3 La question des disparitions forcées. La nécessité de ratifier la Convention de New York (2006)

Bassel Al-Masri

Introduction

Le phénomène des disparitions forcées constitue une violation complexe et cumulative des droits humains. En effet, la pratique de la disparition forcée porte quasiment atteinte à tous les droits fondamentaux (droit à la vie, interdiction de tout traitement inhumain, droit à la sûreté, droit à un procès équitable, droit au respect de la vie privée et familiale, etc.). Les victimes sont d’abord secrètement cachées des yeux de tous, puis sont souvent torturées, tuées et leur corps jeté dans des endroits clandestins. Cela laisse les familles des victimes dans un état d’anxiété et de détresse alors qu’elles s’interrogent indéfiniment sur le sort de leurs proches[1]. Les disparitions forcées sont en outre souvent commises dans le but de semer la peur parmi la population civile. Dans le cadre des régimes répressifs, toute personne soupçonnée d’appartenir à une « opposition subversive » doit être éliminée. Tout « opposant gênant » doit également être réduit au silence. Les pratiques de disparitions forcées peuvent ainsi être assimilées à un « terrorisme d’État clandestin » ayant comme fondement le secret et le mensonge[2]. Ceux qui le commettent sont des individus armés, des membres des forces de sécurité ou des milices privées agissant pour le compte d’une partie belligérante qui, souvent, ne s’identifient pas et n’agissent pas conformément aux règles juridiques devant encadrer la conduite des hostilités[3]. Les disparitions forcées ont été pratiquées de façon systématique dans de nombreuses régions du monde. Au cours des cinquante dernières années, on estime à près d’un million les personnes victimes de telles pratiques à travers le monde. Les chiffres pourraient néanmoins être plus élevés en raison du secret qui entoure la disparition et sa non-déclaration[4].

Du terme espagnol desaparecido, l’expression « disparition forcée » a été pour la première fois utilisée, dans les années 1960, pour décrire les enlèvements et meurtres perpétrés au Guatemala par les milices des « escadrons de la mort » à l’encontre des membres des forces antigouvernementales[5]. Avant d’être qualifiées comme telles, les disparitions forcées avaient auparavant déjà été observées. Elles avaient par exemple déjà été pratiquées deux décennies plus tôt en application du décret allemand « Nuit et Brouillard » publié par le régime hitlérien le 7 décembre 1941. Ce texte constitue la première utilisation de la disparition forcée en tant que politique explicite poursuivie par un État et visant à lutter contre « l’insurrection »[6]. Par ce décret, les dirigeants nazis voulaient envoyer les personnes qui mettaient en danger la sécurité allemande dans les territoires occupés, sans donner aucune information à leur famille, les laissant dans le doute quant à leur sort[7]. Mais, à l’époque, le terme « disparition forcée » n’était pas employé pour décrire cette « technique de terreur » utilisée par les dirigeants nazis, tout autant qu’elle ne constituait pas encore un crime contre l’humanité[8]. C’est la raison pour laquelle le général allemand Wilhelm Keitel, qui a joué un rôle important dans l’application du décret « Nuit et Brouillard » et qui a été la première personne à être jugée pour disparition forcée, a été reconnu coupable de crimes de guerre[9].

Le phénomène a, au cours du siècle dernier, surtout été observé dans les pays d’Amérique latine lorsque des dictateurs militaires ont lancé des campagnes systématiques et massives de disparitions forcées dans les années 1970 et 1980. Ces campagnes ont eu lieu notamment au Chili et en Argentine[10]. Dans ce dernier pays, les milices semi-gouvernementales ont commis un grand nombre de disparitions forcées, faisant quelque trente mille victimes entre 1976 et 1983 sans compter leurs familles également victimes de cette politique de terreur[11]. Entre 1990 et 2010, le phénomène a frappé d’autres pays du monde. Au cours de cette période, de nombreux pays tels que l’Algérie, le Sri Lanka, la Russie et le Népal faisaient partie des États « mis à l’index »[12] par le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires constitué par les Nations unies. De nos jours, de nombreux pays sont toujours aux prises avec ce phénomène. Dans son rapport du 30 juillet 2019, le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires note par exemple une augmentation alarmante du nombre de disparitions forcées au Bangladesh[13]. Le Groupe de travail a également exprimé sa profonde préoccupation devant le grand nombre de disparitions forcées en Chine, en Égypte, au Myanmar, Pakistan, Yémen, Venezuela et en Syrie[14]. Rien que dans ce dernier pays, plusieurs dizaines de milliers de disparitions forcées ont été documentées au cours des dernières années[15].

Il était logique que la communauté internationale intervienne, en s’efforçant de créer des mécanismes juridiques spéciaux pour protéger et garantir le droit de ne pas être soumis à cette violation grave des droits humains. Tout d’abord, dans sa résolution 33/173 du 20 décembre 1978, intitulée « Personnes disparues », l’Assemblée générale des Nations unies attire pour la première fois l’attention de la communauté internationale sur la gravité du phénomène qui commence à se propager dans différentes parties du monde[16]. La Commission des droits de l’homme, dans sa résolution n° 20 du 29 février 1980, décide de créer un Groupe de travail ayant pour objectif d’enquêter sur les questions liées aux disparitions forcées ou involontaires[17]. Par la suite, l’Assemblée générale des Nations unies, dans sa résolution n° 47/133 du 18 décembre 1992, adopte une Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (ci-après Déclaration de 1992)[18]. Il s’agit d’un texte fondateur. Même dénuée de toute force obligatoire, cette déclaration demeure un outil essentiel qui a balisé l’adoption ultérieure d’autres instruments juridiques internationaux relatifs à cette question. Cette déclaration établit en effet des lignes directrices que tous les États membres de l’ONU sont invités à respecter comme normes minimales permettant de prévenir et réprimer cette pratique[19].

En 1994, l’Assemblée générale de l’Organisation des États américains (OEA) adopte la Convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes qui constitue le premier instrument régional spécifique à cette question[20]. En outre, le Statut de Rome établissant la Cour pénale internationale, adopté le 17 juillet 1998, inclut dans son article 7, les disparitions forcées comme infraction constitutive d’un crime contre l’humanité, au même titre que la réduction en esclavage ou la torture[21]. Elle doit alors être commise par un État ou une organisation politique ou avec l’autorisation, l’appui ou l’assentiment de cet État ou de cette organisation, dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile à condition que l’auteur ait l’intention de soustraire la victime à la protection de la loi pendant une période prolongée.

Mais l’instrument le plus décisif en la matière est la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (ci-après Convention de New York) qui fut adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 20 décembre 2006[22] et qui est entrée en vigueur le 23 décembre 2010 après le dépôt du vingtième instrument de ratification. À ce jour, nonante-huit États ont signé ce texte et soixante-sept l’ont ratifié et ont adapté leur législation interne en fonction. Parmi les pays qui n’ont toujours pas ratifié la Convention internationale figure notamment la Syrie qui ne l’a même pas signée. Or, la Syrie pratique ardemment les disparitions forcées : depuis le début du conflit armé en 2011, toutes les parties opposées sont responsables de disparitions forcées ce qui a eu un impact dramatique sur l’ensemble de la population syrienne et les milliers de familles victimes de ce phénomène. L’on estime à plus de cent mille le nombre de personnes ayant fait l’objet d’une disparition forcée depuis le début des hostilités en mars 2011[23]. L’adoption de la Convention de New York par la Syrie apparaît aujourd’hui plus nécessaire que jamais. Cette adoption impliquerait une révision importante du système juridique syrien, permettant ainsi une réponse efficace et globale au phénomène de la disparition forcée qui prévaut dans ce pays déchiré.

En effet et indiscutablement, cette convention est d’une grande importance et se situe dans le droit fil de la Déclaration de 1992 précitée dont elle reprend certains éléments, en précise d’autres mais surtout, cette convention est la seule convention juridiquement contraignante au niveau international et qui traite la disparition forcée en tant que crime distinct, contribuant ainsi à combler un vide juridique imparfaitement rempli par des textes non contraignants ou annexes au phénomène. Elle institue également un organe de surveillance, ce qui la distingue de la Déclaration de 1992[24]. Ensuite, elle donne une définition universellement acceptée de la disparition forcée en son article 2, une définition qui peut, en outre, s’appliquer, quelle que soit la situation de paix ou de conflit. Enfin, elle précise les objectifs à atteindre comme la lutte contre l’impunité, la prévention de nouveaux cas de disparitions forcées, la défense des droits des personnes disparues et de leurs familles. Elle contient à ce titre un nombre important de dispositions préventives et répressives destinées à pénétrer les droits internes des États parties. Elle confère également aux victimes, dont font partie les proches des personnes disparues, un arsenal de droits et un véritable statut.

Ainsi, la ratification de la Convention de New York par la Syrie aboutirait à inscrire formellement le crime de disparition forcée dans le droit pénal syrien. En effet, les caractéristiques du crime de disparition forcée correspondent imparfaitement avec des crimes tels que l’enlèvement, la détention arbitraire ou la séquestration. La première partie de ce chapitre sera consacrée à démontrer l’intérêt d’une incrimination spécifique et autonome du phénomène des disparitions forcées (I). En outre, l’adoption de la Convention de New York facilitera la répression des auteurs de ce crime en prévoyant d’une part une responsabilité pénale particulière, d’autre part une peine plus sévère compte tenu de l’extrême gravité que présente toute disparition forcée. Dans ce cadre, une série d’obstacles aux poursuites dont recèle actuellement le droit syrien (lois sur l’état d’urgence, dispositions relatives à l’amnistie ou au droit de grâce, règles de prescriptions…) pourrait ainsi être levée. La deuxième partie de ce chapitre exposera ainsi ces obstacles et envisagera la façon dont ils pourraient être contournés à la suite de la ratification de la Convention de New York par la Syrie (II). Enfin, et plus généralement, cette convention offre un véritable statut et plusieurs droits décisifs aux victimes de ce crime et sur ce point aussi, le droit syrien serait considérablement enrichi par la transposition en droit interne de ces droits internationalement reconnus. Cet apport décisif et l’intérêt de le transposer en droit interne syrien fera l’objet de la troisième et dernière partie de ce chapitre (III).

I. Pour une incrimination spécifique et autonome de la disparition forcée

Quel que soit le système juridique, le statut d’une personne disparue présente de multiples facettes. Ce sont les circonstances associées à la disparition qui permettent de qualifier juridiquement cette situation. La disparition peut être volontaire. En ce sens, elle est similaire à la notion d’absence régie par le droit civil dans la plupart des droits internes. L’absence est alors caractérisée non seulement par le fait que l’individu ne soit plus présent à son domicile, sa résidence ou son travail… mais aussi par le fait qu’il ait disparu sans raison apparente et sans donner de ses nouvelles. On ignore ce que cet individu est devenu, s’il est vivant ou s’il est mort[25].

La disparition d’une personne peut également être involontaire et résulter de circonstances exceptionnelles telles que des catastrophes naturelles, des naufrages ou des guerres. La disparition d’une personne dans de telles circonstances rend le décès certain ou du moins infiniment probable[26]. Ces deux situations précédentes, à savoir l’absence et la disparition, sont généralement régies par les codes civils nationaux[27].

