2 Le Comité constitutionnel syrien. Un organe susceptible d’opérer la transition démocratique ?

Salim Sendiane

Introduction

Le 23 septembre 2019, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a annoncé la création d’un Comité constitutionnel pour la Syrie, aussi appelé Commission constitutionnelle, fruit d’un accord longuement négocié entre le gouvernement syrien et l’opposition politique sous l’égide des Nations unies. Ce comité est composé de cinquante représentants du gouvernement syrien, de cinquante représentants de l’opposition et de cinquante membres de la société civile directement nommés par l’ONU. Le lancement de ce comité dirigé par les Syriens a été salué comme le début d’un processus politique susceptible de sortir le pays de sa tragédie[1]. L’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, Geir Pedersen, a ainsi estimé que les travaux du Comité constitutionnel permettront de « surmonter les différences entre les parties syriennes » et « d’ouvrir la porte à un processus politique plus large »[2] tandis que le Conseil de l’Europe envisageait ce comité comme « un mécanisme nécessaire de transition politique vers une Syrie démocratique après la guerre »[3].

Ce comité aura pour tâche d’élaborer et rédiger, dans le cadre du processus de Genève[4], une réforme constitutionnelle qui sera soumise à l’approbation du peuple, en vue de contribuer au règlement politique du conflit syrien et à la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. Ce comité a la faculté de revoir et de modifier la Constitution de 2012, y compris à la lumière de précédentes expériences constitutionnelles syriennes, ou de rédiger une nouvelle constitution[5]. Ce mandat apparemment limité à une réforme constitutionnelle semble en deçà de la somme des enjeux posés par le problème politique syrien dont le spectre dépasse la seule question du contenu d’un texte constitutionnel et de ses modalités d’adoption. Soit. Une autre difficulté réside dans le contexte qui a vu naître ce comité : une situation militaire toujours tendue et parasitée par l’intervention de puissances tierces ; ce comité syrien, né au forceps, n’est donc pas le produit d’un cessez-le-feu, partie d’un accord préalable entre belligérants.

La première partie de ce chapitre reviendra d’ailleurs sur le contexte qui a vu naître ce comité et rappellera les principales étapes qui ont scandé le conflit syrien et abouti à la création de ce comité (I). En particulier, nous reviendrons sur le rôle, constructif ou à l’inverse délétère, de plusieurs pays tiers qui ont pesé de tout leur poids dans l’évolution observée autant sur les lignes de front que dans les salons cossus où se discute l’avenir de la Syrie. Ensuite, en nous attardant à la composition et au fonctionnement de ce comité, nous nous interrogerons sur sa légitimité, sur ses marges de manœuvre et en définitive sur les chances que son travail soit un jour couronné de succès (II).

I. Le fruit d’une longue et pénible négociation

Face aux revendications populaires, la réponse privilégiée du régime fut la répression et ce depuis les années quatre-vingt. Cette stratégie sans issue a culminé au printemps 2011 avec le début d’un conflit ayant abouti à l’une des pires catastrophes humanitaires du XXIe siècle. L’enlisement de la situation a justifié, assez rapidement, une série d’interventions d’organisations internationales ou régionales ainsi que de pays tiers directement intéressés par l’évolution de la situation, qu’il s’agisse d’un renforcement du régime en place ou de son renversement militaire.

La Ligue des États arabes a été, en novembre 2011, la première organisation à mettre la pression sur le régime de Bachar el-Assad[6], tout d’abord en suspendant la participation de la Syrie à ses travaux[7]. À partir du 26 décembre 2011, elle y déploie cent soixante-cinq observateurs avec l’accord du régime. Menée dans un contexte peu propice, leur mission consistait à piloter l’application d’un plan de sortie de crise prévoyant l’arrêt des violences, la libération des détenus, le retrait des chars des villes et la libre circulation des médias étrangers avant l’ouverture de toute négociation[8]. Aucune de ces mesures ne sera mise en œuvre. L’échec de la mission, actée le 18 janvier 2012, conduira la Ligue arabe à hausser le ton et le 22 janvier 2012, son secrétaire général ainsi que le Premier ministre du Qatar enverront une lettre aux Nations unies contenant une feuille de route pour une sortie de crise articulée autour d’un cessez-le-feu, de la formation d’un gouvernement national et du transfert du pouvoir du président syrien Bachar el-Assad à son vice-président[9]. Ce document n’a cependant pas résisté aux veto de la Russie et de la Chine au Conseil de sécurité des Nations unies[10].

Le 23 février 2012, l’ancien secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, est désigné Envoyé spécial conjoint de l’ONU et de la Ligue arabe pour la Syrie[11]. En mars, il soumet aux parties en conflit un plan de sortie de crise composé de six points[12] : 1. Instauration d’un dialogue politique ouvert et dirigé par les Syriens ; 2. Cessation immédiate des hostilités sous le contrôle des Nations unies ; 3. Acheminement de l’aide humanitaire dans toutes les zones touchées par les combats ; 4. Fin de toute détention arbitraire et accès aux lieux de détention ; 5. Liberté de la presse et libre circulation des journalistes sur le territoire ; 6. Respect des libertés d’association et de manifestation de la population syrienne. Ce plan a été accepté par le régime et, surtout, endossé par le Conseil de sécurité des Nations unies en vertu de la résolution 2042, adoptée le 14 avril 2012[13].

Une semaine plus tard, le Conseil de sécurité adoptait la résolution 2043 par laquelle il enjoignait le régime à dûment et intégralement respecter le plan en six points et créait, en vue de contrôler la cessation de la violence armée et l’application de ce plan, la Mission de supervision des Nations unies en Syrie (MISNUS)[14]. Placée sous le commandement d’un observateur militaire et au départ composée de trois cents observateurs militaires non armés, cette mission n’a pu être menée à bien et nonobstant une brève accalmie, sa présence n’a pas été en mesure de prévenir une intensification du conflit.

