptible de faciliter le travail de la Cour, il ne constitue cependant pas une réelle garantie d’indépendance des membres qui y sont nommés.

Certes, comme évoqué précédemment, l’indépendance de la Cour a été formellement reconnue à l’article 140 de la nouvelle Constitution adoptée en 2012. La loi n° 7 adoptée en 2014 prévoit désormais que le pouvoir de révoquer l’un des membres de la Cour appartient à son assemblée plénière. Ainsi, l’article 52 de cette loi prévoit que « L’assemblée plénière de la Cour peut révoquer le membre de la Cour par une décision motivée dans les cas suivants : A) S’il perd une des exigences de son poste. B) Si le membre fait un acte pouvant nuire à la confiance ou à la considération, ou constituer un manquement grave à ses devoirs ou à ses obligations. » Dans le même ordre d’idées, toute démission d’un membre de la Cour devra être présentée au président de la République mais ce dernier garde le droit de refuser cette démission. Dans ce cas, le juge constitutionnel démissionnaire reste en fonction. S’il l’accepte, le président de la République nommera un remplaçant pour assurer le reste du mandat occupé par le membre démissionnaire. Cette procédure de remplacement est également prévue en cas de révocation d’un membre.

Un autre élément pouvant participer de l’indépendance réelle et non seulement formelle des membres de la Cour est la façon dont est organisée leur rémunération. Sur ce point, il est seulement prévu que cette rémunération soit équivalente à celle des juges, le président de la Cour ayant lui droit à une rémunération égale à celle perçue par un ministre.

La loi prévoit également l’interdiction, pour les membres de la Cour et durant leur mandat, d’exprimer une opinion ou d’émettre un avis sur des questions politiques ainsi que de lever le secret présidant à leurs délibérations[10]. À l’instar des juges de l’ordre judiciaire, les juges de la Cour bénéficient d’une immunité contre des poursuites pénales pour des infractions graves sauf en cas de flagrant délit. Dans ce dernier cas, le président de la Cour est immédiatement informé de ces poursuites et si celles-ci visent le président lui-même, l’assemblée plénière en est informée sans délai[11]. Enfin, en toute hypothèse, les juges constitutionnels bénéficient d’un privilège de juridiction puisqu’ils sont directement jugés par l’assemblée plénière de la Cour de cassation.

II. Les attributions de la Haute Cour constitutionnelle

Les compétences de la Cour constitutionnelle ont été définies par la Constitution de 1973 et par la loi n° 19 de 1973. Nous verrons dans quelle mesure le nouveau régime adopté en 2012 et complété par la loi n° 7 de 2014 a, sur ce point, étendu les compétences de la Cour.

Le contrôle de constitutionnalité des lois et des décrets législatifs

La Constitution 1973 ne permet pas aux individus de contester la constitutionnalité des lois. En effet, l’article 145 de ce texte réserve cette initiative au président de la République ou à un quart des membres de l’assemblée populaire. La particularité de ce système est que la demande de contrôle doit être adressée à la Cour avant la promulgation de la loi. Si cette procédure est activée, « la loi sera suspendue jusqu’à ce que la Cour se soit prononcée, dans un délai de quinze jours à partir de la date d’inscription de la demande devant elle ; si la loi a un caractère urgent, la Cour doit se prononcer dans un délai de sept jours » (article 145). En d’autres termes, dès qu’une loi est promulguée, le président et le quart des membres du parlement perdent leur droit à contester sa constitutionnalité. On notera également qu’échappent à tout contrôle de la Cour les « lois proposées par le président de la République au référendum et adoptées par le peuple » (article 148).