Mais il existe également des disparitions causées par des acteurs particuliers, souvent des agents de l’État. En d’autres termes, les individus, dans ces cas-là, ne disparaissent pas de leur propre volonté ni en raison de circonstances exceptionnelles mettant leur vie en danger ; ils disparaissent plutôt parce qu’on les fait disparaître, contre leur volonté, en ne laissant aucune trace. C’est ce que l’on appelle en droit international la disparition forcée ou involontaire. La tragédie de la disparition forcée commence lorsque des individus pénètrent de force chez quelqu’un, « riche ou pauvre, dans une maison, un taudis ou une cabane, dans une ville ou un village, n’importe où. Ils arrivent à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, généralement en civil, parfois en uniforme, et toujours armés. Sans donner d’explications, sans produire de mandat d’arrêt, souvent même sans dire qui ils sont ou qui les envoie, ils traînent de force un ou plusieurs membres de la famille vers une voiture, usant éventuellement de la violence »[28].

Bien qu’un certain nombre d’éléments constitutifs de la disparition forcée soient déjà interdits et sanctionnés par les instruments relatifs aux droits humains, la disparition forcée ne peut être considérée comme une simple violation de ces droits[29]. En d’autres termes, la disparition forcée est un cumul d’actes (enlèvement, torture, détention arbitraire, exécution extrajudiciaire) mais comme souvent, le tout est plus que la somme de ses parties : la disparition forcée est un « acte spécifique et global » devant être juridiquement saisi comme tel[30]. Tel est précisément l’un des apports décisifs de la Convention de New York de 2006 et l’une des plus-values que présente ce texte notamment par rapport à la Déclaration de 1992 qui ne qualifiait pas le phénomène de la disparition forcée en tant que crime distinct per se[31].

Cette convention, dont le préambule confirme la nature criminelle et l’extrême gravité de toute disparition forcée, définit, en son article 2, la disparition forcée comme « l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi ». Elle précise, en son article 5, que la pratique généralisée ou systématique de la disparition forcée constitue un crime contre l’humanité au sens du droit international applicable. L’article 4 du texte oblige les États parties à prendre les mesures nécessaires en vue d’ériger en infraction pénale la disparition forcée et son article 7 crée l’obligation de prévoir des peines adaptées à l’extrême gravité.

Dans l’un de ses premiers rapports consécutifs à l’entrée en vigueur de cette convention, le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires[32] a constaté qu’un grand nombre d’États avaient codifié, dans leur législation interne, la disparition forcée en tant que crime contre l’humanité et en tant que crime distinct. Tel est, par exemple, le cas en France : la disparition forcée constitue un crime contre l’humanité au sens de l’article 212-1 du Code pénal, ainsi qu’une infraction distincte au regard de l’article 221-12 du même code[33]. Par conséquent, deux qualifications juridiques autonomes sont applicables au phénomène de la disparition forcée : un crime international (infraction sous-jacente du crime contre l’humanité) ou un crime en droit interne (distinct).

En droit syrien, ces deux qualifications n’existent pas. Or, les caractéristiques du crime de disparition forcée correspondent imparfaitement avec des crimes tels que l’enlèvement, la détention arbitraire ou la séquestration[34]. Sur ce point, le Groupe de travail sur les disparitions forcées souligne que, si les États n’étaient pas tenus de respecter strictement dans leur législation nationale, la définition de la disparition forcée contenue dans les instruments internationaux pertinents, ils devraient veiller à ce que la disparition forcée soit définie d’une manière qui la distingue clairement des autres crimes qui s’y rapportent[35].

En droit syrien, les actes de disparition forcée ne peuvent être qualifiés que de séquestrations. Cette dernière n’est pas explicitement prévue dans le Code pénal syrien, mais elle peut être comprise à travers ses articles 555 et 556 relatifs à la privation de liberté. L’article 555-1 dispose que « quiconque prive, de quelque manière que ce soit, une autre personne de sa liberté encourt une peine de prison de six mois à deux ans ». Ainsi, c’est le crime de privation de liberté qui peut être imputé à l’auteur de la disparition forcée. Or, le crime de privation de liberté est totalement insuffisant pour qualifier les actes de disparition forcée. En effet, la privation de liberté n’est qu’une partie de la définition de la disparition forcée car le crime de disparition forcée revêt un caractère complexe de sorte que son élément matériel est constitué de plus d’un acte : la privation de liberté certes mais aussi la dissimulation du sort réservé à la personne disparue. En d’autres termes, pour que l’élément matériel du crime de disparition forcée soit constitué, il ne suffit pas que l’auteur du crime de la disparition forcée prive la victime de la liberté. Il doit refuser ensuite d’admettre que la personne disparue est privée de liberté ou de révéler le sort qui lui est réservé ou l’endroit, généralement secret, où elle se trouve[36]. Autrement dit, la dissimulation de la privation de liberté est « la marque de fabrique »[37] de la disparition forcée, car elle permet non seulement de caractériser l’autonomie de ce crime[38], mais aussi de le distinguer d’autres crimes, tels que la détention arbitraire ou la séquestration[39].

Par ailleurs, le crime de disparition forcée est caractérisé par son auteur, qui doit être un agent direct ou indirect de l’État, dont la responsabilité internationale sera engagée en raison de ce crime. Cette qualité permet désormais de distinguer la disparition forcée de crimes similaires, tels que les enlèvements. Dans le sillage d’autres textes relatifs aux disparitions forcées, l’article 2 de la Convention de New York insiste sur le fait que la disparition forcée est un crime commis « par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État ». Cependant, la qualité de l’auteur peut être envisagée de façon plus large. Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale entré en vigueur le 1er juillet 2002 envisage, dans le cadre des crimes contre l’humanité, que le crime de disparition forcée puisse être commis par le membre d’une « organisation politique »[40].

Enfin, en ce qui concerne le crime contre l’humanité, la loi syrienne ne reconnaît pas cette qualification. Ainsi, le fait qu’un crime de privation de liberté, tel que prévu à l’article 555 du Code pénal syrien, soit commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile en application de la politique d’un État ou d’une organisation (au sens de l’article 5 de la Convention de New York et de l’article 7 du Statut de Rome) est indifférent en droit syrien. Il ne jouera éventuellement un rôle qu’au titre de circonstances aggravantes dans le cas où de nombreuses personnes auraient été privées de liberté de façon arbitraire.

En conclusion, le droit pénal syrien est en l’état largement insuffisant en vue de fonder une politique criminelle adéquate et spécifique aux crimes de disparitions forcées. La ratification, par la Syrie, de la Convention de New York serait sur ce point de nature à susciter une réforme du Code pénal en vue d’y reproduire la définition autonome du crime de disparition forcée, de prévoir la qualité étatique, directe ou indirecte, de ses auteurs et inscrire cette incrimination dans le cadre plus général de la répression des crimes contre l’humanité. Mais telle ne serait pas la seule impulsion qu’emporterait une ratification de cette convention par l’État syrien. En particulier, ce texte offre plusieurs dispositifs permettant de nettoyer le droit interne de toute une série d’obstacles qui actuellement empêchent une politique crédible et performante de répression des auteurs de crimes de disparition forcée.

II. Lever les obstacles à la répression des auteurs de disparition forcée

La Convention internationale contient plusieurs dispositions qui peuvent être envisagées en faveur de la répression des crimes de disparition forcée. Ces dispositions sont prévues notamment aux articles 6, 7 et 8 de la convention. Toute une série d’enjeux sont soulevés par ce texte. Il s’agit des règles relatives à la responsabilité pénale des auteurs du crime de disparition forcée, à l’imputabilité de ce crime aux personnes et en particulier aux chefs hiérarchiques, aux éventuels motifs d’exonération ou encore à la sévérité de la peine envisagée. En outre, toute une série d’obstacles à une politique criminelle en cette matière – par exemple, les questions relatives à la prescription des poursuites ou aux politiques d’amnistie ou de grâce – est également affrontée par le texte de la convention, toute une série d’obstacles dont nous constaterons la prégnance en droit syrien.

La responsabilité pénale individuelle des auteurs du crime de disparition forcée et la question de son imputation

La Convention de New York, en son article 6, établit que tout État partie prend les mesures nécessaires pour déclarer pénalement responsable toute personne impliquée dans un crime de disparition forcée. Cela vise « toute personne qui commet une disparition forcée, l’ordonne ou la commandite, tente de la commettre, en est complice ou y participe ». La responsabilité envisagée ne peut donc être que pénale. Conformément au droit positif applicable aux crimes de guerre, contre l’humanité ou de génocide, la Convention de New York établit que l’auteur ne peut pas se prévaloir des ordres et instructions émis par les autorités (article 6) ainsi que de circonstances exceptionnelles (article 1er) pour justifier le crime de disparition forcée et s’exonérer de sa responsabilité pénale.

En réalité, à l’instar de l’article 28 du Statut de Rome qui est spécifique à la responsabilité pénale des supérieurs hiérarchiques des auteurs des crimes prévus par ce texte, l’article 6 de la Convention de New York prévoit la responsabilité pénale du « supérieur » qui « i) Savait que des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs commettaient ou allaient commettre un crime de disparition forcée, ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement ; ii) Exerçait sa responsabilité et son contrôle effectifs sur les activités auxquelles le crime de disparition forcée était lié ; et iii) N’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour empêcher ou réprimer la commission d’une disparition forcée ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites ». Ce même article précise également que cette responsabilité du supérieur est « sans préjudice des normes pertinentes plus élevées de responsabilité applicables en droit international à un chef militaire ou à une personne faisant effectivement fonction de chef militaire ».

La Convention de New York ne fait donc pas obstacle à l’application des normes de droit international plus sévères dans l’échelle de responsabilité, ce qui oblige à tenir compte aussi de l’article 28 du Statut de Rome et de la jurisprudence subséquente. En effet, cet article 28 convoque simultanément les notions de « chef militaire » et de « personne faisant effectivement fonction de chef militaire ». La notion de chef militaire comprend toute personne exerçant un commandement militaire, quel que soit son rang[41]. En d’autres termes, selon la jurisprudence de la Cour pénale internationale, le terme « chef militaire » désigne toute personne officiellement ou légalement désignée pour exercer des fonctions de commandement militaire. Les chefs militaires et leurs forces doivent faire partie des forces armées régulières d’un État. Ils peuvent également être des personnes nommées comme chefs militaires au sein de forces irrégulières ne dépendant pas d’un gouvernement, conformément aux règles internes de ces forces, écrites ou non écrites[42]. La notion de personne faisant effectivement fonction de chef militaire est plus vaste que celle de chef militaire, puisqu’elle peut comprendre les officiers de police commandant des unités armées de la police ainsi que toute personne qui commande de facto des forces militaires, de police ou des forces paramilitaires[43] peu importe que cette personne soit ou non officiellement ou légalement nommée comme chef militaire ; l’essentiel est qu’elle agisse effectivement comme tel[44]. L’expression « chef militaire ou personne faisant effectivement fonction de chef militaire » comprend en outre des individus qui n’exercent pas exclusivement des fonctions militaires[45].