Le 30 juin 2012, un accord sur les principes d’une transition politique et d’un partage du pouvoir en Syrie est signé à Genève[15], à l’issue d’une réunion du groupe d’action sur la Syrie réunissant les ministres des Affaires étrangères des principales puissances étrangères et des représentants d’organisations régionales[16]. Ce plan d’action, surnommé « Genève 1 », balise l’exécution du plan en six points et des résolutions 2042 et 2043 du Conseil de sécurité, en prévoyant, notamment, un arrêt immédiat des combats. Il envisage également la mise en place d’un gouvernement transitoire doté des pleins pouvoirs et ainsi capable d’instaurer un climat de neutralité dans lequel la transition pourra être opérée. Sa composition, adoptée au consensus, pourra inclure des membres de l’actuel gouvernement au pouvoir, des représentants de l’opposition politique ainsi que d’autres groupes. Il sera chargé de rédiger un nouveau texte constitutionnel soumis à l’approbation du peuple et de préparer la tenue d’élections multipartites, libres et équitables.

Toutefois, en juillet 2012, la Russie et la Chine mettent leur veto, pour la troisième fois, contre un projet de résolution qui donnait dix jours aux autorités syriennes pour qu’elles appliquent intégralement leurs engagements tels que stipulés dans les résolutions 2042 (2012) et 2043 (2012), sous peine de faire l’objet de mesures prises en vertu de l’article 41 de la Charte des Nations unies[17]. Le projet entendait aussi renouveler, pour un mois et demi, le mandat de la Mission de supervision des Nations unies en Syrie (MISNUS). Ce double veto marque la fin du plan en six points. Le 19 août 2012, le mandat de la MISNUS prend fin[18]. Seul demeure un bureau de liaison des Nations unies en Syrie dont le rôle est d’aider à l’établissement d’un dialogue entre le régime, les insurgés et le représentant de l’ONU et de la Ligue des États arabes pour la Syrie. En septembre 2012, Lakhdar Brahimi remplace Kofi Annan en tant que représentant spécial des Nations unies. Il démissionnera en mai 2014 après l’échec de la conférence dite « Genève 2 » tenue au printemps 2014[19].

En effet, en février 2014, les délégations de l’opposition et du régime se sont réunies à Genève en reprenant pour base de discussion le communiqué Genève 1. Rapidement cependant, deux visions s’affrontent : l’opposition met en avant la question de la mise sur pied d’un gouvernement de transition doté des pleins pouvoirs exécutifs et le retrait du chef de l’État dans le processus de transition ; le régime en place, lui, insiste sur la légitimité des combats armés destinés à lutter contre le terrorisme. La négociation se solde par un échec. L’intransigeance du régime est due au soutien indéfectible de ses alliés et notamment de la Russie qui va systématiquement soutenir le régime sur le plan diplomatique en faisant régulièrement usage de son droit de veto au Conseil de sécurité des Nations unies dès que celui-ci envisagera de sanctionner Bachar el-Assad. Renforcé par la puissance russe, ce dernier pourra se montrer inflexible d’autant qu’à partir de la fin septembre 2015, il pourra en outre bénéficier d’une aide militaire directe de la part de l’allié russe[20].

En octobre 2015, à l’initiative des États-Unis et de la Russie, un Groupe international d’appui pour la Syrie (GIAS ou ISSG en anglais) est constitué : il regroupe seize pays dont l’Iran[21], ainsi que l’Union européenne, les Nations unies et la Ligue arabe. À l’issue de négociations tenues à Vienne, le Groupe publie une première déclaration le 14 novembre 2015, par laquelle il affirme sa détermination à assurer une transition politique menée par les Syriens et fondée par le communiqué Genève 1 dans son intégralité. Cette déclaration a ensuite permis au Conseil de sécurité d’adopter la résolution 2254 du 18 décembre 2015 saluée comme une étape peut-être décisive sur le chemin de la paix[22]. La résolution confirme le soutien du Conseil au communiqué Genève 1, appuie les initiatives menées par le GIAS et souligne la nécessité de mettre sur pied une autorité de transition dotée des pleins pouvoirs exécutifs et destinée à organiser la transition vers un nouveau régime démocratique[23]. Cette résolution fixe ainsi un calendrier à cette transition devant culminer endéans les dix-huit mois par l’organisation d’élections libres et transparentes conformément à la nouvelle constitution[24]. Cependant, tel un géant désarmé, la résolution adoptée en vertu du chapitre VI de la Charte des Nations unies (Règlement pacifique des différends) n’annonce aucune mesure contraignante en cas du non-respect de ses dispositions. Presque au même moment, les forces loyalistes remportent une bataille décisive à Alep et détruisent l’un des plus importants quartiers généraux rebelles de la région. La guerre menée à Alep prendra fin un an plus tard, le 22 décembre 2016, avec la victoire du régime[25].

La prise d’Alep par les forces du régime appuyées par ses alliés a produit un changement de rapport de forces et a définitivement consacré le rôle de la Russie, mais aussi de l’Iran et de la Turquie dans l’évolution du conflit. Les pourparlers ne sont plus organisés à l’initiative de l’ONU. En décembre 2016[26], un cessez-le-feu est négocié entre le régime et l’opposition, annoncé par la Russie et par la Turquie, et assorti d’un mécanisme de surveillance des violations. Il ouvre la voie à une nouvelle résolution 2336 du Conseil de sécurité qui a été adoptée à l’unanimité le 31 décembre 2016. Ce texte constitue l’impulsion nécessaire pour relancer le processus politique lors des pourparlers qui se tiennent à Astana au Kazakhstan, à la mi-janvier 2017, des pourparlers attendus avec intérêt par le Conseil de sécurité des Nations unies qui y voit une « étape majeure en vue de la reprise […] des négociations organisées sous l’égide de l’Organisation des Nations unies »[27]. La première séance de pourparlers permet la mise en place de quatre « zones de désescalade » sur le territoire syrien et l’ouverture de discussions entre représentants du régime et de l’opposition sur des questions militaires. La création d’une cinquième zone et le déploiement de troupes des trois pays garants de la zone de désescalade d’Idlib sont envisagés[28]. On notera cependant que la détermination de ces zones a moins pour objectif de favoriser une résolution globale du conflit que d’isoler les combattants de Daesh en vue de diviser et d’affaiblir l’ensemble des groupes, quels qu’ils soient, opposés à Bachar el-Assad ; elle n’est du reste pas dénuée d’intérêts stratégiques spécifiques (ainsi, l’exclusion de tout représentant kurde exigée par la Turquie)[29].