S’agissant des décrets législatifs adoptés par la présidence, un autre type de limite existe : « si le quart des membres de l’Assemblée populaire contestent la constitutionnalité d’un décret législatif dans un délai de quinze jours à partir du début de la session de l’Assemblée populaire, la Haute Cour constitutionnelle doit se prononcer dans un délai de quinze jours à partir de la date de l’inscription de la demande devant elle » (article 145). Ainsi, les parlementaires ne semblent disposer que d’un délai de quinze jours pour, le cas échéant, contester la validité constitutionnelle d’un décret législatif. Enfin, « si la Haute Cour constitutionnelle décide que la loi ou le décret est contraire à la Constitution, les dispositions contraires au texte de la Constitution sont considérées comme nulles avec effet rétroactif et leurs effets sont annulés » (article 145).

Le seuil fixé à un quart des membres de l’assemblée populaire n’est évidemment pas anodin. En pratique, il empêche que les rares députés indépendants du régime au pouvoir puissent faire usage du droit de contester la constitutionnalité d’une norme législative puisque, comme nous l’avons vu précédemment, les représentants du parti ba’as et de ses organisations satellites occupent généralement plus de trois quarts des sièges parlementaires. Et d’ailleurs, la saisine de la Cour constitutionnelle syrienne par des parlementaires ne s’est jamais produite et l’on peut estimer que ce système de contrôle de constitutionnalité des lois, tel que prévu par la Constitution de 1973, est en réalité un trompe-l’œil[12].

Les modalités par lesquelles la Cour peut être saisie d’une contestation de la constitutionnalité d’une loi ou d’un décret législatif ont été modifiées à l’occasion de l’adoption de la Constitution de 2012. Tout d’abord, et c’est décisif, en vertu de l’article 147.1 a) et b), le seuil de parlementaires permettant la saisine de la Cour est désormais d’un cinquième et non plus d’un quart, soit cinquante députés sur deux cent cinquante. Or, depuis les élections législatives de juillet 2020, le nombre de députés relevant du Front national progressiste est de cent septante-sept et celui des députés dits indépendants est de septante-trois. En d’autres termes, la possibilité pour les députés de l’opposition de contester une loi ou un décret législatif devant la Haute Cour constitutionnelle n’est plus seulement théorique.

Ensuite, la fenêtre temporelle permettant la contestation des décrets législatifs adoptés par le président diffère : si le texte de 1973 prévoyait la possibilité de contester une telle norme endéans les quinze premiers jours de la session de l’assemblée, l’article 147.1 b) du texte de 2012 indique que le recours doit être déposé endéans les quinze jours suivant la présentation de la norme devant l’assemblée. D’apparence anodine, cette modification est susceptible de considérablement augmenter la possibilité de contrôler l’activité législative du président. En effet, en vertu de la Constitution de 1973, le président devait soumettre le fruit de son travail législatif exercé en dehors des sessions parlementaires ou en cas d’urgence lors de la première session parlementaire (article 111 de la Constitution de 1973) mais sans exiger que ces textes soient soumis endéans les quinze premiers jours de la session. En pratique, si le président soumettait ses textes après ce délai de quinze jours, ceux-ci étaient immunisés contre tout recours. Une telle manœuvre n’est aujourd’hui plus possible.

Enfin, pour rappel, sous l’empire de la Constitution de 2012, le président ne peut plus légiférer entre deux législatures. Or, il n’était pas clair que ces décrets législatifs puissent faire l’objet d’un contrôle de constitutionnalité dès l’instant où la Constitution de 1973 ne prévoyait pas leur soumission systématique pour ratification à l’assemblée populaire. Aujourd’hui, cette question ne se pose plus.

Pour le reste, la conséquence d’un constat d’inconstitutionnalité, soit l’annulation rétroactive de la norme (article 147.1 c), et l’immunisation des textes adoptés par voie référendaire (article 148) sont maintenus dans la constitution de 2012.

Le contrôle de la constitutionnalité des règlements

Une autre innovation du régime adopté en vertu de la Constitution de 2012 et fixé par la loi n° 7 de 2014 qui porte sur la possibilité de contrôler la constitutionnalité des règlements, une possibilité inexistante dans la Constitution de 1973 qui n’attribuait cette compétence ni à la Haute Cour constitutionnelle, ni au Conseil d’État. Adoptée en 2014, la loi n° 7 a attribué la compétence de contrôler la constitutionnalité des règlements à la Haute Cour constitutionnelle. Cette possibilité est importante compte tenu du peu de limites encadrant le pouvoir réglementaire du président qui n’est défini ou balisé ni par la Constitution, ni par la loi.