Cette extension de la notion de « chef militaire » nous semble importante et nécessaire, car la disparition forcée est fréquemment commise dans un contexte politique et sécuritaire tel que des membres de services de sécurité, du renseignement, de la police ou de milices peuvent être impliqués dans sa perpétration. Ainsi, l’adoption de la notion de « personne faisant effectivement fonction de chef militaire » répond largement à la possibilité d’attribuer de la responsabilité pénale à toute personne autrice d’une disparition forcée.

Le supérieur non militaire, quant à lui, est une notion large puisqu’elle peut inclure le chef d’État, les membres civils du gouvernement, les hauts fonctionnaires, les cadres des partis politiques, les représentants élus et les maires[46], même les hommes d’affaires peuvent tomber dans la notion de supérieur civil s’ils agissent au sein d’une organisation hiérarchique leur permettant d’exercer un contrôle efficace sur leurs subordonnés[47].

Cette responsabilité, qui a un aspect subsidiaire, pour les disparitions forcées est engagée dès lors que le supérieur sait que ses subordonnés, placés sous son autorité et son contrôle effectifs, commettaient ou étaient sur le point de commettre une disparition forcée, et qu’il n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables afin d’empêcher ou de réprimer la commission d’une disparition forcée.

Il convient de noter que la nature juridique de la responsabilité hiérarchique diffère selon que l’on se trouve en droit international ou en droit national. La jurisprudence de la Cour pénale internationale considère que la responsabilité du supérieur hiérarchique n’est qu’un moyen subsidiaire de l’attribution de la responsabilité pénale. De fait, elle ne peut être appliquée que si la responsabilité principale ou secondaire visée à l’article 25 du Statut de Rome ne peut être attribuée[48]. En d’autres termes, s’il existe suffisamment de preuves pour faire croire que l’accusé est responsable en tant que coauteur, il n’est plus nécessaire d’examiner sa responsabilité en tant que supérieur hiérarchique au sens de l’article 28[49]. En revanche, en droit interne français, par exemple, la conception est différente qu’il s’agisse d’un crime de disparition forcée autonome ou qualifié de crime contre l’humanité. Dans les deux hypothèses[50], le Code pénal français considère que la responsabilité du supérieur hiérarchique est une forme de complicité. Au contraire, le droit international considère que la responsabilité du supérieur hiérarchique est une forme particulière de responsabilité qui diffère du régime de la complicité[51].

Les textes établissent la responsabilité pénale individuelle à deux niveaux, à savoir la responsabilité pénale traditionnelle et la responsabilité pénale d’une personne située au sein d’une structure hiérarchique. La loi syrienne prévoit évidemment le premier type de responsabilité aux articles 211 à 221 du Code pénal ; le second est par contre inconnu. En effet, ce type de responsabilité n’a pas d’équivalent en droit syrien, à l’exception de certaines dispositions relatives à la responsabilité pénale des actes d’autrui, ainsi que des dispositions relatives au Code pénal militaire. Ce dernier, par exemple, met l’accent sur la nécessité pour les subordonnés de se conformer à leurs supérieurs[52], sans se soucier de la responsabilité du supérieur hiérarchique. Il faudra dès lors et sur ce point la modifier afin de prévoir cette responsabilité particulière dans le droit pénal syrien.

Le refus de tout motif d’exonération

La disparition forcée est l’un des crimes commis collectivement par des agents de l’État ou membres d’une organisation politique, souvent dans le but de faire taire l’opposition au régime en place et de semer la peur et la terreur au sein de la société. Cela suppose généralement un plan criminel au plus haut niveau de l’État. Pour faciliter la mise en œuvre de ce plan, il est ordonné aux agents de l’État de commettre des disparitions forcées sous prétexte de situations exceptionnelles. Il est donc naturel que les personnes impliquées dans la disparition forcée justifient leurs crimes par l’obéissance aux ordres et l’existence d’un état d’exception, afin de ne pas être pénalement responsables. Mais, compte tenu de la gravité des crimes de disparition forcée, les instruments internationaux traitant les disparitions forcées réfutent explicitement la possibilité d’invoquer ces raisons pour exonérer les auteurs de leur responsabilité pénale.

La Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées de 1992 et la Convention de New York de 2006 établissent qu’ « aucun ordre ou instruction émanant d’une autorité publique, civile, militaire ou autre ne peut être invoquée pour justifier une disparition forcée »[53]. La Déclaration ajoute en outre que « toute personne recevant un tel ordre ou une telle instruction a le droit et le devoir de ne pas s’y conformer »[54]. De son côté, le Statut de Rome adopte des dispositions plus restrictives encore en matière d’obéissance aux ordres : les ordres donnés aux subordonnés de commettre un génocide ou des crimes contre l’humanité sont toujours illégaux[55]. Ainsi, obéir aux ordres de commettre une disparition forcée en tant que crime contre l’humanité ne dégage en aucun cas l’auteur de sa responsabilité pénale. Lorsque la disparition forcée est commise comme un acte isolé, sans relever de la catégorie des crimes contre l’humanité, la solution est de considérer l’ordre de pratiquer une telle disparition comme « manifestement illégal ». C’est par exemple le cas du droit français. L’article 122-4 du Code pénal français dispose que « n’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l’autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal ». En réalité, tous les ordres visant à enfreindre les libertés fondamentales, le droit à la vie et à l’intégrité physique des personnes non combattantes doivent toujours être manifestement illégaux[56]. Ce point a d’ailleurs été confirmé par le Comité des disparitions forcées institué par la Convention de New York[57]. La détermination du caractère manifestement illégal de l’ordre est cependant une question de fait qui est laissée à la discrétion du juge[58].

L’article 184 du Code pénal syrien précise que « il n’y a pas d’infraction lorsque le fait a été accompli en vertu d’une disposition de la loi ou d’un ordre légitime émis par l’autorité. Si l’ordre donné était illégal, l’auteur peut être justifié au cas où la loi ne lui permettait pas de vérifier la légalité de l’ordre ». L’article 112 du Code pénal militaire syrien prévoit lui que « quiconque s’abstient d’exécuter un ordre relatif à l’exercice de sa fonction dans son intégralité ou s’abstient d’obéir à des ordres, en paroles ou en actes, ou insiste pour ne pas obéir malgré les ordres répétés qui lui sont adressés, il est passible d’une peine d’emprisonnement de trois mois à deux ans ». La lecture combinée de ces deux dispositions amène à conclure que les auteurs d’une disparition forcée peuvent invoquer l’obéissance aux ordres, surtout si la loi ne leur permet pas de vérifier la légalité de l’ordre. En cas de ratification de la Convention de New York, le législateur syrien devra modifier ces dispositions conformément aux instruments juridiques pertinents et explicitement exclure l’obéissance aux ordres comme motif d’exonération de la responsabilité pénale, et ce, en toute hypothèse.

En ce qui concerne l’état d’exception ou d’urgence, autre motif d’exonération régulièrement avancé, on sait que les crimes de disparition forcée sont commis sous divers prétextes, notamment la protection de la sécurité nationale, l’instabilité politique, les guerres, la lutte contre le terrorisme, la lutte contre le sabotage, l’état d’urgence ou toute autre situation exceptionnelle.

Sur ce point, les instruments juridiques relatifs à la disparition forcée ont explicitement exclu la possibilité de justifier les crimes de disparition forcée, quelles que soient les circonstances ayant présidé à leur commission. Ainsi, l’article 7 de la Déclaration des Nations unies de 1992 dispose que la disparition forcée ne peut être justifiée sous aucun prétexte, quel qu’il soit, qu’il s’agisse d’une instabilité politique interne, d’une menace de guerre, d’un état de guerre ou de toute autre situation exceptionnelle. La Convention de New York, dans son premier article, va dans la même direction, en adoptant le même principe que celui énoncé dans la Déclaration précédente.

En droit syrien, si les autorités ont levé l’état d’urgence par le Décret n° 161 du 21 avril 2011, elles ont néanmoins, le même jour, promulgué un autre décret permettant à la police judiciaire, en matière des crimes contre la sûreté de l’État, d’arrêter et de détenir des personnes pendant soixante jours (Décret législatif n° 55 du 21 avril 2011 chargeant la police judiciaire ou ses représentants d’enquêter sur les infractions et d’entendre des suspects)[59]. Il faut noter que l’expression de « police judiciaire », selon les lois syriennes, inclut non seulement la police ou le parquet mais aussi tous les membres des services de sécurité et des services de renseignement. Or, ces deux derniers services ne sont pas tenus de respecter les garanties fondamentales consacrées dans la constitution ou dans le code de procédure pénale. En effet, les décrets régissant leurs fonctions les dispensent du respect des garanties judiciaires ; en outre, les fonctionnaires de ces services bénéficient d’une immunité puisqu’ils ne peuvent être poursuivis pour des infractions commises dans l’exercice de leurs fonctions[60]. Bref, le remplacement de l’état d’urgence par une loi autorisant la détention d’une personne pendant soixante jours paraît particulièrement problématique et, en pratique, cela permet de légaliser des pratiques manifestement illégales et clairement prohibées par le droit international.

On notera que ce délai de soixante jours apparaît en rupture manifeste avec les principales règles internationales relatives aux garanties dont doit bénéficier tout individu privé de liberté. Songeons ainsi au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui, à son article 9, dispose qu’une personne privée de sa liberté doit être traduite en justice « dans le plus court délai ». Ce délai, selon le Comité des droits de l’homme, ne devrait pas dépasser quelques jours[61]. Le Comité note à cet égard que les États ne fournissent pas d’informations complètes sur ces délais[62]. On peut néanmoins affirmer que, au-delà de quelques jours, le déni de privation de liberté ou le refus de donner des informations sur la personne est considéré comme une disparition forcée. En effet, le Groupe de travail sur les disparitions a souligné à plusieurs reprises que le recours à des « disparitions de brève durée », une pratique répandue et qu’il juge extrêmement préoccupante, constitue une disparition forcée[63].

Vers des peines plus sévères

Dans la théorie pénale classique et son volet rétributif, la réaction de la société à tout crime se traduit par une sanction appliquée par un juge et la peine doit être idoine par rapport au comportement antisocial qu’elle vient sanctionner[64]. Or, comme on l’a dit, la disparition forcée est un crime d’une extrême gravité[65] car elle porte atteinte aux valeurs parmi les plus sacrées de nos sociétés[66]. Les auteurs doivent donc être passibles de peines appropriées à cette extrême gravité. À cet égard, l’article 7 de la Convention de New York oblige chaque État parti à imposer des sanctions appropriées aux auteurs du crime de disparition forcée, en tenant compte de l’extrême gravité de ce crime. Le Statut de Rome, en son article 77, prévoit d’ailleurs la possibilité d’infliger une peine de prison à perpétuité lorsqu’est visé un crime d’une « extrême gravité » et lorsque la situation personnelle du condamné l’exige.