Au fil de l’année 2017 et 2018, le régime a reconquis ses territoires perdus grâce aux soutiens de la Russie et de l’Iran. Sa position politique est renforcée par ces victoires militaires ; il n’a désormais plus aucune raison de faire des compromis. En outre, le récit qu’il porte, soit le fait de revendiquer de lutter contre le terrorisme (un terme qui regroupe sans distinction tout opposant au régime), lui offre une certaine légitimité internationale. La perspective d’une solution consensuelle et négociée parmi toutes les parties s’éloigne. Toutefois, la Russie, soucieuse de transformer son succès militaire en victoire politique appelle à une conférence politique regroupant toutes les parties au conflit, les communautés ethniques et religieuses syriennes. Ce « Congrès de paix inter-syrien » tenu à l’initiative de Moscou et de Téhéran, alliés du régime de Damas, et d’Ankara, soutien des rebelles, s’est réuni à Sotchi, les 29 et 30 janvier 2018, en l’absence d’opposants notables comme le Congrès du dialogue national syrien et les partis kurdes et à la suite de pourparlers tenus à Vienne quelques jours auparavant sous l’égide des Nations unies[30]. L’opposition, abandonnée par ses alliés et affaiblie sur le terrain, se trouve contrainte de se rallier au processus de Sotchi là où elle est réduite à quelques groupes tolérés par Damas : le groupe de Moscou dirigé par Qadri Jamil et le groupe du Caire dirigé par Jihad Makdissi. À l’issue chahutée de la conférence de Sotchi, le chef de la diplomatie russe a cependant assuré que le Comité constitutionnel qu’il était question de constituer comprendrait des délégués de toutes les mouvances syriennes, y compris celles qui n’étaient pas représentées à Sotchi. L’émissaire de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, nommé en juillet 2014, a commenté cette annonce avec prudence, sans doute agacé par les tergiversations des puissances étrangères alors que restait lettre morte depuis plusieurs années le processus entamé à Genève en 2012 : « nous n’avons pas besoin d’un nouveau processus, nous n’avons pas besoin d’un processus concurrent » déclarait-il[31]. En position de force après la reprise des territoires contrôlés par l’opposition, la Russie a soigneusement supprimé toute référence à un gouvernement de transition de la déclaration adoptée à Sotchi, consacrant sur le plan diplomatique l’inamovibilité du régime de Bachar el-Assad : « l’idée d’un changement en profondeur du système politique paraît pour le moment avoir été reléguée à la sphère du non-négociable »[32]. C’est dans ce contexte déséquilibré que prend place la création du Comité constitutionnel en septembre 2019.

II. Composition, fonctionnement et perspectives

Traditionnellement, la forme de gouvernement d’un État, ainsi que le processus constitutionnel qui aboutit à celle-ci, relèvent du droit interne et donc de la souveraineté interne réservé à l’État[33]. Cette indifférence internationale à la forme de gouvernement interne a été consacrée à l’article 2 § 7 de la Charte des Nations unies qui consacre le principe de la non-ingérence des Nations unies dans les affaires « qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un État ». Le droit international accorde ainsi aux États la liberté de choix de leur régime politique, économique et social. Cette liberté est la résultante du principe de l’autonomie constitutionnelle garantie par l’égalité souveraine entre États[34].

Cette conception traditionnelle de l’ordre international n’a pas résisté à la multiplication de conflits internes et de guerres civiles qui constituent aujourd’hui la principale menace pesant sur la sécurité internationale. Or, une partie importante de ces conflits repose sur la revendication du peuple à disposer de lui-même face à un régime jugé arbitraire sinon criminel. La réalisation de la paix mondiale nécessite depuis la fin de la guerre froide de promouvoir l’idéal démocratique qui garantit à son tour le développement[35]. En effet, le développement et le respect des droits de l’homme sont érigés, dans la Charte des Nations unies, comme buts et objectifs de l’Organisation des Nations unies et ils apparaissent aujourd’hui tels des obstacles ou plutôt des balises à l’exercice de l’autonomie constitutionnelle étatique[36]. Ainsi, « le principe de l’égale légitimité des régimes politiques, envisagé comme un corollaire de la souveraineté tend à céder le pas à un principe de légitimité démocratique »[37].

Dans le contexte du Printemps arabe, l’ONU n’a d’ailleurs eu de cesse de souligner la nécessité de répondre aux revendications légitimes des peuples en révolte, insistant ainsi sur la nécessité d’une transition démocratique dans les États en crise[38]. Par rapport à la Syrie, la situation rencontrée par le régime a posé les bases de multiples interventions étrangères de type militaire, politique ou même juridique. En effet, affaiblie sur le terrain, la souveraineté syrienne doit, pour formellement subsister, bénéficier du soutien décisif de puissances étrangères, au premier chef la Russie et l’Iran, qui exercent une influence considérable sur les choix a priori souverains du pays comme l’élaboration et l’éventuelle mise en œuvre d’un processus de transition. Damas est ainsi reléguée à une simple administration chargée, au mieux, de veiller au respect de conventions ou d’accords négociés et signés par ces puissances étrangères au nom de la Syrie. Et face à ce pouvoir assez largement téléguidé, l’opposition politique elle est confisquée par la Turquie dont les intérêts spécifiques sont loin de correspondre aux besoins et aux attentes exprimés par l’ensemble de l’opposition au régime de Bachar el-Assad.