Un tel contrôle peut être initié par un cinquième des membres de l’assemblée populaire, un seuil rendant possible la saisine de la Cour par les députés indépendants. Les parlementaires disposent d’un délai de quinze jours à partir de la publication d’un règlement dans le journal officiel pour introduire un tel recours. La Cour doit statuer sur ce recours dans un délai de quinze jours à partir de la date de son enregistrement au greffe. La décision de la Cour sera communiquée au président de la République et au président de l’assemblée au plus tard trois jours après son adoption (article 14 de la loi n° 7). Les dispositions réglementaires jugées contraires au texte de la Constitution sont annulées et cette annulation présente un effet rétroactif qui visent également leurs éventuelles conséquences juridiques. La décision est communiquée à toutes les autorités publiques de l’État et publiée dans le journal officiel (article 15).

Le contrôle de constitutionnalité des lois en vigueur

Comme nous l’avons déjà évoqué, si le contrôle incident de la constitutionnalité des lois à l’occasion d’un litige particulier n’a pas été prévu par la Constitution de 1973, l’existence d’un tel contrôle a été reconnu, dans le chef des autorités judiciaires, par la jurisprudence de la Cour de cassation et en particulier par son arrêt n° 334 du 22 avril 1974[13]. Si une partie à un litige estime qu’une loi en cause est inconstitutionnelle et si elle parvient à convaincre le juge du bien-fondé de son analyse, alors le juge pourra non pas annuler cette loi mais bien refuser de l’appliquer au litige dont il est saisi[14].

La Constitution de 2012 a bouleversé ce système en prévoyant un mécanisme préjudiciel en bonne et due forme qui renforce le monopole dont dispose la Haute Cour en matière de contrôle de constitutionnalité des lois. Il s’agit là d’une innovation majeure portée par le nouveau texte constitutionnel. En effet, l’article 147.2 du nouveau texte prévoit que la Cour examine les recours en inconstitutionnalité de la loi dans le cas où l’une des parties, au cours de l’examen d’une affaire, soulève l’inconstitutionnalité d’une disposition législative appliquée par un tribunal dont la décision fait l’objet d’un appel. Si la juridiction saisie de cet appel estime le moyen sérieux et important, elle suspend l’affaire et la renvoie à la Haute Cour constitutionnelle. Saisie sur cette base, la Haute Cour statue sur le recours dans les trente jours de son enregistrement. Ainsi, seuls les tribunaux de deuxième instance, qu’il soit civil, pénal ou encore administratif, peuvent saisir la Haute Cour à titre préjudiciel. En outre, l’article 18 du décret n° 35 de 2012 prévoit que si la Cour décide que le texte contesté est inconstitutionnel, ce dernier est révoqué à compter de la date de la décision qui en constate l’inconstitutionnalité, sans effet rétroactif donc, et il reviendra à la juridiction de fond ayant saisi la Cour de mettre en application la décision de la Cour constitutionnelle[15].

Ainsi, contrairement aux annulations suscitées par les parlementaires, celles prononcées à titre préjudiciel ne remettent pas en cause les effets juridiques passés des normes jugées inconstitutionnelles. En outre, on notera cependant que ni la Constitution, ni le décret n° 35 n’ont prévu une publication systématique de ces arrêts rendus à titre préjudiciel, ce qui pourrait contrecarrer leur diffusion parmi les autorités politiques et judiciaires.