Comme nous l’avons précédemment expliqué, dans le Code pénal syrien, la disparition forcée ne peut être qualifiée que comme une privation de liberté. Or, cette dernière n’est passible que d’une peine d’emprisonnement de six mois à deux ans, ce qui en fait d’ailleurs un délit et non un crime, comme l’indique l’article 178 du Code pénal. Il ne fait aucun doute que ni la nature délictuelle de l’infraction, ni la peine prévue ne respectent l’impératif punitif posé par la Convention de New York. Ce constat contraste avec les peines prévues par d’autres codes pénaux nationaux, ainsi celui français qui prévoit, pour le crime de disparition forcée, une peine de réclusion à perpétuité, soit la peine la plus importante en droit pénal français[67], peine également prévue lorsque cette disparition forcée est constitutive d’un crime contre l’humanité[68]. Cette stricte équivalence entre ces deux peines témoigne du fait que le législateur français reconnaît le caractère extrêmement grave du crime de disparition forcée, quel que soit le contexte dans lequel il a été commis. Ce faisant, le législateur français a suivi à la lettre les recommandations du Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées qui a estimé que « les disparitions forcées, qui constituent lorsqu’elles sont commises en tant que crime contre l’humanité des actes monstrueux, demeurent, lorsqu’elles revêtent la forme d’un acte isolé, un crime gravissime qui appelle une sanction proportionnée »[69].

Ainsi, à la suite de la ratification par la Syrie de la Convention de New York, le législateur syrien devra prévoir dans son Code pénal une peine particulièrement sévère lorsqu’il incriminera spécifiquement la disparition forcée. Outre la dimension rétributive de cette peine, sa sévérité pourrait également participer de l’effet dissuasif du droit pénal et peut-être conduire à une diminution du nombre de disparitions forcées recensées chaque année en Syrie.

Ceci étant, une peine aussi sévère soit-elle serait relativement indolore si, par ailleurs, le droit interne, par divers dispositifs, faisait obstacle à son prononcé ou à son exécution. En d’autres termes, prévoir, dans le droit pénal interne, une peine appropriée à l’extrême gravité de la disparition forcée ne signifie pas qu’une telle peine sera invariablement appliquée : de nombreux obstacles peuvent entraver leur application et donc leur efficacité. Ces obstacles peuvent être naturels – ainsi, le décès du condamné – et n’appellent pas de réforme particulière mais d’autres sont juridiques, ainsi la prescription, l’amnistie et la grâce[70] qui eux nécessitent une révision du droit interne lorsque celui prévoit leur potentielle application à tout crime quel qu’il soit. Il peut ainsi arriver que les autorités étatiques usent de ce type de mesures pour se protéger ou protéger leurs partenaires en adoptant diverses lois d’amnistie ou des mesures analogues et les lignes suivantes seront l’occasion de passer en revue de tels obstacles et d’envisager plusieurs réformes du droit syrien sur ce point.

La question de la prescription

La prescription est, en règle générale, une mesure salutaire : après de nombreuses années sans avoir été poursuivi, l’auteur d’un crime peut échapper à la justice pénale[71]. L’on considère, dans certains cas, que celle-ci n’a plus rien à dire sur ce crime et son auteur car poursuivre quelqu’un pour des crimes très anciens créerait plus de problèmes que le fait de le laisser « impuni »[72]. Il existe toutefois des crimes qui ne sont pas soumis à prescription en raison de leur gravité, tels que les crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale[73]. Si la disparition forcée en tant que crime contre l’humanité est imprescriptible, elle est cependant potentiellement prescriptible en tant que crime distinct. Cette option est admissible à la condition que les délais de prescription soient suffisamment longs pour s’adapter à l’extrême gravité de ce crime. En son article 8, la Convention de New York balise cependant la possibilité pour les États parties de prévoir la prescription de l’action pénale – et non de la peine – visant les actes de disparition forcée : d’une part, le délai de prescription doit être de longue durée et proportionné à la gravité du crime ; d’autre part, elle ne peut commencer à courir que lorsque le crime a cessé compte tenu du caractère continu qu’il présente. Elle ne prévoit donc pas un délai minimal, pas plus que le Groupe de travail sur les disparitions forcées qui indique cependant, dans ses rapports, qu’à ses yeux, la meilleure pratique étatique consiste à prévoir l’imprescriptibilité de ce crime[74]. Cette réticence à admettre la possibilité qu’un État puisse prescrire ce crime était déjà perceptible dans la Déclaration de 1992 qui, en son article 17, prévoit que, « s’il y a prescription des actes conduisant à des disparitions forcées, le délai de prescription doit être de longue durée et en rapport avec l’extrême gravité du crime ». L’expression « s’il y a prescription des actes conduisant à des disparitions forcées » suggère manifestement que les rédacteurs de la Déclaration avaient à l’esprit qu’en principe, les actes de disparition forcée sont imprescriptibles.

Comme mentionné ci-dessus, dans le Code pénal syrien, les actes de disparition forcée ne sont passibles que d’une peine délictuelle d’emprisonnement de six mois à deux ans. Selon le droit syrien et en particulier les articles 162 à 166 du Code pénal, le délai de prescription de l’action pénale, pour les délits, est de trois ans tandis que les peines prononcées se prescrivent en cinq ou dix ans (en fonction de la durée de la peine). Ce délai de trois ans ne satisfait évidemment pas le prescrit de la Convention de New York qui exige manifestement un délai plus long. En conséquence, le législateur syrien devra prévoir des dispositions spécifiques concernant le délai de prescription pour le crime de disparition forcée. En réalité, il sera souhaitable de consacrer une règle spécifique de prescription au crime de disparition forcée car en matière de crimes, le délai de prescription prévu en droit syrien n’est que de dix ans. Enfin, le législateur syrien devra clairement établir que la disparition forcée en tant que crime contre l’humanité est imprescriptible.

Les questions de l’amnistie et de la grâce

Parmi les mesures qui peuvent également entraver l’application de la peine figurent l’amnistie et la grâce[75]. Sur ce point, l’article 18 de la Déclaration de 1992 établit que les personnes ayant commis ou étant présumées avoir commis des disparitions forcées ne devraient bénéficier d’aucune loi d’amnistie spéciale ni de mesures analogues susceptibles de les soustraire aux poursuites ou aux sanctions pénales. Toutefois, le paragraphe 2 de cet article 18 reconnaît explicitement la possibilité pour les États d’exercer un droit de grâce à condition que, dans l’exercice de ce droit, l’extrême gravité des actes de disparition forcée soit prise en compte.

De façon quelque peu étrange à première lecture, la Convention de New York, pour sa part, demeure muette sur les questions d’amnistie et de grâce. Cependant, l’on peut estimer qu’implicitement, la Convention rejette la possibilité que l’auteur d’un crime de disparition forcée bénéficie d’une mesure d’amnistie ou de grâce, et ce au regard de son article 24, sur lequel nous reviendrons et qui fonde le statut des victimes de ce crime et prévoit à leur bénéfice une série de droits. Précisément, le Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées a souligné que « la recherche de la vérité, y compris l’obligation d’enquêter sur les faits et d’identifier, poursuivre et, le cas échéant, sanctionner les coupables est aussi une forme de satisfaction pour les victimes [et] que les droits procéduraux à une enquête, à la vérité et à la justice, sont également fondamentaux pour que les victimes aient le sentiment d’une réparation. En effet, dans certains cas, le processus de vérité et de justice peut en soi constituer une forme de réparation »[76]. Il s’agit là d’une reconnaissance implicite mais certaine : toute mesure qui empêcherait les poursuites et la punition des auteurs affecterait les droits des victimes et devrait donc être exclue. Le Groupe de travail considère d’ailleurs que les lois d’amnistie sont contraires à la Déclaration de 1992 même si elles sont validées par un référendum ou si leur application entraîne directement ou indirectement l’imposition de peines légères aux auteurs de disparitions forcées afin de leur permettre de se prévaloir du droit de ne pas subir deux fois des poursuites pour les mêmes faits[77]. Parmi les mesures analogues contraires à la Déclaration, l’on peut citer, entre autres exemples, l’organisation des poursuites telle qu’elles ne pourraient aboutir qu’à l’acquittement des auteurs ou la condamnation à des peines négligeables[78].

Les lois d’amnistie et de grâce ont suscité de nombreuses controverses, en particulier dans les pays d’Amérique latine où elles furent à plusieurs reprises adoptées et mises en œuvre. Plusieurs de ces États ont d’ailleurs revu ces lois ou réformé d’autres mesures similaires afin d’en réduire le champ d’application ; dans certains cas, il a même été possible de révoquer rétroactivement leur validité juridique, permettant ainsi de rouvrir les procès pour des crimes commis dans le passé, y compris pour des cas de disparition forcée laissés en souffrance[79].

En Argentine, après que la Cour d’appel nationale a prononcé plusieurs condamnations à l’encontre d’anciens fonctionnaires de la junte militaire pour des crimes liés aux disparitions forcées, deux lois d’amnistie ont été adoptées[80], mettant fin aux actions pénales initiées pour des crimes commis durant le régime militaire[81]. Toutefois, ces deux lois d’amnistie, qui avaient favorisé l’impunité, ont été déclarées, en 2003, nulles et non avenues par le Parlement argentin[82]. Plus important, la Cour suprême argentine a déclaré que les deux lois d’amnistie étaient inconstitutionnelles confirmant ainsi l’obligation qui incombe à l’État d’enquêter et de sanctionner les crimes commis pendant la période de la junte militaire[83]. Cette décision de la Cour suprême a conduit à la réouverture des procès liés aux crimes commis par le régime militaire dans les années 1970, dont des milliers d’affaires de disparitions forcées[84] et, corrélativement, à la condamnation de personnes qui auparavant ont bénéficié d’une amnistie[85]. En 2007, cette même cour a prononcé la nullité d’une grâce accordée à un auteur de disparitions forcées survenue en 1990, constituant ainsi un précédent judiciaire important[86].

Dans le même ordre d’idées, le Congrès péruvien, à l’époque du président Fujimori qui « a essayé de faire valoir l’impunité pour les auteurs de violations graves des droits de l’Homme »[87], a pris une mesure controversée en promulguant deux lois d’amnistie : la première a accordé une amnistie générale à tous les membres des forces de sécurité ainsi qu’aux civils, « qui étaient l’objet de plaintes ou d’enquêtes, avaient été inculpés, déclarés coupables ou condamnés et purgeaient des peines de prison, lorsque les violations des droits humains qui leur étaient reprochées avaient été commises entre mai 1980 et juin 1995″[88] ; la deuxième a interdit aux juges de statuer sur la légalité ou l’applicabilité de la première loi d’amnistie[89] dont elle a élargi le champ d’application en accordant une amnistie à tous les militaires, membres des forces de police et représentants civils susceptibles d’être l’objet de mises en accusation pour des crimes passés[90]. Toutefois, ces lois ont été ultérieurement invalidées par la Cour interaméricaine des droits de l’homme qui les a privées de tout effet juridique par une décision remarquable les ayant estimées contraires aux articles 8 (garanties judiciaires) et 25 (protection judiciaire) de la Convention interaméricaine des droits de l’homme, lus en combinaison avec les articles 1er (obligation de respecter les droits de l’homme) et 2 (mise en conformité du droit interne) de ce texte[91]. Elle a, au surplus, considéré que les lois d’amnistie ruinent la protection due aux victimes et contribue au maintien de l’impunité, allant ainsi à l’encontre des objectifs et de l’esprit de la Convention[92]. Bien que sa valeur juridique soit formellement limitée aux États parties à la Convention interaméricaine, cette décision, courageuse et ferme, demeure d’une importance primordiale : en effet, elle fournit une interprétation dynamique du concept de garanties judiciaires et de l’importance de leur respect, un concept que l’on retrouve dans d’autres instruments relatifs aux droits humains largement ratifiés (entre autres, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques) et dont le respect peut se voir, sans trop de difficulté, attribuer le statut de règle coutumière[93]. Ce type de jurisprudence constitue un signal important adressé aux autorités, politiques ou judiciaires, nationales.