Or, comme on l’a déjà évoqué, l’enjeu de la création du Comité constitutionnel pour la Syrie consiste aussi à permettre aux parties syriennes de se réapproprier leur destin et à décider seules les contours de la transition à mener. L’acte constitutif de ce comité insiste d’ailleurs avec force : il s’agit de constituer « une commission constitutionnelle crédible, équilibrée et inclusive, dirigée et contrôlée par les Syriens »[39], le rôle de l’envoyé spécial des Nations unies devant se limiter à faciliter les travaux en rapprochant les points de vue des parties en présence en vue de dégager un consensus (article 5 du mandat du Comité constitutionnel). Le texte prend soin de répéter que « La Commission constitutionnelle travaillera avec diligence et sans interruption pour produire des résultats et progresser dans ses travaux, sans ingérence étrangère et sans qu’on lui impose un calendrier » (article 7 du mandat). En d’autres termes, le processus constitutionnel auquel devra aboutir ce comité se veut à l’abri de toute tentative de confiscation par une ou plusieurs puissances étrangères.

En pratique cependant, il est évident que ce comité ne bénéficiera pas d’une liberté absolue dans les choix qu’il posera en vue de baliser une nouvelle architecture constitutionnelle à la Syrie post-conflictuelle. Il sera tout d’abord confronté à un phénomène étudié de longue date dans le champ des relations internationales ou du droit international, celui de l’internationalisation des constitutions[40]. Ce phénomène couvre un large spectre de pratiques qui varient entre la simple influence des droits humains internationalement consacrés sur une assemblée constituante, la tutelle exercée par les acteurs internationaux sur le processus constitutionnel proprement dit en passant par l’assistance technique et l’encadrement de la procédure par la communauté internationale[41]. Celle-ci peut être totale et viser l’intégralité du territoire et/ou l’ensemble des pouvoirs constitués, comme dans le cas du Kosovo ou du Timor oriental ou partielle[42] et tel sera vraisemblablement le cas en Syrie. En effet, malgré l’expression de l’autonomie du Comité constitutionnel dans son acte constitutif, non seulement les Nations unies joueront un rôle décisif dans le soutien à ses travaux, comme elle a d’ailleurs déjà joué un rôle en nommant un tiers de ses membres[43], mais en outre, il est fort à parier que plusieurs participants à ce processus prendront en partie leurs ordres auprès de puissances étrangères, à tout le moins leur rendront des comptes. À la suite de ces premières considérations, examinons plus en détail la composition, le fonctionnement et les marges de manœuvre envisagés pour ce comité.

Le mandat et les principales règles de fonctionnement du Comité constitutionnel ont été approuvés par le régime et la Commission syrienne de négociation avec le concours de l’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, Geir Pedersen[44]. Il se compose d’un organe élargi et d’un organe restreint. Les cent cinquante membres siègent au sein de l’organe élargi ; l’organe restreint est formé de quarante-cinq membres : quinze sont désignés par le régime parmi les cinquante qu’il a nommés comme membres de l’organe élargi, quinze autres sont désignés par la Commission syrienne de négociation parmi les cinquante personnes qu’elle a nommées comme membres de l’organe élargi et quinze sont issus des cinquante membres de la société civile désignés par les Nations unies. L’organe restreint se charge d’élaborer et de rédiger les propositions constitutionnelles et l’organe élargi a pour tâche de les adopter (article 2 du mandat). Le choix a donc été de privilégier un travail global au sein d’un seul organe et non une répartition du travail parmi plusieurs commissions thématiques[45] composées proportionnellement par les trois grandes parties représentées au sein de l’organe élargi. Ce choix augure sans doute d’un travail dès le départ plus cohérent ; cependant, l’ampleur de la tâche risque de considérablement ralentir le rythme des travaux.

Au sein de ces deux organes, les décisions sont prises à la majorité de septante-cinq pour cent des voix (soit cent treize membres présents et votant pour l’organe élargi et trente-quatre pour l’organe restreint). Ce seuil de septante-cinq pour cent des voix ne peut être modifié (article 3 du mandat). La présidence de la commission est assurée par les deux coprésidents[46], celui nommé par le gouvernement, Ahmad al-Kuzbari[47], et celui choisi par l’opposition, Hadi al-Bahra[48].

En vertu de son mandat, le Comité constitutionnel est libre de revoir et de modifier la Constitution de 2012, y compris à la lumière d’autres expériences constitutionnelles syriennes ou de rédiger une nouvelle constitution (article 8 du mandat). Deux options coexistent : la première consisterait à partir de la Constitution de 2012 afin d’en effectuer une modification partielle ciblée sur les dispositions constitutionnelles controversées, en particulier celles relatives aux pouvoirs très étendus du président de la République et à la mainmise de l’exécutif sur les autres pouvoirs constitués. Cette option a bien entendu la préférence des représentants du régime membres du comité car elle permettrait à la fois de légitimer la Constitution de 2012 et de donner du crédit aux processus de réforme engagés unilatéralement par le régime. Cette option aboutirait à une version minimaliste de la transition démocratique.

L’actuelle constitution syrienne, adoptée par référendum national en 2012, est le résultat d’une politique réformiste mise en place et monopolisée par le régime. Celle-ci vise à réduire la pression exercée par les grandes puissances contre le régime ayant privilégié le choix militaire en tant que la seule solution à la crise syrienne. En effet, la Constitution de 2012 est le produit d’une commission constitutionnelle formée le 16 octobre 2011 par le décret n° 33 du président de la République. Elle était composée de vingt-neuf membres dont trois femmes. Au pas de charge, en moins de trois mois, et dans un contexte où sur le terrain les combats faisaient rage, cette commission a rédigé un projet transmis au président qui a fixé, par le décret n° 85, le 26 février 2012 comme date du référendum populaire destiné à avaliser ce texte, ce qui fut fait à presque nonante pour cent des suffrages exprimés[49]. Cette constitution est entrée en vigueur le 27 février 2012 à la suite de l’adoption du décret présidentiel n° 94 ; présenté comme une réponse aux revendications populaires, ce texte qui a simplement nettoyé le texte précédent de 1973 n’a évidemment en rien permis une réforme démocratique du pouvoir. La privilégier comme point de départ aux travaux du Comité constitutionnel inscrirait ceux-ci dans le prolongement du régime en place et mettrait définitivement fin à toute velléité de rupture avec ce dernier ; en réalité, afin de repartir sur de nouvelles bases, il conviendrait tout simplement de l’abroger[50].