Le contrôle de l’élection du président de la République et des membres de l’assemblée

La Cour est désormais compétente pour contrôler l’élection du président de la République et organiser les procédures de ce contrôle. Celui-ci se déroule en amont et à la suite de l’élection du président par le peuple. En effet, l’article 85 de la Constitution prévoit que les candidats à l’élection présidentielle soumettent leur candidature à la Haute Cour constitutionnelle dans les dix jours suivant l’annonce de la date de l’élection présidentielle. La Cour est chargée d’examiner ces candidatures dans les cinq jours qui suivent la fin de la période d’enregistrement des candidatures. Après le scrutin, l’article 89 prévoit la compétence de la Cour pour examiner les recours, le cas échéant introduits par un ou plusieurs candidats à cette élection endéans les trois jours suivant la proclamation des résultats. Dans ce cas, la Cour doit rendre sa décision au plus tard sept jours après l’expiration du délai prévu pour l’introduction des recours.

Il s’agit d’une innovation importante du texte constitutionnel de 2012 puisque cette compétence n’était pas prévue par la Constitution de 1973 : seuls les recours en invalidation des membres de l’assemblée populaire relevaient de la compétence de la Haute Cour (article 144). Cette compétence relative aux recours, le cas échéant introduits en vue d’invalider l’élection des membres de l’assemblée populaire? relève toujours des missions constitutionnellement attribuées à la Haute Cour (articles 66 et 146.4 de la Constitution de 2012).

La constatation de la vacance de la présidence de la République

Autre innovation introduite par la loi n° 7 de 2014, la Haute Cour dispose de la compétence inédite de contrôler la présidence puisqu’il lui appartient de mettre fin au mandat du président si elle constate la perte de l’une des conditions requises pour exercer le mandat présidentiel. Cette procédure peut être mise en œuvre par le président du Parlement qui soumet à la Cour une motion, adoptée aux deux tiers des membres du Parlement, visant à mettre fin au mandat du président de la République par exemple en cas d’acquisition par le président de la République d’une autre nationalité ou en cas de mariage avec une femme non syrienne. La décision de mettre fin au mandat et de déclarer la présidence vacante est adoptée par la Cour à la majorité de ses membres. Dans le même ordre d’idées, la Cour constate également la vacance d’un siège parlementaire à la demande du président de l’assemblée dans le cas où un député perd l’une des conditions de recevabilité des candidatures aux élections législatives.

Les fonctions consultatives de la Haute Cour constitutionnelle

En vertu de l’article 147 de la Constitution de 1973, la Haute Cour constitutionnel e, à la demande du président de la République, donne son avis sur la constitutionnalité des projets de loi et de décret législatif et sur la légalité des projets de décret. Le droit de consulter la Haute Cour constitutionnelle n’appartient donc qu’au seul président. L’article 32 de la loi n° 19 de 1973 prévoit que la Cour constitutionnelle remet son avis dans les dix jours à compter de la date de réception de la demande du président de la République. Cette compétence consultative a été maintenue par l’article 146.2 de la Constitution de 2012. Cependant, le décret législatif n° 35 de 2012 a augmenté le délai dans lequel la Cour doit remettre son avis ; il est désormais de quinze jours. L’avis, qui doit être motivé, est donc bien consultatif et ne présente aucun caractère contraignant pour le président. La loi n° 7 a élargi les possibilités de saisine de la Cour sur ce point. En effet, celle-ci peut aujourd’hui remettre un avis consultatif sur la constitutionnalité des projets des lois également à la demande du président du parlement. Un tel avis est lui aussi donné dans les quinze jours à compter de la date de réception de la demande et dans les sept jours en cas d’urgence. Les avis seront communiqués selon le cas au président de la République ou au président du parlement sans autre forme de publicité.