Ainsi, dans une affaire récente, la Cour suprême péruvienne a annulé, le 3 octobre 2018, la grâce accordée en 2017 à l’ancien président péruvien Fujimori, ordonnant au surplus son arrestation immédiate[94]. L’ancien président du Pérou a déjà été reconnu coupable de crimes contre l’humanité, y compris de disparitions forcées. Bien que la grâce dont il avait bénéficié était motivée par la détérioration de sa situation sanitaire et à des raisons « humanitaires »[95], la justice péruvienne a tout de même décidé de le renvoyer en prison pour y purger sa peine. Dans cette décision historique, la Chambre pénale spéciale a précisé, d’une part, que les crimes contre l’humanité ne pouvaient rester impunis et, d’autre part, que cette grâce était incompatible avec les obligations internationales incombant à l’État péruvien de respecter les principes généraux établis par la Cour interaméricaine des droits de l’homme[96].

Les statuts des tribunaux pénaux internationaux sont sur cette question contrastés. Tantôt lui réservent-ils une disposition spécifique. Par exemple, le Statut du Tribunal spécial pour la Sierra Leone établit, en son article 10, que la grâce accordée à une personne suspectée d’avoir commis un crime relevant de la compétence du tribunal ne doit pas faire obstacle à l’exercice de poursuites. Tantôt restent-ils, en apparence, muets sur ce point. Le Statut de Rome ne traite pas explicitement de la grâce mais il l’aborde implicitement par son article 110 qui prévoit que seule la Cour a le droit de réduire une peine (à l’exception donc des autorités nationales)[97]. Aussi, si la jurisprudence pénale internationale n’a pas eu l’occasion de se prononcer spécifiquement sur la possible amnistie ou grâce d’un auteur d’une disparition forcée, le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie a estimé que toute mesure nationale prise pour amnistier des auteurs de torture est nulle car en violation flagrante de normes internationales impératives du droit international[98]. Enfin, on notera que cette position a été confirmée par le Rapporteur spécial des Nations unies sur la question de la torture qui a souligné qu’il ne devrait y avoir aucune amnistie pour les auteurs de violations considérées comme des crimes graves tels que la torture, même dans le cadre d’une réconciliation nationale ou d’un soutien à la démocratie ou à la paix[99].

Comme nous l’avons évoqué dans un chapitre précédent, la résolution du conflit armé qui se déroule actuellement en Syrie impliquera probablement un processus de justice transitionnelle et de réconciliation nationale. Inévitablement, un tel processus soulèvera la question de l’amnistie ou de la grâce d’auteurs de violations graves des droits humains. Sur ce point, les lignes qui précèdent ont pu mettre en évidence l’existence d’une règle impérative : l’auteur d’une disparition ne peut bénéficier d’une mesure d’amnistie en amont d’un procès, ou d’une grâce en aval de celui-ci. Cette règle n’est pas explicitement reconnue par la Convention de New York. Mais elle est clairement établie par d’autres documents, par une jurisprudence naissante mais ferme, et par analogie avec d’autres crimes internationaux. Ainsi, l’on peut sans aucun doute soutenir que tout futur gouvernement syrien, à l’instar de plusieurs gouvernements latino-américains[100], devra exclure la grâce et l’amnistie dans l’arsenal prévu pour poursuivre et punir les auteurs de disparitions forcées et d’autres violations gravissimes des droits humains. Cette exigence est du reste indissociable du statut qui doit être reconnu aux victimes de disparitions forcées qui, en vertu de la Convention de New York, bénéficient enfin d’une série de droits destinés à leur reconnaissance et à la réparation du préjudice subi.

III. Offrir aux victimes un statut et un arsenal de droits

L’une des innovations majeures apportées par la Convention de New York a trait aux victimes des disparitions forcées et à la conception large qu’elle porte sur ce point. En effet, le statut de victime doit être reconnu, en vertu de l’article 24 de la Convention, non seulement et bien entendu à la personne disparue mais également, et c’est inédit, à toute personne qui a subi un préjudice direct du fait d’une disparition forcée (on songe évidemment aux proches de la personne disparue)[101]. Le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, qui ne fait aucune distinction entre les victimes « directes » de la disparition forcée et celles plus « indirectes », a systématiquement encouragé les États à ne pas discriminer ces deux catégories de victimes[102]. Ainsi considère-t-il que la personne disparue et celle qui a souffert en raison de cette disparition doivent être considérées comme victimes de disparition forcée et ont donc droit à obtenir réparation[103]. Bref, garantir les droits de la victime d’une disparition forcée signifie garantir simultanément les droits de la personne disparue ainsi que les droits des membres de sa famille.

Néanmoins, la reconnaissance de la qualité de victime à une personne non disparue dépend de l’existence d’un lien de causalité direct entre la disparition et le dommage causé à la personne non disparue. C’est indiscutablement le cas de la famille mais c’est également le cas du militant qui subit des représailles des autorités de l’État après avoir dénoncé une disparition forcée auprès des instances compétentes[104]. Nous commencerons d’ailleurs notre rapide passage en revue des principaux droits reconnus aux victimes, largement entendues donc, par ce droit à la dénonciation, décisif dans l’accès à la justice, et l’obligation corrélative qu’ont les autorités compétentes à examiner les allégations, à enquêter et, le cas échéant, à engager des poursuites. Ensuite, nous envisagerons un autre droit essentiel, celui de connaître la vérité de toutes les circonstances liées à la disparition. Enfin, le dernier droit reconnu aux victimes est celui à la réparation. Rappelons d’ores et déjà, dans le sillage de la deuxième partie de ce chapitre, que l’existence d’une politique criminelle crédible et performante en matière de répression des auteurs de disparitions forcées participe à la satisfaction des droits à la vérité et à la réparation.

Le droit de dénoncer le crime de disparition forcée

L’article 12 de la Convention de New York dispose que « Tout État partie assure à quiconque alléguant qu’une personne a été victime d’une disparition forcée le droit de dénoncer les faits devant les autorités compétentes, lesquelles examinent rapidement et impartialement l’allégation et, le cas échéant, procèdent sans délai à une enquête approfondie et impartiale. » Sur ce point, la Convention, en accordant ce droit à quiconque, va au-delà de la Déclaration de 1992 qui, dans son article 13, n’envisageait ce droit qu’à « toute personne disposant d’informations ou pouvant invoquer un intérêt légitime ». Quoi qu’il en soit, l’octroi de ce droit à des personnes autres que la personne disparue tombe sous le sens : la nature de la disparition empêche en effet la personne disparue de dénoncer les faits[105].

L’article 57 du Code de procédure pénale syrien prévoit que « Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le pôle de l’instruction compétent. « L’expression » se prétend lésée » apparaît ambiguë : interprétée largement, elle pourrait viser les proches d’une disparition forcée (dans l’hypothèse bien entendu où ce crime serait érigé en tant que tel dans le Code pénal syrien) ; une lecture plus stricte suggèrerait cependant que le droit de se constituer partie civile est réservé exclusivement à la victime directe du crime ou du délit. En tout cas, une telle expression n’est pas susceptible de correspondre au large spectre couvert par le pronom indéfini « quiconque » employé à l’article 12 de la Convention de New York. Mais au-delà de la reconnaissance formelle d’un droit élargi à la dénonciation, d’autres mesures sont également impératives et devront, à terme, être implémentées en droit syrien. Ces mesures, davantage encore qu’une réforme formelle du Code pénal, impliqueraient une véritable révolution culturelle dans le chef des autorités étatiques syriennes.

En effet, le droit de dénoncer un crime de disparition forcée signifie que la personne disparue doit avoir accès à la justice, même lors de sa détention par exemple entre-temps « régularisée ». Il permet également aux membres de sa famille mais également aux organisations de défense des droits humains de dénoncer de tels faits devant les autorités compétentes. Ces dernières sont alors obligées d’examiner rapidement et impartialement ces faits et, le cas échéant, de mener une enquête approfondie. Cette possibilité offerte à la société civile est décisive : en effet, la Convention leur ouvre ce faisant la porte des juridictions pénales nationales alors qu’elles ne peuvent directement saisir la justice pénale internationale. Elle leur permet aussi de se substituer aux proches de la personne disparue qui peuvent, parfois par ignorance, souvent par craintes de représailles, ne pas dénoncer des faits de disparitions forcées auprès de la police ou de la justice locales. Ces craintes sont évidemment légitimes : le Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées s’inquiète régulièrement des actes d’intimidation et de représailles dont sont victimes autant les personnes disparues que les membres de leur famille[106].

Contre de tels actes, le droit de dénoncer des faits de disparition forcée a en quelque sorte été protégé : en effet, en vertu de l’article 12 de la Convention de New York, les États parties doivent prendre les mesures appropriées pour protéger, contre tout mauvais traitement ou toute intimidation, toute personne exerçant ce droit à la dénonciation. Enfin, toujours selon les termes de cet article 12, l’État partie doit prendre « les mesures nécessaires pour prévenir et sanctionner les actes qui entravent le déroulement de l’enquête ». Cette obligation découle du fait que les personnes impliquées dans les crimes de disparition forcée sont généralement des agents de l’État. Ceux-ci peuvent donc utiliser leur influence et leur autorité de telle sorte que le droit de dénoncer les faits soit au mieux inutile, au pire la source de représailles. La Convention précise d’ailleurs en termes non équivoques que l’État partie doit s’assurer que « les personnes soupçonnées d’avoir commis un crime de disparition forcée ne sont pas en mesure d’influer sur le cours de l’enquête par des pressions ou des actes d’intimidation ou de représailles exercés sur le plaignant, les témoins, les proches de la personne disparue et leurs défenseurs ainsi que sur ceux qui participent à l’enquête »[107].

Le droit à la vérité

L’article 24 de la Convention de New York prévoit que « Toute victime a le droit de savoir la vérité sur les circonstances de la disparition forcée, le déroulement et les résultats de l’enquête et le sort de la personne disparue. Tout État partie prend les mesures appropriées à cet égard. »[108] Alors que la Déclaration de 1992 ne faisait indirectement référence à ce droit[109], avec la Convention de 2006, c’est la première fois que le droit à la vérité est inscrit de « manière décisive » dans une convention relative aux droits humains[110]. Ce faisant, la Convention inaugurait un processus qu’il ne sera plus possible de stopper par la suite comme en témoignent les reconnaissances ultérieures de ce droit dans toute une série d’instruments ou de prises de position émanant d’organisations internationales, au premier chef les Nations unies, ou régionales. Entre autres exemples, citons le principe 4 de l’Ensemble de principes pour la protection et la promotion des droits de l’homme par la lutte contre l’impunité qui dispose qu’ « Indépendamment de toute action en justice, les victimes, ainsi que leur famille et leurs proches, ont le droit imprescriptible de connaître la vérité sur les circonstances dans lesquelles ont été commises les violations et, en cas de décès ou de disparition, sur le sort qui a été réservé à la victime. »[111] Enfin, le droit à la vérité n’est pas seulement un droit individuel : il s’agit aussi d’un droit collectif qui appartient à la société tout entière et qui à ce titre constitue « une protection essentielle contre le renouvellement des violations »[112] comme l’indique l’experte autrice du rapport précité contenant les principes de lutte contre l’impunité.