Mais une seconde option est sur la table : elle consisterait à revoir la Constitution de 1950, texte surnommé « la constitution de l’indépendance », qui jouit d’un prestige indéniable dans l’histoire collective syrienne et constitue d’ailleurs un point de référence constant dans les différentes expériences constitutionnelles syriennes[51]. Fruit d’une assemblée constitutionnelle élue par le peuple et bénéficiant d’une véritable légitimité populaire, ce texte, qui avait mis en place un système équilibré de séparation des pouvoirs et garanti les principaux droits fondamentaux et libertés publiques sur la base de la Déclaration universelle des droits de l’homme[52], est considéré comme emblématique de la vie démocratique que la Syrie a connue dans les années 1960. Même si elle été rédigée dans un contexte sociopolitique extrêmement différent de celui observé aujourd’hui en Syrie, cette constitution pourrait servir d’impulsion et de référence significative dans le cadre des travaux du Comité constitutionnel.

Le choix entre ces deux options constitue l’une des difficultés auxquelles le comité doit faire face. Elle est cependant loin d’être la seule. Ce comité, dont la création est le fruit de longues et laborieuses négociations menées loin du front, bénéficie d’une légitimité fragile contrairement à un comité qui serait le produit d’un processus révolutionnaire soutenu par le peuple ou même d’une commission légalement instituée et chargée de réviser la constitution dans le respect des règles en vigueur. En outre, la réussite des travaux menés par ce comité est assez hasardeuse en l’absence de véritable réconciliation nationale et à l’heure où les conflits se poursuivent sur le terrain notamment dans le nord du pays. Enfin, ce comité devra inévitablement envisager la question de la répression des crimes de guerre et de la réparation des victimes au risque de susciter un sentiment d’impunité qui rendrait le processus irrémédiablement illégitime aux yeux d’une partie importante de la population.

Dans un État en conflit comme la Syrie, passer d’un régime autoritaire à un régime démocratique nécessiterait, idéalement, d’abord la conclusion d’un compromis politique entre les parties opposées, compromis reposant sur quelques principes fondamentaux qui seraient ensuite couler dans une constitution transitoire, puis pérenne. Or, en l’espèce, le processus ne repose sur aucun accord politique préalable – même s’ils restent présents dans les discours, la feuille de route tracée à Genève en 2012 ou encore l’accord en six points forgé par les Nations unies ont fait long feu – et l’on doute de la possibilité pour les membres du Comité constitutionnel de s’entendre sur les principaux axes d’une Syrie démocratique, sur les valeurs et principes qui seront au cœur du prochain régime ou encore sur les modalités d’exercice du pouvoir.

En d’autres termes, on peut s’interroger sur la finalité d’une proposition constitutionnelle adoptée dans de telles circonstances où la charrue juridique semble placée avant les bœufs politiques. Les objectifs d’un tel texte – rompre avec un régime autoritaire, pacifier la société syrienne et recréer une unité nationale – semblent particulièrement ambitieux compte tenu de ce contexte particulier où le pays est encore partiellement à feu et à sang et où aucun accord politique préalable, fut-il minimal, ne balise l’exercice assigné à ce Comité. Le pire serait que l’exercice aboutisse, soit qu’une proposition émane du Comité, mais que, faute de réelle volonté politique, ce texte demeure lettre morte comme les espoirs qu’il aurait fait naître. D’un point de vue plus technique, l’on s’interroge également sur les modalités concrètes d’entrée en vigueur d’une nouvelle constitution. Une période transitoire semble nécessaire a fortiori si la constitution proposée rompt radicalement avec le régime hyper-présidentiel actuellement observé et entend instaurer une démocratie parlementaire. Mais qui définira les termes de la transition et composera les organes politiques chargés de la mettre en œuvre ? Les membres du comité ? Cela ne semble pas formellement relever du mandat qui lui a été assigné puisque l’article 7 de ce mandat se contente de prévoir, de façon assez laconique, que « La Commission constitutionnelle conviendra des moyens d’approbation populaire et de la façon dont la réforme constitutionnelle qu’elle adoptera sera transposée en droit interne syrien et pourra avoir recours aux bons offices de l’Envoyé spécial »[53]. Certes, le préambule de ce mandat fait directement référence à la résolution 2254 du Conseil de sécurité qui, elle, prévoyait une période transitoire de dix-huit mois et balisait déjà à gros traits les organes de la transition – « une gouvernance crédible, inclusive et non sectaire » – mais il est regrettable que le mandat en tant que tel n’ait pas déjà envisagé la nécessité d’une période transitoire et les organes chargés de la gérer[54].

Ainsi, la lettre du Secrétaire général qui fixe le mandat de ce comité ne contient aucune disposition lui permettant de définir les règles régissant la transition ou les dispositions applicables pendant cette période. Cette absence pourrait peut-être s’expliquer par la volonté du pouvoir en place de ne procéder qu’à une révision cosmétique de la Constitution de 2012, ce qui ne nécessiterait en effet aucune période transitoire. Dans cette perspective, toute procédure particulière d’adoption de ce texte, via par exemple l’organisation d’un référendum, semblerait superflue : il suffirait de faire usage de la procédure actuellement prévue par l’article 150 de la Constitution de 2012, soit une initiative prise par le président ou un tiers des membres de l’assemblée, la création d’une commission parlementaire chargée de préparer un projet d’amendement, puis un vote à la majorité des trois quarts au sein de l’assemblée populaire et l’accord définitif du président.

Enfin, il est urgent, en l’absence d’un règlement politique préalable, de remettre sur le métier les mesures notamment envisagées par la résolution 2254 et d’autres feuilles de route élaborées depuis lors. L’on songe à un cessez-le-feu total, au désarmement des milices armées, au départ des milices confessionnelles libanaise, irakienne et afghane du territoire syrien, à la réorganisation des services de sécurité, à la réforme de l’armée, à un règlement de la question des réfugiés ou des populations déplacées, à la libération de personnes arbitrairement détenues… Si ces problèmes persistent sur le terrain, si aucune solution pérenne ne leur est apportée, alors, non seulement le travail du Comité sera rendu plus difficile mais plus généralement, toute période transitoire féconde semble s’éloigner[55].