La compétence pénale de la Haute Cour constitutionnelle

Aux termes de l’article 91 de la Constitution de 1973 et de l’article 117 de celle de 2012, le président de la République n’est pas responsable des actes accomplis dans l’exercice de sa charge sauf en cas de haute trahison. Cependant, ni la Constitution ni aucune autre loi n’ont défini ce crime. La proposition de mise en accusation est faite par un tiers au moins des membres de l’assemblée populaire et doit être approuvée par l’assemblée, lors d’une séance spéciale à huis clos, à la majorité des deux tiers de ses membres. Au-delà même de l’ambiguïté de ce crime et de ses éléments constitutifs, force est de constater qu’au regard de la composition de l’assemblée populaire, le seuil de deux tiers empêche en pratique d’envisager l’activation de cette procédure. La mise en accusation du président de la République l’empêcherait temporairement de s’acquitter de ses fonctions jusqu’à l’issue du procès. Précisément, en vertu, jadis de l’article 91, aujourd’hui de l’article 117 de la Constitution de 2012, c’est à la Haute Cour constitutionnelle qu’il revient de juger le président dans ce cas. Elle est également compétente pour juger tous les complices du président et toutes les autres infractions accomplies et connexes au crime de haute trahison (article 33 de loi n° 19).

L’enquête et le procès se déroulent conformément au code de procédure pénale et la Cour applique les sanctions prévues par le Code pénal et les autres lois applicables (article 34 de la loi n° 19). La Cour élit l’un de ses membres comme juge d’instruction (article 37 de la loi n° 19). À l’issue de l’instruction, c’est ce juge qui renvoie ou non les accusés devant la Cour. Les audiences sont publiques sauf si la Cour estime que le huis clos est nécessaire en vue de sauvegarder l’ordre public ou pour d’autres raisons déterminées par la loi mais le jugement doit être prononcé en toute hypothèse en audience publique (article 40 de la loi n° 19). Le jugement, rendu en dernier ressort, doit être prononcé à la majorité des membres de la Cour (article 41 de la loi n° 19). Aux termes de l’article 37 de la loi n° 7, qui est muette sur la procédure et les lois applicables, en cas de condamnation du président, la peine prévue est la destitution. À vrai dire, on imagine mal une Cour dont les membres sont nommés par le président décider de destituer ce dernier sur la base d’un crime dont les contours ne sont pas strictement définis.

Conclusion

La Haute Cour constitutionnelle était, sous l’empire de la Constitution de 1973, une institution fantoche. Politisée à l’extrême et ne présentant aucune garantie d’indépendance, cette Haute Cour avait des compétences limitées et sa saisine dépendait uniquement de la volonté des membres du pouvoir, le président de la République ou le quart des membres d’un parlement largement aux mains du président. Cette Cour n’a d’ailleurs jamais été saisie et le contrôle de constitutionnalité des normes législatives est resté très longtemps théorique, ce qui avait pour résultat le maintien en vigueur d’un nombre important de lois pourtant inconstitutionnelles à première vue.

La nouvelle Constitution a pris le soin de reconnaître formellement l’indépendance de la Cour et d’insérer ses attributions dans un cadre général. Celles-ci se voient considérablement élargies et approfondies. Cependant, à ce jour, aucune loi, aucun décret, aucun règlement ou aucun projet de loi n’ont été renvoyés à la Cour, ni par le président de la République ni par le cinquième des membres de l’assemblée populaire. Aucune loi ni aucun décret n’ont donc été annulés en raison de leur inconstitutionnalité alors qu’il subsiste, dans l’ordre juridique syrien, un nombre important de normes législatives ou réglementaires manifestement inconstitutionnelles en raison de la violation des droits humains qu’elles comportent.