Dans son observation générale sur le droit à la vérité, le Groupe de travail sur les disparitions forcées considère que ce droit, dans le contexte des disparitions forcées, « s’entend du droit de connaître le déroulement et les résultats d’une enquête, le sort des personnes disparues ou les lieux où elles se trouvent, les circonstances de leur disparition et l’identité du ou des responsables de cette disparition »[113]. L’État partie ne peut donc satisfaire aux critères de ce droit que s’il identifie les responsables. Et à cette fin, bien que d’autres solutions sont théoriquement possibles, seul un procès pénal en bonne et due forme et rigoureusement mené est susceptible de déterminer l’identité des auteurs d’un crime de disparition forcée, leur responsabilité respective et les circonstances de leur crime. Sous cet angle, le droit à la vérité renforce l’obligation pour l’État de procéder à la répression des auteurs de tels crimes.

D’ailleurs, le droit à la vérité a souvent été soulevé dans le cadre d’affaires où était en jeu l’obligation incombant à l’État de mener des enquêtes effectives sur les violations flagrantes des droits humains, corollaire du droit à un recours judiciaire effectif[114]. Dans une affaire où était en cause une disparition forcée, la Cour européenne des droits de l’homme a sur ce point précisé que la notion de recours effectif au sens de l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme implique la réalisation d’une enquête approfondie et efficace « de nature à permettre d’identifier et de punir les responsables tout en assurant l’accès effectif des proches de la victime à la procédure d’enquête »[115].

Enfin, on notera que pareil droit a également été reconnu par différents tribunaux nationaux tels que la Cour constitutionnelle colombienne ou celle péruvienne ainsi que les cours criminelles fédérales argentines qui ont confirmé le droit des victimes de violations flagrantes des droits humains de connaître la vérité et ont explicitement établi le lien intime qui existe entre ce droit et la lutte contre l’impunité[116].

Le Code syrien de procédure pénale, quant à lui, ne contient pas de dispositions spéciales relatives au droit à la vérité, un droit du reste ignoré par l’ensemble des normes juridiques en vigueur en Syrie. C’est de façon relativement minimaliste que ce code reconnaît un droit général d’accès aux informations judiciaires. Un tel droit, somme toute banal et relativement logique dans tout système judiciaire même celui syrien qui ne brille guère ni par son indépendance, ni par son efficacité, est évidemment insuffisant pour répondre aux exigences posées par la Convention de 2006 et ses commentaires les plus autorisés. Sur ce point aussi, la ratification de ce texte par la Syrie impliquera une réforme explicite du Code de procédure pénale ou de tout autre instrument législatif.

Le droit à réparation

La Déclaration des Nations unies de 1992 précise, en son article 19, que « Les victimes d’actes ayant entraîné une disparition forcée et leur famille doivent obtenir réparation et ont le droit d’être indemnisées de manière adéquate, notamment de disposer des moyens qui leur permettent de se réadapter de manière aussi complète que possible. En cas de décès de la victime du fait de sa disparition forcée, sa famille a également droit à indemnisation. » La Convention de New York a confirmé et précisé la nature de cette obligation. Elle dispose en effet, en son article 24, que « Tout État partie garantit, dans son système juridique, à la victime d’une disparition forcée le droit d’obtenir réparation et d’être indemnisée rapidement, équitablement et de manière adéquate » et qu’un tel droit couvre « les dommages matériels et moraux ainsi que, le cas échéant, d’autres formes de réparation telles que : la restitution ; la réadaptation ; la satisfaction, y compris le rétablissement de la dignité et de la réputation ; des garanties de non-répétition ».

La notion d’indemnisation a été précisée par les Principes fondamentaux et directifs concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire : elle doit viser tous les dommages qui peuvent se prêter à une évaluation économique tels que « le préjudice physique ou psychologique ; les occasions perdues, y compris en ce qui concerne l’emploi, l’éducation et les presta-tions sociales ; les dommages matériels et la perte de revenus, y compris la perte du potentiel de gains ; le dommage moral ; les frais encourus pour l’assistance en justice ou les expertises, pour les médicaments et les services médicaux et pour les services psychologiques et sociaux »[117]. La jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme a d’ailleurs ajusté sa jurisprudence conformément à cette définition large de la notion de réparation. Ainsi a-t-elle admis que la victime, qui avait disparu à dix-neuf ans, avait perdu le revenu qu’elle aurait gagné si elle avait survécu et, par conséquent, décidé de verser une indemnité aux héritiers sur la base de ce manque à gagner[118].

En outre, la réparation doit s’entendre dans son sens littéral ; il s’agit bien de prévoir « une prise en charge médicale et psychologique ainsi que l’accès à des services juridiques et sociaux »[119]. La réparation passe également par « la recherche des personnes disparues, de l’identité des enfants qui ont été enlevés et des corps des personnes tuées, et assistance pour la récupération, l’identification et la ré-inhuma-tion des corps conformément aux vœux exprimés ou présumés de la victime ou aux pratiques culturelles des familles et des communautés »[120].

Le Groupe de travail sur les disparitions forcées souligne toutefois que l’obligation d’enquêter, d’identifier et de punir les responsables de disparitions forcées est également une forme de satisfaction. Pour le Groupe de travail, le processus de justice est en soi une forme de réparation, car l’enquête visant la vérité et l’administration de la justice est d’une importance capitale pour que la victime se sente prise au sérieux et réintégrée dans ses droits[121]. Le droit à réparation, comme le droit à la vérité, semblent donc en partie conditionnés aux démarches adoptées par les autorités compétentes en vue d’identifier et de punir les responsables de disparitions forcées.

Enfin, des mesures visant à empêcher la répétition de tels crimes doivent être adoptées. Cet objectif peut être atteint, d’une part, par la promotion d’une culture des droits humains parmi les responsables de l’application de la loi, en particulier l’armée et les forces de police et, d’autre part, par la révision de lois ou de règlements dont le contenu ou les insuffisances pourraient favoriser la violation massive des droits humains[122]. La garantie la plus importante demeure néanmoins l’incrimination claire et autonome de la disparition forcée dans la législation nationale. À cet égard, dans l’affaire Gomes Lund c Brésil, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a précisé que la criminalisation de la disparition forcée constitue l’une des garanties de sa non-répétition[123] et participe indubitablement de l’effet dissuasif du droit pénal[124].

Il va sans dire que le droit à la réparation d’une victime de disparition forcée fait toujours défaut en droit syrien. Dès l’instant où le crime de disparition forcée n’existe pas en tant que tel dans l’ordre juridique syrien, il est évident qu’un droit spécifique et étendu à la réparation au bénéfice des victimes de ce crime n’est pas plus présent. Ainsi, il n’existe pas de mesures adaptées telles l’identification des personnes disparues, la restauration de la liberté et le retour au lieu de résidence pourtant exigées par le Groupe de travail sur les disparitions forcées[125]. Il faut, à ce stade et dans l’attente d’une ratification de la Convention de New York par la Syrie, se contenter de dispositions génériques, ainsi l’article 129 du Code pénal syrien qui prévoit que « Les sanctions civiles qui peuvent être prononcées, par un juge pénal, sont les restitutions, les dommages-intérêts, la confiscation, la publication de la sentence et les frais. » On peut noter que des mesures telles que la satisfaction, la réadaptation et les garanties de non-répétition ne sont pas prévues alors qu’elles font, comme nous l’avons vu, partie intégrante d’une réelle politique de réparation en faveur des victimes de disparition forcée. Une telle politique sera inhérente à toute ratification de la Convention de New York par la Syrie et, en son centre devront du reste figurer des dispositions spécifiques au crime de disparition forcée, notamment un surcroît d’indemnisations pécuniaires, qui devront être proportionnées à la gravité de la disparition forcée et aux souffrances infligées à la personne disparue et à sa famille[126].

Conclusion

Compte tenu du nombre dramatiquement élevé de disparitions forcées soupçonnées en Syrie depuis le début du conflit et au regard des lacunes que présente actuellement le droit syrien en la matière, la ratification de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées par la Syrie apparaît plus nécessaire que jamais. À la suite de cette ratification, la première étape sera de prévoir une incrimination spécifique et autonome du crime de disparition forcée en incorporant, dans sa définition, les trois éléments constitutifs d’un tel crime, à savoir la privation de liberté, la dissimulation de la privation de liberté et l’implication, active ou passive, d’agents de l’État.

Cette codification de la disparition forcée en droit pénal syrien devra ériger cette infraction en tant que crime distinct mais également et idéalement comme pouvant, compte tenu du contexte dans lequel il est commis, participer à la commission d’un crime contre l’humanité. La deuxième étape consistera à prévoir un système de responsabilité pénale complet, impliquant également, sinon surtout, les supérieurs hiérarchiques et à lever tous les obstacles qui actuellement seraient susceptibles de contrecarrer une politique répressive crédible et efficace. La troisième étape visera à prévoir une peine proportionnée à l’extrême gravité du crime de disparition forcée, en excluant ce dernier du champ d’application des lois d’amnistie ou de mesures analogues. Il sera enfin souhaitable de prévoir l’imprescriptibilité du crime de disparition forcée, à tout le moins de ménager un système de prescription ne restreignant pas les possibilités de poursuites et de prononcer une peine. Enfin, la dernière étape portera plus spécifiquement sur les droits des victimes de disparition forcée et parmi ceux-ci, le droit de dénoncer le crime de disparition forcée, le droit de connaître la vérité et le droit à une réparation effective et totale. Ce chapitre a modestement souhaité baliser le chantier qui s’ouvre à la Syrie et qui sera l’une des pièces importantes de la transition démocratique. La ratification de cette convention par la Syrie sera également susceptible de faire rentrer la Syrie dans le concert des Nations unies, qui passera notamment, en guise de gage de bonne foi de la part du régime syrien, par une collaboration franche et transparente avec le Comité institué par l’article 26 de la Convention, comité compétent pour recevoir les communications de victimes potentielles et pour superviser la bonne application de la Convention par les États parties. Tel est l’un des enjeux majeurs de la transition démocratique syrienne, une transition durant laquelle la société civile locale sera amenée à jouer un rôle décisif comme nous le verrons dans le dernier chapitre de la première partie de cet ouvrage.