Conclusion

Depuis sa création en septembre 2019, le Comité constitutionnel syrien s’est réuni lors de six sessions. Force est de constater, avec le représentant des Nations unies pour la Syrie, Geir Pedersen, que ces premières réunions, surdéterminées par l’évolution du rapport de force sur le terrain, à ce jour largement défavorable à l’opposition, ont débouché sur une impasse[56]. À l’heure d’écrire ces lignes, en mars 2022, Geir Perdersen annonçait la reprise des négociations lors d’une session prévue à la fin mars 2022 à Genève. Apparemment, les membres de ce comité se seraient entendus pour envisager, lors de cette session, les thématiques suivantes : les fondements de l’administration de l’État, l’identité de l’État, les symboles du pays et la structure et la fonction des institutions étatiques[57]. Nous verrons si ces négociations aboutissent à une nouvelle dynamique. L’on se contentera prudemment et à ce stade de constater le subtil équilibre ayant présidé à l’élaboration de ce menu, entre sujets a priori anodins et amorce d’une réflexion plus fondamentale sur les contours futurs de l’État syrien.

Mais plus fondamentalement, si une réforme constitutionnelle est devenue un passage obligé dans toute transition démocratique, l’adoption formelle d’une nouvelle charte démocratique ne règle pas tous les problèmes surtout quand les négociations se déroulent sur fond de guerre latente et de conflits persistants. Il semble en effet impossible pour les représentants de l’opposition de négocier sereinement quand leurs camarades de lutte sont actuellement pris en tenaille par les troupes loyalistes qui s’attachent à reprendre le dernier bastion de l’opposition situé dans le nord du pays. Il semble enfin inconcevable de passer sous silence, lors des négociations tenues par les membres du comité, les multiples crimes de guerre et autres violations massives des droits humains dont se rend coupable le régime au pouvoir et qui sont courageusement documentés par des activistes syriens et leurs soutiens internationaux[58]. Inévitablement, la question de la répression et de la réparation de ces crimes devra être affrontée ; à défaut, toute proposition constitutionnelle émise par le comité sera au mieux incapable de répondre aux revendications des centaines de milliers de victimes du conflit syrien, au pire un nouvel épisode de légitimation d’un pouvoir assassin.