Le dysfonctionnement de la Cour est principalement dû au mécanisme de la nomination de ses membres. En effet, celui-ci constitue le principal inconvénient de la Cour constitutionnelle en Syrie puisque ce pouvoir est dévolu au président de la République sans aucun contrôle, ni aucune balise. En pratique, tous les membres de la Cour sont nommés uniquement parmi les fidèles du pouvoir. Cette procédure de nomination, et surtout l’absence de toute garantie quant à la compétence ou l’intégrité des personnes nommées, apparaissent en totale contradiction avec le principe de la séparation des pouvoirs tant elle subordonne l’institution au bon vouloir du chef de l’État. Celui-ci dispose en outre du pouvoir de renouveler le mandat d’un ou des membres de la Cour ainsi que de celui consistant à modifier le nombre de ces membres si d’aventure il devait faire face à des juges moins dociles, une hypothèse peu probable dans l’état actuel de la Syrie. Ainsi, le fait que le mandat des membres de la Cour soit de quatre ans renouvelables indéfiniment incitent ces membres à satisfaire le président, le renouvellement de leur mandat leur permettant de continuer à bénéficier des avantages matériels et symboliques attachés à leur fonction, avantages qui échappent à tout contrôle de la part de la Cour des comptes. En définitive, la proclamation formelle de l’indépendance de la Cour ne résiste pas à la procédure de nomination de ses membres. Par ailleurs, le mécanisme de révocation des juges ne garantit pas l’indépendance de la Cour[16]. Confié à l’Assemblée plénière de la Cour, le pouvoir de révoquer l’un de ses membres n’échappe pas à l’influence du président de la République.

En outre, malgré leur extension en 2012, ni le mode de saisine de la Cour, ni les compétences qui lui sont attribuées par la Constitution, ni encore moins la façon dont elle (ne) les exerce (pas) en pratique ne nous permettraient de situer la Haute Cour constitutionnelle parmi les juridictions constitutionnelles des démocraties libérales. Le contrôle de la conventionnalité des révisions constitutionnelles, le contrôle de la constitutionnalité des traités, la destitution du président de la République en cas de violation grave de la Constitution, le contrôle du maintien de l’état d’exception et celui de la répartition des compétences entre le président de la République, le chef du gouvernement et l’assemblée parlementaire, toutes ces matières échappent toujours à la compétence de la Haute Cour constitutionnelle alors qu’elles sont généralement attribuées à toute juridiction suprême digne de ce nom.

Tout futur texte constitutionnel syrien devrait dès lors créer un cadre structurel et opérationnel permettant la mise sur pied d’une véritable juridiction constitutionnelle. Le processus de nomination des juges de la Cour devrait être profondément revu en vue de concrétiser réellement l’indépendance de la Cour. Comme les institutions investies du pouvoir de nomination des juges ont une influence notable sur l’indépendance et le fonctionnement de la Cour, il est important que les juges soient nommés par trois acteurs différents : le parlement, le président de la République et le Conseil supérieur de la magistrature[17]. Il est ainsi essentiel que le mandat des juges soit unique et qu’il ne dépasse pas un terme défini, par exemple neuf années. Afin de garantir l’indépendance de la Cour, il faudrait revoir d’autres dispositions constitutionnelles, notamment celles relatives aux pouvoirs législatifs du président de la République et plus généralement celles visant l’exercice du mandat présidentiel[18]. Les constitutions d’autres nations arabes, la Tunisie par exemple, pourraient sur ce point opportunément inspirer le constituant syrien afin que celui-ci renforce une institution qui devrait se situer au cœur de l’État de droit.