  1. J. Sarkin, "Why the Prohibition of Enforced Disappearance has Attained Jus Cogens Status in International Law", Nordic Journal of International Law, vol. 81, n° 4, 2012, p. 537-584, ici p. 538.
  2. B. Taxil, "À La Confluence des droits : la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées", Annuaire français de droit international, vol. 53, n° 1, 2007, p. 129-156, ici p. 129.
  3. J. Sarkin, "Why the Prohibition of Enforced Disappearance has Attained Jus Cogens Status in International Law", op. cit. , p. 538.
  4. Idem.
  5. M. R. Berman, R. S. Clark, "State Terrorism: Disappearances", Rutgers Law Journal, vol. 13, n° 3, 1981, p. 531-558, ici p. 531.
  6. S. Arfat, B. Banday, "Victims of Involuntary Disappearance: An Overview of International Law", Christ University Law Journal, vol. 2, n° 1, 2013, p. 53-68, ici p. 54.
  7. C. Philippe Marino, Les Disparitions forcées dans la jurisprudence des cours régionales des droits de l’homme, Thèse de doctorat, Rouen, Université de Rouen Normandie, 2008, p. 5.
  8. Idem.
  9. Rapport présenté par M. Manfred Nowak, expert indépendant chargé d’étudier le cadre international actuel en matière pénale et de droits de l’homme pour la protection des personnes contre les disparitions forcées ou involontaires, conformément au paragraphe 11 de la résolution 2001/46 de la Commission des droits de l’homme, E/CN.4/2002/71, 8 janvier 2002, § 65.
  10. B. Taxil, "À La Confluence des droits : la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées", op. cit. , p. 131.
  11. A. Verstraeten, "Esquisse d’une anthropologie impliquée auprès des victimes de la disparition forcée", Anthropologie et Sociétés, vol. 32, 2008, p. 72-78, ici p. 72.
  12. B. Taxil, "À La Confluence des droits : la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées", op. cit. , p. 131.
  13. Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, A/HRC/42/40, 30 juillet 2019, § 63.
  14. Ibidem, §§ 69, 71, 76, 81, 84, 90 et 91.
  15. Ibidem, § 84.
  16. Assemblée générale des Nations unies, Résolution "Personnes disparues", 20 décembre 1978, A/RES/33/173.
  17. Nations unies, Commission des droits de l’homme, Résolution 20 (XXXXVI), 29 février 1980.
  18. Assemblée générale des Nations unies, Résolution - Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, 18 décembre 1992, A/RES/47/133.
  19. Nations unies, Haut-Commissariat pour les droits de l’homme, Fiche d’information n° 6 (Rev. 3) - Les disparitions forcées ou involontaires, 1er juillet 2009.
  20. Convention interaméricaine sur la disparition forcée de personnes, adoptée par l’Organisation des États américains (OEA) à Belém do Pará, Brésil, le 9 juin 1994, entrée en vigueur le 28 mars 1996.
  21. Statut de Rome de la Cour pénale internationale, Document A/CONF.183/9 du 17 juillet 1998, entré en vigueur le 1er juillet 2002. Pour rappel, la Syrie n’a pas signé et encore moins ratifié le statut de la Cour pénale internationale.
  22. Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée par l’Assemblée générale des Nations le 20 décembre 2006 par sa Résolution A/RES/61/177, entrée en vigueur le 23 décembre 2010.
  23. Syrian Network for Human Rights, The Tenth Annual Report on Enforced Disappearance in Syria on the International Day of the Victims of Enforced Disappearances. Long Years of Constant Grief and Loss, 30 août 2021.
  24. Nations unies, Haut-Commissariat pour les droits de l’homme, Fiche d’information n° 6 (Rev. 3) - Les disparitions forcées ou involontaires, 1er juillet 2009, p. 9.
  25. F. Terré, D. Fenouillet, Droit civil : Les personnes : Personnalité, Incapacité, Protection, 8e éd., Paris, Dalloz, 2012, p. 41.
  26. Ibidem, p. 45.
  27. Voyez, par exemple, les articles 88 et 112 à 132 du Code civil français.
  28. Nations unies, Haut-Commissariat pour les droits de l’homme, Fiche d’information n° 6 (Rev. 3) - Les disparitions forcées ou involontaires, 1er juillet 2009, p. 1.
  29. B. Taxil, "À La Confluence des droits : la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées", op. cit. , p. 129.
  30. Idem.
  31. Le préambule de cette Déclaration contient notamment l’affirmation suivante : "Gardant à l’esprit que si les actes qui conduisent à des disparitions forcées sont une infraction aux interdictions prévues par les instruments internationaux susmentionnés, il n’en est pas moins important d’élaborer un instrument faisant de tout acte conduisant à la disparition forcée de personnes un crime d’une extrême gravité, et fixant les règles destinées à réprimer et à prévenir de tels crimes." Son article 4 prévoit que "tout acte conduisant à une disparition forcée est un crime passible de peines appropriées, qui tiennent compte de son extrême gravité au regard de la loi pénale".
  32. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, § 13, A/HRC/16/48/Add.3.
  33. Le Code pénal français consacre d’ailleurs tout un chapitre, le chapitre Ier bis du Titre II (Des atteintes à la personne humaine), à la question des disparitions forcées, constitué des articles 221-12 à 221-17.
  34. F. Bellivier, M. Eudes, I. Fouchard, Droit des crimes internationaux, Paris, PUF, 2018, p. 185.
  35. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 10 janvier 2008, § 263, A/HRC/7/2.
  36. Article 7, paragraphe 2, alinéa i) du Statut de Rome.
  37. F. Bellivier, M. Eudes, I. Fouchard, Droit des crimes internationaux, op. cit. , p. 188.
  38. R. Le Boeuf, "Les disparitions forcées", in H. Ascensio, E. Decaux, A. Pellet (dir.), Droit international pénal, 2e éd., Paris, Pedone, 2012, p. 235.
  39. Cour suprême de justice péruvienne, Acuerdo Plenario n° 92009/CJ116, 13 novembre 2009, cité par Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, A/HRC/16/48/Add.3, p. 9.
  40. Article 7, paragraphe 2, alinéa i) du Statut de Rome.
  41. Ph. Currat, Les Crimes contre l’humanité dans le Statut de la Cour pénale internationale, Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 640.
  42. CPI, affaire Bemba, 21 mars 2016, § 176, ICC01/0501/08. Voyez aussi G. Mabanga, "Affaire Bemba : La CPI fixe les critères d’appréciation de la responsabilité pénale du chef militaire et du supérieur hiérarchique", La Revue des droits de l’homme, 2016, mis en ligne le 25 mars 2016 ; URL : http://journals.openedition.org/revdh/2072 (consulté le 5 mars 2021), § 8.
  43. Ph. Currat, Les Crimes contre l’humanité dans le Statut de la Cour pénale internationale, op. cit. , p. 641.
  44. CPI, affaire Bemba, 21 mars 2016, § 177, ICC-01/05-01/08.
  45. Idem.
  46. Ph. Currat, Les Crimes contre l’humanité dans le Statut de la Cour pénale internationale, op. cit. , p. 677. Voyez aussi I. Bantekas, Principles of Direct and Superior Responsibility in International Humanitarian Law, Manchester, Manchester University Press, 2002, p. 82-85.
  47. W. Fenrick, "Article 28", in O. Trifterer (dir.), Commentary on the Rome Statute of the International Criminal Court: Observers’ Notes, Article by Article, Baden Baden, Nomos Verlagsgesellschaft, 1999, p. 520.
  48. CPI, affaire Bemba, 15 juin 2009, § 402, ICC-01/05-01/08.
  49. CPI, affaire Lubanga, 29 janvier 2007, § 321, ICC-01/04-01/06.
  50. Article 213-4-1 du Code pénal (crime contre l’humanité) et article 221-13 du Code pénal français : "Sans préjudice de l’application de l’article 121-7, est considéré comme complice d’un crime de disparition forcée mentionné à l’article 221-12 commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs le supérieur qui savait, ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui indiquaient clairement que ses subordonnés commettaient ou allaient commettre un crime de disparition forcée et qui n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites, alors que ce crime était lié à des activités relevant de sa responsabilité et de son contrôle effectifs".
  51. Comité des disparitions forcées, Liste des points à traiter concernant le rapport de la France soumis en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention. Note du comité, 28 mars 2013, § 7, CED/C/FRA/Q/1.
  52. Voyez par exemple les articles 112 et suivants du Code pénal militaire syrien.
  53. Article 62 de la Convention.
  54. Article 6 de la Déclaration.
  55. Article 332 du Statut de Rome.
  56. H. Renout, Droit pénal général, 18e éd., Bruxelles, Larcier, 2013, p. 236.
  57. Comité des disparitions forcées, Observations finales sur le rapport présenté par la France en application de l’article 29, paragraphe 1, de la Convention, adoptées par le Comité à sa quatrième session (8-19 avril 2013), 8 mai 2013, § 25, CED/C/FRA/1.
  58. Voyez J. Pradel, Droit pénal général, 22e éd., Paris, Cujas, 2019, p. 317.
  59. Voyez la Lettre datée du 9 juin 2011, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent de la République arabe syrienne auprès de l’Organisation des Nations unies, 10 juin 2011, S/2011/353.
  60. Voyez le décret législatif n° 14 du 25 janvier 1969 portant création du Service de la sécurité de l’État, et le décret législatif n° 549 du 25 mai 1969 portant le règlement intérieur du Service de la sécurité d’État.
  61. Nations unies, Récapitulation des observations générales ou recommandations générales adoptées par les organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, 12 mai 2004, p. 145, HRI/GEN/1/Rev.7.
  62. Idem.
  63. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 2 mars 2012, § 50, A/HRC/19/58/Rev.1 et 4 août 2014, § 117, A/HRC/27/49.
  64. J.-Ph. Duroche, P. Pedron, Droit pénitentiaire, 4e éd. Paris, Vuibert, 2019, p. 8.
  65. Préambule de la Convention de New York de 2006.
  66. Préambule de la Déclaration de 1992.
  67. Article 221-12 du Code pénal français.
  68. Article 212-1 du Code pénal français.
  69. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, § 41, A/HRC/16/48/Add.3.
  70. Y. Mayaud, Droit pénal général, 5e éd., Paris, PUF, 2015, p. 712.
  71. X. Pin, Droit pénal général, 9e éd., Paris, Dalloz, 2018, p. 533.
  72. G. Guez, "Les nouvelles règles de prescription en matière pénale", Revue francophone des Laboratoires, vol. 2017, n° 496, 2017, pp. 22-24.
  73. Article 29 du Statut de Rome.
  74. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, § 56, A/HRC/16/48/Add.3. Ce rapport fait référence aux États suivants : Équateur (art. 80 de la Constitution), El Salvador (art. 34 du Code de procédure pénale, encore que la disposition ne s’applique qu’aux disparitions forcées survenues après le 20 avril 1998 et art. 99 du Code pénal), Nicaragua (art. 131 du Code pénal), Panama (art. 120 du Code pénal), Paraguay (art. 5 de la Constitution et art. 102 du Code pénal), Uruguay (art. 7 de la loi n° 18.026 du 4 octobre 2006) et le Venezuela (art. 180-A du Code pénal et art. 29 de la Constitution).
  75. Voyez les articles 151 à 155 du Code pénal syrien.
  76. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 28 janvier 2013, § 62, A/HRC/22/45.
  77. Nations unies, Conseil économique et social, Commission des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 27 décembre 2005, § 492-e., E/CN.4/2006/56.
  78. Ibidem, § 493-e.
  79. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, § 51, A/HRC/16/48/Add.3.
  80. Ley de Punto Final (Loi du point final), n° 23.492 du 24 décembre 1986 et Ley de Obedianca Debida (Loi sur l’obéissance due), n° 23.251 du 8 juin 1987.