  1. ONU Info, "Syrie : le chef de l’ONU annonce un accord sur un Comité constitutionnel", 23 septembre 2019, en ligne ; URL : https://news.un.org/fr/story/2019/09/1052232 (consulté le 18 septembre 2021).
  2. ONU Info, "Syrie : le comité constitutionnel peut contribuer à instaurer la confiance (ONU)", 2 octobre 2019, en ligne ; URL : https://news.un.org/fr/story/2019/10/1053042 (consulté le 18 septembre 2021).
  3. "Situation en Syrie : des perspectives de solution politique ?", rapport réalisé par T. Bakoyannis pour la Commission des questions politiques et de la démocratie de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, 16 mai 2019, doc. n° 14889.
  4. Le processus de Genève désigne les pourparlers menés depuis 2012 en vue de trouver une solution pacifique au conflit syrien. Ce processus enlisé durant de nombreuses années a été relancé par la résolution 2254 adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies le 18 décembre 2015.
  5. United Nations, Security Council, Letter dated 26 September 2019 from the Secretary-General addressed to the President of the Security Council, 27 September 2019, S/2019/775.
  6. M. Lundgren, "Mediation in Syria: Initiatives, Strategies, and Obstacles, 2011-2016", Contemporary Security Policy, vol. 37, n° 2, 2016, p. 273-288.
  7. "La Ligue arabe suspend la Syrie et exige des sanctions", Le Monde, (avec AFP-Reuters), 12 novembre 2011.
  8. V. Duhem (avec AFP), "Syrie : doute au sein de la Ligue arabe sur l’efficacité de la mission des observateurs", Jeune Afrique, 2 janvier 2012.
  9. Conseil de la Ligue arabe, Résolution 7444, 12 janvier 2012, transmise au Conseil de sécurité des Nations unies, S/2012/71, en ligne ; URL : https://digitallibrary.un.org/record/720513?ln=fr#record-files-collapse-header (consulté le 21 octobre 2021).
  10. ONU Info, "Une résolution sur la Syrie bloquée par la Chine et la Russie au Conseil de sécurité", 4 février 2012.
  11. P. Akpinar, "The Limits of Mediation in the Arab Spring: The Case of Syria", Thirld World Quarterly, vol. 37, n° 12, 2016, p. 2294.
  12. R. Gowan, "Kofi Annan, Syria and the Uses of Uncertainty in Mediation", Stability: International Journal of Security and Development, vol. 2, n° 1, 2013, en ligne ; URL : https://stabilityjournal.org/articles/10.5334/sta.ax/print/ (consulté le 21 octobre 2021).
  13. Nations unies, Conseil de sécurité, Résolution 2042 (2012), 14 avril 2012, S/RES/2042 (2012).
  14. Nations unies, Conseil de sécurité, Résolution 2043 (2012), 21 avril 2012, S/RES/2043 (2012).
  15. M. Asseburg, W. Lacher, M. Transfeld, "Mission Impossible ? UN Mediation in Libya, Syria and Yemen", SSOAR – SWP Research Paper, 8/2018, p. 33 ; en ligne ; URL : https://www.ssoar.info/ssoar/handle/document/60446 (consulté le 22 octobre 2021).
  16. Les Secrétaires généraux de l’Organisation des Nations unies et de la Ligue des États arabes, les ministres des Affaires étrangères de la Chine, de la France, de la Russie, du Royaume-Uni, des États-Unis, de la Turquie, de l’Irak (président du Sommet de la Ligue des États arabes), du Koweït (président du Conseil des ministres des Affaires étrangères de la Ligue des États arabes) et du Qatar (président du Comité arabe de suivi de la situation en Syrie de la Ligue des États arabes) et la Haute Représentante de l’Union européenne pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité se sont réunis à l’Office des Nations unies à Genève en tant que Groupe d’action pour la Syrie, sous la présidence de l’Envoyé spécial conjoint de l’Organisation des Nations unies et de la Ligue des États arabes pour la Syrie.
  17. J. Gifkins, "The UN Security Council Divided: Syria in Crisis", Global Responsibility to Protect, vol. 4, n° 3, 2012, p. 377-393.
  18. Nations unies, ONU Info, "Le Conseil de sécurité annonce la fin de la Mission de supervision des Nations unies en Syrie", 16 août 2012.
  19. P. Akpinar, "The Limits of Mediation in the Arab Spring: The Case of Syria", op. cit. , p. 2295.
  20. N. Kozhanov, "Russia’s Military Intervention in Syria Makes It a Key Regional Player", Chattam House, 2 octobre 2015, en ligne ; URL : https://www.chathamhouse.org/2015/10/russias-military-intervention-syria-makes-it-key-regional-player (consulté le 23 octobre 2021).
  21. Auparavant, l’Iran n’avait pas été invité à la table des négociations.
  22. Nations unies, Conseil de sécurité, Communiqué de presse, "Syrie : pour la première fois depuis le début du conflit, le Conseil de sécurité fait preuve d’unité en adoptant une feuille de route pour la paix", 18 décembre 2015, CS/12171.
  23. Nations unies, Conseil de sécurité, Résolution 2054 (2015), 18 décembre 2015, S/RES/2054 (2015).
  24. Voyez pour une analyse opérationnelle de cette résolution, The Carter Center, "Syria’s Transition Governance & Constitutional Options Under U.N. Security Council Resolution 2254", Working Paper, June 2016, en ligne ; URL : https://www.cartercenter.org/resources/pdfs/peace/conflict_resolution/syria-conflict/principles-and-constitutional-provisions-may-8-2016.pdf (consulté le 24 septembre 2021).
  25. Pour un bilan de cette bataille qui dura cinq ans et qui fut parmi les plus violentes du conflit, voyez K. A. Grant, B. Kaussler, "The Battle of Aleppo: External Patrons and the Victimization of Civilians in Civil War", Small Wars & Insurgencies, vol. 31, n° 1, 2020, p. 1-33.
  26. "La Russie, la Turquie, Damas et l’opposition annoncent un cessez-le-feu en Syrie", France 24, 29 décembre 2016.
  27. Nations unies, Conseil de sécurité, Résolution 2336 (2016), 31 décembre 2016, S/RES/2336 (2016).
  28. "Situation en Syrie : des perspectives de solution politique ?", rapport réalisé par T. Bakoyannis pour la Commission des questions politiques et de la démocratie de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, 16 mai 2019, doc. n° 14889.
  29. M. Diexkhoff, "Que négocie-t-on en Syrie ?", Négociations, n° 34, 2020/2, p. 116.
  30. "Syrie : pourparlers du “dernier espoir” à l’ONU à Vienne", Le Point (avec AFP), 24 janvier 2018.
  31. K. Makieh, M. Tsvetkova, "Conférence sur la Syrie mouvementée à Sotchi, l’opposition ignorée", Reuters, 30 janvier 2018.
  32. M. Diexkhoff, "Que négocie-t-on en Syrie ?", op. cit. , p. 120.
  33. H. Gros-Espiell, "Liberté des élections et observation internationale des élections. Rapport général", in Liberté des élections et observation internationale des élections. Actes du colloque de la Laguna, Bruxelles, Bruylant, 1994, p. 79. On notera cependant plusieurs précédents où, à la suite d’élections jugées irrégulières, eut lieu une intervention unilatérale d’une puissance occidentale dans les affaires intérieures d’un autre État ; voyez sur ce point O. Schachter, "Is there a Right to Overthrow an Illegitimate Regime ?", in Mélanges Michel Virally. Le droit international au service de la paix, de la justice et du développement, Paris, Pedone, 1991, p. 423 et K. Nowrot, E. W. Schabacker, "The Use of Force to Restore Democracy : International Legal Implications of the ECOWAS Intervention in Sierra Leone", American University International Law Review, vol. 14, n° 2, 1998, p. 321.
  34. R. Ben Achour, "Rapport introductif" in R. Ben Achour, S. Laghmani (dir.), Le Droit international à la croisée des chemins (Force du droit et droit de la force), Paris, Pedone, 2004, p. 5-15.