  1. Ainsi lit-on qu’une telle justice constitue le "parachèvement de l’État de droit" ; F. Krenc, "L’État de droit, une exigence à clarifier, un édifice à protéger", Revue trimestrielle des droits de l’homme, n° 128, 2021/4, p. 777.
  2. Le texte de la Constitution du Royaume arabe de Syrie du 13 juillet 1920 est disponible en ligne (en arabe) sur le site du Centre syrien d’études et de recherches juridiques ; URL : https://sl-center.org/archives/2046 (consulté le 25 octobre 2019). Sur l’exercice de ce mandat par la France, voyez A. Sylla, Droit international et constitutions dans les États post-conflits, Thèse de doctorat de droit public, Université Paris Nanterre, 2021, p. 54-57.
  3. Le texte de la Constitution de la République syrienne du 22 mai 1930 est disponible en ligne (en arabe) sur le site du Centre syrien d’études et de recherches juridiques ; URL : https://sl-center.org/archives/2100 (consulté le 25 octobre 2019).
  4. I. Al-Daradji, Les Pères constituants - Histoires politiques et constitutionnelles des travaux de l’Assemblée constituante de la première constitution syrienne après l’indépendance - la Constitution de 1950, Hisham Al-Boustant, Damas, 2021.
  5. Cette jurisprudence fut inaugurée par la décision n° 334 du 22 avril 1974.
  6. Voyez sur ce point le chapitre précédent.
  7. Ainsi, l’article 142 qui prévoit que "la loi détermine les autres activités qui sont incompatibles avec celle de membre de la Haute Cour" ou, entre autres, l’article 149 selon lequel "la loi organise la procédure des audiences et des décisions de la Haute Cour constitutionnelle dans les questions soumises à sa juridiction. Elle fixe le statut de son personnel et les conditions requises pour ses membres, elle en détermine les rémunérations, les immunités, les privilèges et les responsabilités".
  8. En ce sens, voyez M. Boumédiene, "Révolutions arabes et renouveau constitutionnel : une démocratisation inachevée", La Revue des droits de l’homme, 6, 2014, mis en ligne le 18 novembre 2014 ; URL : http://journals.openedition.org/revdh/959 (consulté le 9 septembre 2019), p. 12.
  9. On notera que ce décret n’a pas envisagé l’hypothèse où plus de deux juges constitutionnels sont absents. On imagine que dans ce cas, la Cour serait dans l’incapacité de fonctionner.
  10. A. Ismaail, "Sur l’activation du rôle de la Haute Cour constitutionnelle syrienne. Étude comparative", Journal de l’Université de Damas, vol. XVII, n° II, 2001, 56 pages.
  11. Ibidem, p. 15.
  12. I. Al-Daradji, "The Syrian Connotational Court: How Can it Become a Guarantor of Legitimacy and Citizenship?", Citizenship and Legitimacy Program in the Arab World London, LSE, Londres, 2000, disponible en ligne ; URL : http://eprints.lse.ac.uk/105805/1/Draji_syrian_consititutional_court_arabic_published.pdf (consulté le 5 mai 2021).
  13. Voyez sur ce sujet et cet arrêt, S. Radwan, "L’inconstitutionnalité de la législation dans le cadre des contestations de décisions de justice et la compétence de la Cour constitutionnelle suprême", Barreau de Homs, 2015, disponible en ligne ; URL : https://www.homsbar.org/library_article/283 (consulté le 3 juillet 2019).
  14. I. Al-Daradji, La Cour constitutionnelle dans les constitutions syriennes. Lecture juridique et historique comparée, Citizenship and Legitimacy Program in the Arab World, LSE, Londres, 2000, disponible en ligne ; URL : https://eprints.lse.ac.uk/105792/1/Syrian_Connotational_Court_Book_paper_.pdf (consulté le 5 mai 2021).
  15. J. Alchaurpaji, "Le rôle de la Cour constitutionnelle suprême dans le contrôle de la constitutionnalité des lois en République arabe syrienne sous les constitutions de 1973 et 2012", Revue des sciences économiques et juridiques de l’Université de Damas, vol. 29, n° 3, 2013.
  16. S. Dalla, "De l’État de droit à la bonne gouvernance. Intégration dans les fondements, mécanismes et objectifs", Revue des sciences économiques et juridiques de l’Université de Damas, vol. 30, n° 2, 2014.
  17. N. Bernard-Maugiron, "La Haute Cour constitutionnelle égyptienne, gardienne des libertés publiques", Égypte/Monde arabe, 2, 1999, Le Prince et son juge, mis en ligne le 08 juillet 2008 ; URL : http://ema.revues.org/777 (consulté le 11 septembre 2020).
  18. X. Philippe, "Contrôle juridictionnel et Cour constitutionnelle dans la Constitution", in PNUD, La Constitution de la Tunisie. Processus, principes et perspectives, 2016, en ligne ; URL : https://www.tn.undp.org/content/dam/rbas/doc/Compendium/Part%203/45%20Contr%C3%B4le%20juridictionnel%20et%20Cour%20constitutionnelle%20dans%20la%20Constitution.pdf (consulté le 11 septembre 2020).

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