  81. G. Citroni, "La lutte contre l’impunité et les disparitions forcées : l’expérience latino-américaine", in Devoir de vérité, FEMED, DDV 06 / 102013, p. 11, en ligne ; URL : https://www.disparitions-euromed.org/sites/default/files/ddv6.pdf (consulté le 23 mars 2021).
  82. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, § 51, A/HRC/16/48/Add.3.
  83. G. Citroni, "La lutte contre l’impunité et les disparitions forcées : l’expérience latino-américaine", op. cit. , p. 11.
  84. Cour suprême, Buenos Aires, 14 juin 2005, S.1767. XXXVIII, Simon, Julio Hector y otros/Privación ilegitima de la libertad ; cité par Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, § 51, A/HRC/16/48/Add.3.
  85. G. Citroni, "La lutte contre l’impunité et les disparitions forcées : l’expérience latino-américaine", op. cit. , p. 11.
  86. Cour suprême, Buenos Aires, 14 juin 2005, S.1767. XXXVIII, Simon, Julio Hector y otros/Privación ilegitima de la libertad ; cité par Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, § 51, A/HRC/16/48/Add.3.
  87. Idem.
  88. Amnesty International, Pérou : Torture et mauvais traitements. Des bonnes résolutions que l’on tarde à mettre en application, 25 juin 2002, p. 12, AMR 46/005/2002, en ligne ; URL : https://www.amnesty.org/fr/documents/amr46/005/2002/fr/ (consulté le 27 mars 2021).
  89. Idem.
  90. G. Citroni, "La lutte contre l’impunité et les disparitions forcées : l’expérience latino-américaine", op. cit. , p. 11.
  91. CIDH, affaire Barrios Altos c. Pérou, 14 mars 2001, § 44.
  92. Ibidem, § 43. Sur la contribution de cette juridiction à l’évolution du droit en la matière, voyez A. Augusto, C. Trindade, "Enforced Disappearances of Persons as a Violation of Jus Cogens: The Contribution of the Jurisprudence of the Inter-American Court of Human Rights", Nordic Journal of International Law, vol. 81, n° 4, 2012, p. 507-536.
  93. Voyez TSL, Ordonnance portant renvoi devant le juge de la mise en état, 15 avril 2010, § 26, CH/PRES/2010/01.
  94. Amnesty International, Pérou. La décision d’annuler la grâce accordée à Alberto Fujimori confirme que les droits des victimes doivent l’emporter sur les décisions politiques, 3 octobre 2018, en ligne ; URL : https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2018/10/no-aplicar-indulto-fujimori-reafirma-derechos-de-victimas/ (consulté le 27 mars 2021).
  95. Décret suprême n° 2812017-JUS, 24 décembre 2017, émis par le président Pedro Pablo Kuczynski cité par Amnesty International, Pérou. Un tribunal national doit réviser la grâce accordée à l’ancien président Alberto Fujimori, 21 septembre 2018, en ligne ; URL : https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2018/09/peru-tribunal-nacional-revisara-el-indulto-otorgado-al-ex-presidente-alberto-fujimori/ (consulté le 27 mars 2021).
  96. Amnesty International, Pérou. En confirmant la nullité de la grâce accordée à Alberto Fujimori, la Cour suprême défend les droits des victimes, 13 février 2019, en ligne ; URL : https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2019/02/peru-al-confirmar-la-nulidad-del-indulto-a-fujimori-la-corte-suprema-respalda-los-derechos-de-las-victimas/ (consulté le 27 mars 2021).
  97. À cet égard, le Conseil d’État belge estime que la grâce royale prévue par la Constitution n’entre pas en conflit avec le Statut de Rome tant que le Roi réserve son droit aux seules peines prononcées par les tribunaux belges ; Doc. Parl., Sénat, Projet de loi portant assentiment au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, fait à Rome le 17 juillet 1998, Avis du Conseil d’État du 21 avril 1999, s.o. 1999/2000, 3 février 2000, n° 2-329/1, p. 98-99.
  98. TPIY, affaire Furundžija, 10 décembre 1998, § 155, IT9517/1-T.
  99. Nations unies, Conseil économique et social, Commission des droits de l’homme, Droits civils et politiques et, notamment, questions de la torture et de la détention. Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Rapport soumis par le Rapporteur spécial, Theo van Boven, 23 décembre 2003, § 40, E/CN.4/2004/56.
  100. Ainsi, tel est le cas des États suivants qui tous ont exclu le crime de disparition forcée du champ d’application des lois d’amnistie ou des mesures analogues même si l’acte n’est pas qualifié de crime contre l’humanité : Colombie (art. 14 de la loi n° 589/2000), Équateur (art. 80 et 120 de la Constitution), Nicaragua (art. 130 du Code pénal), Panama (art. 115 du Code pénal), Uruguay (art. 8 de la loi n° 18.026 du 4 octobre 2006) et Venezuela (art. 180-A du Code pénal et art. 29 de la Constitution). On notera cependant le régime particulier qui est prévu au Guatemala où l’amnistie n’exclut pas la disparition forcée du champ de son application (art. 8 du décret n° 145-1996, loi de réconciliation nationale de 1996 ) ; exemples cités par Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Meilleures pratiques concernant les disparitions forcées faisant l’objet de dispositions dans la législation des États, 28 décembre 2010, § 49, A/HRC/16/48/Add.3.
  101. Voyez aussi Nations unies, Haut-Commissariat pour les droits de l’homme, Fiche d’information n° 6 (Rev. 3) - Les disparitions forcées ou involontaires, 1er juillet 2009, p. 9.
  102. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 2 mars 2012, § 58, A/HRC/19/58/Rev.1
  103. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 28 janvier 2013, § 51, A/HRC/22/45.
  104. O. De Frouville, "La Convention des Nations unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées : les enjeux juridiques d’une négociation exemplaire", Revue Droits fondamentaux, n° 6, janvier-décembre 2006, p. 80.
  105. Ibidem, p. 54. Comparer avec l’article 13 de la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines et traitements inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 qui réserve ce droit de dénonciation à la seule victime d’un acte prohibé par la Convention.
  106. Voyez par exemple Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 13 juillet 2017, § 118, A/HRC/36/39.
  107. Article 12 paragraphe 4 de la Convention de New York.
  108. Pour une synthèse des débats relatifs au droit à la vérité dans le cadre des travaux préparatoires à la Convention de 2006 et la contribution du Groupe de travail des Nations unies sur ce point, voyez P. Naftali, "Le “droit à la vérité” à l’épreuve de ses mobilisations en Amérique latine : entre ressource et contrainte", Revue interdisciplinaire d’études juridiques, vol. 75, 2015/2, spéc. p. 156-158.
  109. Ainsi prévoit-elle entre autres la communication d’informations exactes sur la détention de personnes "disparues" aux familles ou aux avocats (article 10) ou la communication des résultats de toute enquête aux personnes concernées.
  110. O. De Frouville, "La Convention des Nations unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées : les enjeux juridiques d’une négociation exemplaire", op. cit. , p. 80.
  111. Nations unies, Conseil économique et social, Commission des droits de l’homme, Rapport de Mme Diane Orentlicher, experte indépendante chargée de mettre à jour l’Ensemble des principes pour la lutte contre l’impunité - Ensemble de principes actualisé pour la protection et la promotion des droits de l’homme par la lutte contre l’impunité, 8 février 2005, p. 7, E/CN.4/2005/102/Add.1.
  112. Idem. Cette position a été par la suite endossée par le Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ; voyez Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 26 janvier 2011, p. 14, A/HRC/16/48.
  113. Idem.
  114. Nations unies, Conseil économique et social, Commission des droits de l’homme, Promotion et protection des droits de l’homme. Étude sur le droit à la vérité. Rapport du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, 8 février 2006, § 25, E/CN.4/2006/91.
  115. CEDH, affaire Tas c. Turquie, 14 novembre 2000 et affaire Chypre c. Turquie, 10 mai 2001, cité par ibidem, § 28. Voyez aussi sur ce sujet et pour des développements plus récents, P. Caroli, "The Interaction between the International Criminal Court and the European Court of Human Rights – The Right to the Truth for Victims of Serious Violations of Human Rights: The Importation of a New Right?", in P. Lobba, T. Mariniello (dir.), Judicial Dialogue on Human Rights. The Practice of International Criminal Tribunals, Leiden, Brill, Nijhoff, Series: International Studies in Human Rights, vol. 120, 2017, p. 263-281.
  116. Nations unies, Conseil économique et social, Commission des droits de l’homme, Promotion et protection des droits de l’homme. Étude sur le droit à la vérité. Rapport du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, 8 février 2006, § 23, E/CN.4/2006/91.
  117. Nations unies, Assemblée générale, Résolution 60/147. Principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire adoptée le 16 décembre 2005, 21 mars 2006, § 20, A/RES/60/147.
  118. CIDH, affaire Gelman c. Uruguay, 24 février 2011, §§ 292293.
  119. Nations unies, Assemblée générale, Résolution 60/147. Principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire adoptée le 16 décembre 2005, 21 mars 2006, § 21, A/RES/60/147.
  120. D’autres mesures visant à la satisfaction peuvent être prises telle que "[des] mesures efficaces visant à faire cesser des violations persistantes ; [la] vérification des faits et divulgation complète et publique de la vérité, dans la mesure où cette divulgation n’a pas pour conséquence un nouveau préjudice ou ne menace pas la sécurité et les intérêts de la victime, des proches de la victime, des témoins ou de personnes qui sont intervenues pour aider la victime ou empêcher que d’autres violations ne se produisent ; [une] déclaration officielle ou décision de justice rétablissant la victime et les personnes qui ont un lien étroit avec elle dans leur dignité, leur réputation et leurs droits ; [des] excuses publiques, notamment reconnaissance des faits et acceptation de responsabilité ; [des] sanctions judiciaires et administratives à l’encontre des personnes responsables des violations ; commémorations et hommages aux victimes ; [l’]inclusion, dans la formation au droit international des droits de l’homme et au droit international humanitaire et dans le matériel d’enseignement à tous les niveaux, d’informations précises sur les violations qui se sont produites" ; ibidem, § 22.
  121. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 28 janvier 2013, § 62, A/HRC/22/45.
  122. Ibidem, § 65.
  123. Voyez CIDH, affaire Gomes Lund et autres (Guerrilha do Araguaia) c. Brésil, 24 novembre 2010, §§ 284287. Voyez aussi à ce sujet K. Martin-Chenut, "Le renforcement des obligations positives de nature pénale dans la jurisprudence interaméricaine : l’exemple des graves violations des droits de l’homme commises pendant les dictatures des pays du Cône sud", Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, n° 3, 2012/3, p. 718.
  124. CIDH, affaire Gomes Lund et autres (Guerrilha do Araguaia) c. Brésil, 24 novembre 2010, § 109.
  125. Nations unies, Conseil des droits de l’homme, Rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, 28 janvier 2013, § 55, A/HRC/22/45.
  126. Ibidem, § 56.

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