  35. Ce lien intrinsèque sera affirmé, en 1993 lors de la Conférence des Nations unies sur les droits de l’homme, par la Déclaration et le Programme d’action de Vienne ainsi que par les trois Agendas de l’ancien secrétaire général des Nations unies B. Boutros-Ghali.
  36. V. Huet, "L’autonomie constitutionnelle de l’État : déclin ou renouveau ?", Revue française de droit constitutionnel, n° 73, 2008/1, p. 65-87.
  37. H. Thierry, "L’État et l’organisation de la société internationale", in L’État souverain à l’aube du xxie siècle. Actes du Colloque de Nancy. XXVIIe colloque de la Société française pour le droit international, Paris, Pedone, 1994, p. 146 ; cité par D. Kokoroko, "Souveraineté étatique et principe de légitimité démocratique", Revue québécoise de droit international, vol. 16, n° 1, 2003, p. 45.
  38. R. Kherad, "Responsabilité de protéger, souveraineté de l’État et révoltes populaires", in R. Ben Achour (dir.), Souveraineté de l’État et révoltes populaires, colloque de Tunisie des 12 et 14 avril 2012, Toulouse, Presses de l’Université Toulouse 1 capitole, 2013, p. 55-72.
  39. Nations unies, Conseil de sécurité, Mandat et principales règles de fonctionnement de la Commission constitutionnelle crédible, équilibrée et inclusive dirigée et contrôlée par les Syriens sous les auspices de l’Organisation des Nations unies à Genève, 27 septembre 2019, S/2019/775.
  40. L. Delbez, "Le concept d’internationalisation", Revue générale de droit international public, 1967, p. 5-62.
  41. Q. Barnabé, L. Paiola, "Le processus constitutionnel de l’État en crise exercé sous la contrainte internationale : étude du cas de la Bosnie-Herzégovine", Revue juridique de l’Ouest, 2015/3, p. 41-56.
  42. M. Guimezanes, "Les transitions constitutionnelles “internationalisées” : étude de droit interne", Revue française de droit constitutionnel, n° 104, 2015/4, p. 801-822, spéc. p. 814. Voyez aussi N. Maziau, "L’internationalisation du pouvoir constituant. Essai de typologie : le point de vue hétérodoxe du constitutionnaliste", Revue générale de droit international public, vol. 3, 2002, p. 549-580.
  43. United Nations, Security Council, Letter dated 26 September 2019 from the Secretary-General addressed to the President of the Security Council, 27 September 2019, S/2019/775.
  44. Nations unies, Conseil de sécurité, Mandat et principales règles de fonctionnement de la Commission constitutionnelle crédible, équilibrée et inclusive dirigée et contrôlée par les Syriens sous les auspices de l’Organisation des Nations unies à Genève, 27 septembre 2019, S/2019/775.
  45. Tel fut le cas en Tunisie où six commissions chacune composée de vingt-deux membres avait un "chapitre" de la future constitution à rédiger (préambule, droits et libertés, pouvoir législatif…). Pour une description du processus ayant abouti à la nouvelle constitution tunisienne, voyez "La transition politique en Tunisie", rapport réalisé par T. Loucaides pour la Commission des questions politiques et de la démocratie de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, 15 mai 2017, doc. n° 14323.
  46. Aux termes de l’article 4 de la lettre, "les coprésidents peuvent notamment : – présider et diriger les réunions et les séances ; – proposer des règles de fonctionnement et veiller à ce qu’elles soient respectées ; – proposer l’ordre du jour et les programmes de travail afin de faciliter l’examen de toutes les questions sans qu’il faille s’être accordé sur telle ou telle question pour en examiner telle ou telle autre ; – proposer et inviter des intervenants ; – promouvoir la participation des femmes ; – recevoir et proposer des idées sur les travaux, selon qu’il convient ; – se coordonner avec l’Envoyé spécial afin que celui-ci leur apporte son concours dans l’exercice de leurs fonctions".
  47. Ahmad al-Kuzbari est le président de la Commission constitutionnelle et législative de l’Assemblée du peuple.
  48. Hadi al-Bahra est titulaire d’une licence en ingénierie industrielle de l’Université de Wichita (États-Unis). Il a présidé la Coalition nationale syrienne rassemblant les forces de l’opposition entre juillet 2014 et janvier 2015. Il a été président de la Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution syriennes et a dirigé les négociateurs de la délégation de la coalition à Genève.
  49. En février 2012, le nombre de personnes titulaires du droit de vote en Syrie était estimé à 14.589.954 personnes. 8.376.447 personnes, soit 57,4 %, ont effectivement participé au référendum constitutionnel. 7.490.319 soit 89,4 % ont approuvé la constitution, 9,4 % l’ont rejetée et 132.920 (1,6 %) ont votés nul ; AFP/Reuters, "En Syrie, près de 90 % de oui au référendum sur la Constitution", Le Monde, 27 février 2012.
  50. Stiftung Wissenschaft und Politik – German Institute for International and Security Affairs, The Day After. Supporting a Democratic Transition in Syria Vision, Principles, Objectives, Challenges, and Recommendations, août 2012, en ligne ; URL : https://www.swp-berlin.org/publications/products/comments/2012C28_TDA.pdf (consulté le 24 octobre 2021).
  51. Sur l’importance de ce texte dans la culture constitutionnelle syrienne, voyez Syrian Center for Political and Strategic Studies (Syrian Expert House), "Chapter 4. Drafting a Modern Constitution for Syria", in Syrian Transition Roadmap, Washington, 2013, en ligne ; URL : https://constitutions.albasio.eu/wp-content/uploads/Saggio-3-Siria.pdf (consulté le 24 octobre 2021).
  52. Pour consulter le texte de cette constitution, voyez M. Y. Sabbagh (dir.), Syrian Constitutional History, Damas, Dar Al Sharq, 2010. Ce livre reproduit et commente le texte de toutes les constitutions adoptées en Syrie entre 1920 et 1973.
  53. Si dans sa version anglaise, cette lettre de mandat évoque bien une popular approval, sa version arabe parle d’une approbation publique ou générale ce qui, en droit n’est évidemment pas anodin a fortiori après l’épisode référendaire de 2012.
  54. On pourrait ainsi imaginer un gouvernement provisoire composé à l’instar du Comité constitutionnel avec une représentation identique des trois types de membres constituant le Comité ainsi qu’une assemblée provisoire chargée de mener le processus constitutionnel à bien et lui aussi composée de façon tripartite.
  55. Voyez en ce sens ce rapport réalisé pour l’United Nations Economic and Social Commission for Western Asia dans le cadre du National Agenda for the Future of Syria (NAFS) et plus particulièrement du Programme Constitutional Options for Syria : I. Daraji, Constitutional Options for Syria, Governance, Democratization and Institutions Building, November 2017.
  56. A. Abedeli, "Pourquoi les négociations du Comité constitutionnel syrien se sont soldées par une “déception”", SwissInfo.ch, 15 février 2021.
  57. "Reprise à Genève des pourparlers du Comité constitutionnel syrien", Maroc diplomatique, 23 mars 2022, en ligne ; URL : https://maroc-diplomatique.net/reprise-a-geneve-des-pourparlers-du-comite/ (consulté le 24 mars 2022).
  58. Voyez ainsi les nombreux rapports établis par le réseau syrien des droits humains disponibles en ligne sur le site suivant : pro-justice.org.

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